Macron : La face cachée du pouvoir absolu

jeudi 2 août 2018.
 

On avait coutume d’appeler le locataire de la Place Beauvau l’homme le mieux informé de France. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Nicolas Sarkozy avait décidé d’entamer sa conquête de l’Élysée depuis cette place forte, qui lui conférait un avantage sur ses concurrents. Avec Gérard Collomb à sa tête, désormais, le ministère de l’Intérieur est l’endroit le moins connecté du pays, l’une des dernières « zones blanches » de la République. Son occupant y vit à l’abri des bruits du monde, en particulier ceux qui touchent de près ou de loin aux responsabilités publiques dont il a la charge.

Benalla, qu’il a croisé au PC de la police, le 1er Mai ? « Je ne le connaissais pas. » Sa fonction, ce soir-là ? « Je n’en savais strictement rien. » Son vrai métier ? « J’ignorais sa qualité. » Les autres faits reprochés au garde du corps du chef de l’État  ? « Jamais entendu parler. » Par conséquent, ne sachant rien, le ministre a préféré en faire le moins possible. Remonter les faits dont il a eu connaissance dès le 2 mai au procureur ? « Ce n’est pas au ministre de le faire. » Évoquer l’affaire avec le président ? Non plus, car Emmanuel Macron se serait montré davantage « préoccupé de la réforme constitutionnelle »… Circulez, il n’y a rien à voir, a semblé dire Gérard Collomb aux députés qui l’ont auditionné hier sous serment. L’histoire dira peut-être s’il a respecté ce dernier, tant ses dénégations semblent irréelles.

En attendant, une ligne de défense se dégage : l’exécutif va nier en bloc sa responsabilité et dévier les regards vers des lampistes. Une attitude méprisable, qui éclaire la face cachée du pouvoir absolu qu’Emmanuel Macron espérait s’octroyer, avant que ne s’enlise pour le bien public sa révision constitutionnelle. En ayant raison sur ce point de l’entêtement de l’exécutif, les oppositions à l’Assemblée nationale ont montré combien l’équilibre des pouvoirs est un bien précieux à conquérir et à promouvoir. Puisse cette crise renforcer le rôle indispensable du Parlement, en levant désormais les obstacles à l’audition du principal intéressé  : Emmanuel Macron.

Sébastien Crépel, L’Humanité


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