Retraites : démarrer la deuxième semaine en grève, monter en puissance ! NPA

mercredi 11 décembre 2019.
 

Après le coup de semonce contre le gouvernement jeudi, la grève a continué de plus belle dans le secteur de la SNCF et à la RATP. Ailleurs, la reconduction a été bien plus faible mais l’essentiel est ailleurs.

En annonçant vendredi matin une nouvelle journée de grève et de mobilisation mardi, les directions syndicales ont, sous la pression du mouvement, posé un nouveau jalon pour la construction de la mobilisation contre les projets néfastes du pouvoir. Dans cet entre-deux, le week-end, s’il a permis à chacunE de reprendre des forces à la veille d’une semaine cruciale, a connu une mobilisation limitée, à part dans quelques villes.

Le rendez-vous qui n’a pas eu lieu

Des nécessités aux possibilités, il y a souvent un pas... Oui, la nécessité de la lutte contre Macron aurait exigé qu’hier samedi, en réplique à la journée mais de toute façon à une moindre échelle, manifestent ensemble militantEs du mouvement sur les retraites, en particulier issu des secteurs en grève reconductible, militantEs syndicaux ou politiques, salariéEs du privé plus difficilement engagé dans la grève, Gilets jaunes, etc. Mais cela a été très limité.

D’abord parce que les directions syndicales, en particulier confédérales, n’ont pas fait grand-chose pour. Si l’appel sorti vendredi matin à la journée de mardi est très positif pour le rythme du mouvement, la déclaration ne proposait rien concernant le week-end, en particulier pour le samedi devenu depuis un an une journée marquée par les « Actes » des Gilets jaunes. Dans ce cadre, les grévistes, syndiquéEs ou non, ne se sont pas emparés de ce premier samedi qui aurait pu être marqué des manifestations fréquentées et réunissant l’ensemble de notre camp social, salariéEs et familles du public comme du privé, etc.

Du côté des Gilets jaunes, le rassemblement avec les organisations syndicales peut quelquefois sembler difficile, toujours marqué dans certains secteurs par des formes de méfiance, voire de rejet. La réalité, c’est surtout que s’il continue à exister dans tout le pays des milliers de Gilets jaunes ou de personnes s’identifiant à ceux-ci, solidaires de leur lutte, il n’y a plus à proprement parler de « mouvement des Gilets jaunes » au sens global du terme.

Au final, si dans quelques endroits, des manifestations un tant soit peu significative ont pu avoir lieu (à Marseille, Bordeaux, Nantes…), il n’en est rien sur l’ensemble du territoire. À Paris en particulier, avec deux manifestations annoncées plusieurs jours à l’avance (ayant chacune leur légitimité, l’acte 56 des Gilets jaunes d’un côté, celle « traditionnelle » contre le chômage et la précarité de l’autre), les militantEs étaient dans l’embarras, et la tentative des Gilets jaunes parti plus tôt en manifestation de rejoindre celle à l’appel de la CGT s’est heurtée aux lacrymos des forces de répression.

Articuler les « temps forts » et la construction de grève reconductible

Du point de vue de la grève, la situation est marquée depuis jeudi, ce week-end compris, par la paralysie à la SNCF et à la RATP. Toujours aussi peu de trains circulent, idem au niveau parisien, et le pouvoir, relayé par les médias, s’en donne à cœur joie pour stigmatiser la grève qui bloque le pays, empêche les gens d’aller au travail ou les touristes de flâner… Bref… En dehors de ces secteurs, la grève a été faible vendredi. Dans l’Éducation nationale, le contraste était saisissant entre les écoles, quartiers ou zones mobilisées, avec des écoles fermées, et la plupart des endroits où la grève n’a pas dépassé jeudi 5… mais se rediscute fermement pour le 10.

L’enjeu de ce début de semaine est donc de dépasser cette situation et d’aider à ce que, en s’appuyant sur le mardi 10 et certainement le jeudi 12, la question de la reconduction se pose dans de nouveaux secteurs (comme les Finances publiques, la fonction publique territoriale…) ou s’approfondissent (comme dans l’Éducation nationale), peut-être en proposant un engagement dans la reconduction sur les trois journées (mardi-mercredi-jeudi). Dans le même temps, et cela peut être une aide pour construire la reconduction et entrainer, la question des liens interprofessionnels à construire, à approfondir, est à travailler, en rassemblant dans les AG autant faire ce peut des grévistes de différents secteurs, en allant sur les différents sites mobilisés, dans les services publics évidemment mais aussi aux portes des entreprises…

La question de l’extension de la grève ces prochains jours est cruciale : la dynamique du mouvement ne peut dépendre d’un ou deux secteurs très mobilisés, alors même que l’on sait que le gouvernement veut manœuvrer pour détacher par exemple l’UNSA (et donc de fait mettre un coup profond à la grève à la RATP) du front syndical. La meilleure garantie pour l’extension de la grève reste bien son approfondissement.

Un autre enjeu est la construction de liens interprofessionnels. Pas à pas, ces liens se construisent. Selon les endroits, il s’agit de réunion intersyndicales, d’AG interprofessionnelles de villes, ou de rencontres en secteurs qui débouchent sur des réunions plus larges. Ces liens donnent de l’énergie, montrent qu’on n’est pas isolé, permettent de s’adresser à de nouveaux secteurs et de discuter sur le fond.

Mener la lutte politique pour dégager Macron

Enfin, du point de vue du pouvoir, l’accélération de son calendrier depuis jeudi montre une certaine fébrilité du pouvoir. Jeudi, à l’aube de la première journée, tous les indicateurs sont au rouge pour lui, et le Premier ministre d’annoncer en urgence une présentation de son projet en milieu de semaine suivante. S’en suit une prise de parole non prévue d’Édouard Philippe vendredi, l’annonce d’un dernier round de discussion de Delevoye et Buzyn avec les « partenaires sociaux » lundi et donc une présentation de l’ensemble du projet mercredi, avec la remise de celui-ci au CESE. Bref pas très serein tout cela !

Pour autant, ce gouvernement reste droit dans ses bottes, se dit « déterminé », blablabla… et qu’il n’est pas question de retirer son projet : tout au plus, il se dit prêt à négocier la date de la réforme des régimes spéciaux, mais ne remet de toute façon rien en cause sur le fond. Le bras de fer a démarré et Macron l’assume complètement, en héraut des classes dirigeantes.

De notre côté, le lien est facile à faire entre cette nouvelle offensive sur les retraites, ce discours d’austérité autour des 14 % du PIB, et ces fortunes accumulées, ces profits qui explosent. Le projet de Macron sur les retraites est bien à l’image de la société qu’il souhaite construire : la fin des solidarités, la mise en concurrence généralisée (la division entre salariéEs utilisée aujourd’hui pour défendre la prétendue « universalité » de son projet…), un mince filet social à un bout de la société, les cadeaux fiscaux de l’autre… Dans ce cadre, le sentiment que Macron doit remballer toute sa politique et doit dégager fait son chemin. C’est l’ultime enjeu d’un mouvement qui doit se renforcer cette semaine, dans le sens d’une grève générale portée par une saine colère contre tout un système.

Manu Bichindaritz  :


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