Guéret : La lutte pour le service public est une lutte pour l’égalité républicaine

dimanche 21 juin 2015.
 

J’étais à Guéret

C’était la manifestation nationale pour la défense des services publics. Depuis la grande mobilisation de 2005, c’est devenu un rendez-vous régulier quoiqu’il ne soit pas toujours appelé dans la Creuse. J’y ai participé plusieurs fois ces dernières années. Cette fois encore, en plus d’être là pour un combat il y avait la chaleur de la fraternité des têtes dures. En ce qui me concerne, l’accueil a été très chaleureux et j’ai bien rechargé la batterie. Plusieurs milliers de personnes étaient présentes. Quel crève-cœur ! La défense des services publics est toujours d’actualité sous un gouvernement « socialiste ». Les menaces n’ont pas changé. Mais elles se sont aggravées compte tenu des saignées déjà opérées. Aux libéralisations et privatisations se sont ajoutées au fil des ans les coupes claires de l’austérité. Les coupes dans les budgets publics et sociaux entraînent partout un rétrécissement du champ du service public : réduction d’horaire, fermeture de tel ou tel service, défaut d’entretien, manque de personnel. Ce qui reste dysfonctionne nécessairement toujours davantage. Surgissent alors les vautours médiatiques qui mettent en scène ce qui ne marche pas pour exiger que cela « coûte moins cher » en insultant au passages les salariés de ces services présentés comme des nantis planqués et fainéants.

Dans le moment, l’actualité de la loi Macron excitait la lutte ! Dans le fouillis d’innombrables articles dont les législateurs ne maîtrisent pas toujours toutes implications, chaque jour des observateurs mettent en exergue tel ou tel point. Mais il y en a tant ! Il est clair que le travail du dimanche n’en est qu’un aspect. Par exemple, Macron décide la privatisation des aéroports de Lyon et Nice, après celle de l’aéroport de Toulouse. Avec les autoroutes, c’est une nouvelle infrastructure publique de transports qui va être bradée dans des conditions contraires à l’intérêt général. La loi Macron est aussi une telle étape dans le grand démantèlement du service public ferroviaire. On se souvient qu’elle prévoit de proposer des transports par autocars en concurrence avec des lignes de trains. On aura surtout été choqué du cynisme avec lequel cette trouvaille fut présentée.

En octobre dernier, Macron se crut malin d’exprimer sa compassion sociale avec les mots d’une Marie Antoinette enjoignant aux pauvres de manger de la brioche puisqu’ils ne trouvaient pas de pain. « Les pauvres qui ne peuvent pas voyager pourront voyager plus facilement » car « beaucoup de Français sont trop pauvres pour prendre le train ». Le petit monsieur ne sait pas qu’il nie par ces mots la notion même du service public puisque celui-ci repose normalement sur l’égalité d’accès. En fait c’est encore fois de l’habillage de mesures décidées à Bruxelles que ces gens servent dévotement. La libéralisation du transport par autocars est cohérente avec le quatrième paquet ferroviaire voté fin 2013 au niveau européen. Il prévoit l’ouverture à la concurrence de toutes les lignes restantes d’ici 2023 au plus tard. Le récent rapport du député PS Philippe Duron sur les trains d’équilibre du territoire est une autre pièce de ce schéma global. Les propositions de suppression de certaines lignes de trains Intercités, ou de leur remplacement par des bus, visent à préparer l’ouverture à la concurrence. On supprime ce qui n’est pas rentable pour rendre la future mariée plus belle. Et tant pis pour les habitants et l’environnement. C’est tout. Tout cela fonctionne comme un dépeçage massif décidé par les maitres de la colonie que notre pays est devenu pour eux.

