Fête des pères Même le père tyran de sa famille ? (exemple extrait de Norman Mailer sur l’enfance d’Hitler)

dimanche 15 juin 2008.
 

"Un château en forêt" (semi-fiction de Norman Mailer sur l’enfance d’Hitler) se lit avec plaisir. Nous ne faisons aucun lien entre le fascisme, phénomène politique et l’enfance d’Hitler. Nous mettons seulement en ligne cet extrait parce qu’il décrit très bien le comportement en famille d’un très grand nombre de pères durant des siècles. Quand on abordait ce sujet dans les années 68, on sentait à l’attention soudaine de la salle que l’on touchait là à un sujet à vif, tabou, décisif.

... A présent que Klara et les enfants l’avaient rejoint à Passau, Aloïs, le père, devint plus sévère avec sa progéniture. Alois Junior et Angela apprirent rapidement à ne pas lui parler, sauf s’il leur adressait une question directe. Sinon, ils n’étaient pas autorisés à troubler le cours de ses pensées. Si Alois Junior se trouvait hors de la maison, son père portait deux doigts à ses lèvres et le sifflait. Il procédait de la même façon pour appeler Luther le chien de la maison.

... Lorsqu’Alois rentrait, sa journée terminée, c’est à peine si les enfants osaient chuchoter. Klara, soucieuse de ne pas le déranger, ne disait rien, elle non plus. Le repas du soir se prenait en silence. L’haleine d’Alois qui sentait la viande et la bière amère se mêlait à l’odeur du chou rouge.

Après le dîner, il s’installait dans son fauteuil, choisissait une de ses pipes à longue tige, bourrait le fourreau de tabac avec toute l’autorité qui peut se concentrer dans le pouce d’un homme d’une telle importance puis entreprenait de saturer l’air ambiant de sa fumée. Alois Junior et Angela gagnaient leur chambre dès qu’on leur en avait donné la permission. Mais Adi (Adolf) était prié de rester.

Le père prenait dans sa main la tête du gamin de trois ans et, affichant un sourire ambigu, fait pour moitié d’affection, pour moitié de pure méchanceté, lui soufflait sa fumée au visage. L’enfant toussait. Le père riait.

Dès qu’Alois relâchait la tête d’Adolf, celui-ci sourait puis filait aux toilettes. Et là, il vomissait... Il ne cessait de se demander pourquoi sa mère ne se plaignait jamais de la fumée. Elle n’osait pas, sentant bien qu’un commentaire de sa part sur la pipe de son mari aurait été pour lui la pire des provocations.


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