La droite a conduit d’un même pas la mise en mouvement des idées et son renouveau partisan. Nous ne pouvons pas faire moins (éditorial de Regards, revue des communistes unitaires )

mercredi 14 octobre 2009.
 

Les leçons de la droite

Sous la ferme conduite de Nicolas Sarkozy, la droite s’organise et se réunit. Autour du vaisseau amiral UMP se range la flottille des petites embarcations. Les régionales en 2010 et la présidentielle de 2012 sont déjà lancées. La machine de guerre pour assommer l’adversaire est en piste. Créée par Jacques Chirac en 2002, l’UMP a désormais acquis une réelle consistance. Nicolas Sarkozy a réussi une synthèse entre les différentes traditions qui constituaient depuis deux siècles sa famille. Dans un alliage de modernisme et d’autoritarisme, avec une équation personnelle forte, la droite française opère une mue profonde. Le travail a été entrepris au lendemain de la hasardeuse dissolution de 1997. Déjà, Sarkozy à la manœuvre affirmait vouloir « décomplexer la droite » et décidait de la sortir de son enclavement réactionnaire et ringard. Tout y est passé : travail de projet, travail idéologique et culturel, réflexions sur la forme parti et ses relations avec la société… Pour ne citer que les initiatives récentes : écologie, territoire, Internet, discours contre la finance mais aussi ouvertures bien ciblées, transformation du parti et des formes de militance, non-cumul des mandats, diversité au gouvernement… Le très important aggiornamento est toujours en cours : on en mesure la redoutable efficacité.Regarder le camp d’en face aide à réfléchir. C’est le sens du dossier de ce numéro. L’UMP n’est pas devenue attractive par le seul fait d’unifier divers courants : le PS unit une diversité de points de vue mais, faute de débats et d’élaboration collective en son sein, il peine à faire de cette diversité un attrait et demeure divisé. La droite a retrouvé son attractivité grâce à un travail profond de refondation que la gauche n’a pas entrepris. 1997 a été le début du sursaut de la droite. 2002 n’a rien provoqué à gauche. Dans aucun parti. Nous le payons lourdement.

Selon nous, la droite ne gagne donc pas seulement par défaut de gauche. La gauche ne peut espérer l’emporter en attendant l’usure et le retour du balancier. Elle doit impérativement procéder à ce travail de remise en mouvement des idées, des militants, des partis. Pourtant, une partie de la gauche n’imagine pas d’autre alternative que de constituer une grande coalition anti-Sarkozy : du Modem aux communistes avec les Verts et le PS. Ce projet a aujourd’hui le vent en poupe. Il est le plus facile. Pour gagner, il suffirait de remettre un peu d’ordre dans les partis, dans les modes de désignation du candidat pour 2012, d’introduire quelques têtes neuves. Même ceux qui au PS font mine de résister à cette perspective n’opposent que de faibles arguments. Martine Aubry attend de savoir si Bayrou est de gauche… mais négocie déjà dans la région Nord-Pas-de-Calais pour des alliances avec le Modem.

Le PS a également le projet stratégique de réunir toute la gauche sous son toit. Cela a des allures de bon sens face à l’unification des droites. Certes, étendre à toute la gauche l’incapacité du PS à dégager une perspective laisse perplexe. Surtout cette idée relève d’une fausse lecture du mouvement de la droite : elle s’est réunie parce que la République est désormais acquise pour tous ces courants et que plus personne n’est gaulliste. Les différences politiques se sont éteintes. La gauche, elle, reste diverse ; sa réunification serait son carcan. Nous avons moins besoin d’ordre que d’invention et de dynamisme.

Partout en Europe, la social-démocratie est enlisée. Le communisme, essoufflé, ne s’est pas refondé. Toute la gauche a besoin de se renouveler en profondeur. Le défi est de taille : inventer une alternative au capitalisme mondialisé en temps de crise écologique et démocratique ! Nous avons la conviction que cette invention naîtra d’expérimentations en France et ailleurs ; qu’elle se nourrira de la nouvelle vitalité intellectuelle en philosophie, en droit, en économie. Cette perspective sera aussi le fruit de confrontations politiques entre des approches qui restent vivantes, celle de la redistribution au sein du système et celle d’une autre logique. Pour que cette confrontation ait lieu, il faut qu’existent tous les protagonistes. Hélas, l’autre gauche qui nous est chère, n’a pas encore de crédibilité. Elle doit travailler à son renouvellement tous azimuts autant qu’à sa propre existence politique. Cela passe sans doute par une relativisation des différences au bénéfice d’un travail commun et d’une construction politique moins éclatée. La droite a conduit d’un même pas la mise en mouvement des idées et son renouveau partisan. Nous ne pouvons pas faire moins.

C.T.

Paru dans Regards n° 65, octobre 2009


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