Evidement, ces privatisations qui surgissent toujours en fin de piste sont censées contenir des bonheurs innombrables. Notamment des baisses de prix. Tôt ou tard, le mensonge éclate. Ainsi quand les défenseurs de la concurrence nous vendent encore leur fausse monnaie. « Ça fera baisser les prix » nous ont-ils déjà dit il y a dix ans à propos du gaz et de l’électricité. Et quel est le bilan ? +49% pour les prix de l’électricité depuis 2007. +36% pour les prix du gaz ! Belle réussite ! Ce n’est pas moi qui le dis. C’est le très officiel médiateur de l’énergie dans son bilan annuel. La privatisation de GDF, l’ouverture du capital d’EDF à des capitaux privés et l’arrivée d’opérateurs privés concurrents n’ont pas amélioré la situation des usagers-consommateurs. C’est même l’inverse : ça coûte plus cher, ça marche moins bien ! Et on n’y comprend plus rien. C’est ce que dit le médiateur de l’énergie : « si la concurrence devait apporter une baisse des prix, celle-ci est loin d’être au rendez-vous, particulièrement pour l’électricité ». Et encore « pour les consommateurs qui ont franchi le pas (du changement de fournisseur), la satisfaction n’a pas toujours été au rendez-vous en termes de qualité de service ». Il faut dire qu’on marche sur la tête. Par exemple, grâce à cette merveilleuse libéralisation, EDF vend du gaz pour concurrencer GDF et GDF vend de l’électricité pour faire concurrence à EDF ! Bien sûr la droite est responsable de ces décisions. Mais le gouvernement Hollande-Valls marche dans la même direction. Il est en train de faire voter l’ouverture à la concurrence et la privatisation de la gestion des barrages hydroélectriques dans la loi de transition énergétique dans le cadre de la loi de transition énergétique.

Et la politique d’austérité produit aussi des dégâts considérables. Ainsi à l’hôpital public. Les coupes prévues par le gouvernement Valls sont de 3 milliards d’euros d’ici 2017. 860 millions d’euros de coupes sont en particulier prévues sur la masse salariale. Cela représente 22 000 suppressions d’emplois dans l’hôpital public dans les trois à venir ! C’est insupportable alors que les médecins, infirmiers et aides-soignants sont déjà en sous-effectif ! Pendant que j’écrivais ces lignes, je reçu un message de la ligne de front où je demandais des exemples à vous donner ici. « Je n’irai pas chercher loin ou longtemps pour te donner un exemple », dit la réponse. « Je te parle de moi ! Là je travaille 21 jours sans un seul jour de repos ! L’horreur ! 75 heures de travail par semaine parfois dans mon service. J’ai 11 patients en état de santé gravissime ! Et nous sommes en surcharge. J’ai deux à trois décès par semaines parfois en gériatrie. Comment prendre en charge les patients, les familles et… soi-même dans cette ambiance ? ». En ce moment, je suis conduit à fréquenter l’hôpital davantage que de coutume où je n’y suis jamais autrement que pour les luttes. Je vois. Comment ces personnels tiennent-ils encore debout ? Tout manque, tout est en surtension. Ainsi l’hôpital est-il méthodiquement détruit en comptant que l’exaspération des patients et des personnels facilitera la tâche. Tel est le gouvernement de Hollande !

Dans l’éducation, c’est le néant enveloppé dans des paroles de soie. Nicolas Sarkozy avait supprimé 80 000 postes d’enseignants. On se souvient que François Hollande avait promis d’en recréer 60 000. C’était déjà insuffisant pour reboucher les trous créés par la droite alors même que la population scolaire augmente. Mais, à la mi-mandat, seulement 3 856 postes de professeurs titulaires ont été créés ! On est donc très loin de la promesse. Le gouvernement se cache derrière les 28 000 stagiaires actuellement en formation et qui assurent un service partiel devant les élèves. Mais cela ne doit tromper personnes. Ce flux sera essentiellement absorbé pour remplacer les départs en retraites des titulaires. On sera donc très loin de 60 000 postes supplémentaires à la fin du mandat. Mais gouvernementaux et journalistes font ce qu’il faut pour embrouiller, enfumer et faire croire le contraire. Avant de psalmodier en cadence sur les « échecs du système scolaire ».

La lutte pour le service public est une lutte pour l’égalité républicaine partout sur le territoire et entre tous. Ce n’est pas seulement une lutte défensive. Bien sûr, nous voulons garder les services publics que nous avons. Mais nous voulons les améliorer. Et nous en voulons d’autres, par exemple pour l’accueil de la petite enfance, la prise en charge de la dépendance des personnes âgées, les soins de fin de vie choisie et ainsi de suite. Bon, ce sera le travail de l’Assemblée constituante de la 6e République que de mettre en place les mécanismes pour protéger les services publics et les biens publics. Et aussi pour démocratiser leur gestion en y associant les usagers. Et on peut penser qu’une majorité parlementaire de la révolution citoyenne pourrait aussi ouvrir des commissions d’enquête pour vérifier les conditions financières des privatisations, de leurs auteurs tant dans la politique que dans le monde du privé bénéficiaire de ces cessions de biens du pays. Rendez-vous l’an prochain à Guéret, de nouveau ! L’avenir éclate sous les yeux du présent !


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