Aux Etats-Unis, des centaines de manifestations pour le droit à l’avortement

jeudi 27 juin 2019.
 

Des milliers de femmes ont participé à plusieurs centaines de manifestations aux USA ce 21 mai pour le droit à l’avortement et contre le mouvement de droite radicale qui cherche à le rendre illégal.

Sous l’enseigne de #StopTheBans, les participant·e·s, majoritairement des femmes, portaient des panneaux roses et violets avec le slogan « Gardons un avortement légal et sûr ou Mon corps, mon choix ». À Chicago, nombre de femmes ont défilé avec des robes rouges faisant référence à La servante écarlate, récit dystopique d’oppression patriarcale, sexuelle et reproductive, et de rébellion féminine.

L’avortement est légal aux USA depuis la décision de la Cour suprême Roe vs Wade (1973) stipulant que l’avortement est protégé par le droit constitutionnel à la vie privée moyennant la prise en compte de la santé des femmes et de la vie prénatale. Mais en 1976 le Congrès a voté l’amendement Hyde proscrivant tout financement fédéral de l’avortement. Néanmoins, 17 États ont pu utiliser leurs propres fonds de santé (Medicaid) pour des avortements médicalement nécessaires. Ce sont 20% des avortements qui sont depuis remboursés. Pendant ces années, les femmes, à gauche, ont revendiqué un avortement libre et gratuit sans gagner un soutien massif.

S’il y a eu des restrictions rampantes dès 1973, ces derniers mois, huit États dominés par les républicains (Alabama, Géorgie, Kentucky, Mississippi, Missouri, Arkansas, Ohio et Utah) ont imposé de nouvelles régressions sévères. Une douzaine d’autres États vont suivre le pas. En Alabama, la loi interdit l’avortement, même en cas de viol ou d’inceste, seule l’atteinte grave à la santé ou à la vie de la mère permet une dérogation. La dernière clinique du Missouri pratiquant l’avortement est menacée de fermeture, ce qui forcerait 1,25 million de femmes à quitter l’État pour avorter. Les législateurs républicains visent à utiliser les nouvelles lois restrictives des États pour mener un nouveau cas-test à la Cour suprême où 5 des 9 juges sont hostiles à l’avortement.

Le contexte politique

Le mouvement dit pour le « droit la vie », impulsé par les églises catholique et évangéliques, est très présent dans de nombreux États, surtout du Sud et du Midwest. Les médias à droite comme Fox News et les grandes radios soutiennent depuis des lustres ce mouvement, composante d’un courant de droite large et bien financé.

Des piquets d’activist·e·s anti-avortement, clamant que c’est un meurtre et muni·e·s de photos de fétus avortés, harassent sans cesse les cliniques. Des extrémistes du « droit à la vie », catégorisé·e·s par le Département de la justice comme des terroristes, ont tué dix membres du personnel de ces cliniques dans les années 1990, alors que des femmes progressistes organisaient des manifs en défense des cliniques.

Aujourd’hui, environ 50% des Étatsunien·e·s se déclarent « pro-choix » alors que 40% se disent « pro-vie ».Divers facteurs ont mené au clash actuel sur l’avortement. Deux générations de femmes ont grandi en considérant leurs droits en la matière comme acquis, dans une période quasi dépourvue de mouvements des femmes. Pendant ce temps, le parti républicain, avec le « droit à la vie » dans son programme, conquérait les parlements des États où il contrôle désormais les deux chambres dans 32 États, contre 14 pour les démocrates. Et, si le parti démocrate a généralement soutenu le droit à l’avortement, certain·e·s comme le gouverneur de Louisiane, Edwards, ont basculé dans l’autre camp.

Les femmes mènent le combat pour le droit à l’avortement

Les femmes, investies personnellement dans ce combat, ont pris la tête de la lutte pour ce droit. Des institutions féministes progressistes ont été à l’avant-garde. À la pointe, Planned Parenthood, fondé en 1921, administre 600 cliniques de santé reproductive et accueille 2,5 millions de patient·e·s chaque année, informant sur la contraception et pratiquant 324 000 avortements par an. À ses côtés, NARAL, fondé en 1969 pour lutter pour les droits reproductifs des femmes et l’ACLU, défendant le droit à la vie privée, parmi d’autres libertés publiques. La Marche des femmes, créée pour protester contre la présidence Trump en 2017, a aussi rejoint ce combat.

Des jeunes femmes se joignent au mouvement aujourd’hui, certaines venant de campus universitaires où on voit un intérêt croissant pour le féminisme comme pour le socialisme. Les Democratic Socialists of America, et ses 50 000 membres se sont mobilisés pour défendre le droit à l’avortement. On voit des vétéran·e·s des années 1970, des défenseurs·euses de cliniques des années 90 et de nouvelles jeunes femmes activistes, se regrouper pour travailler à un mouvement pour le droit à l’avortement qui doit s’étendre et se renforcer.

Dan La Botz


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