Parcoursup : fiasco informatique et sélection sociale

dimanche 3 juin 2018.
 

1) Parcoursup : le 26 mai, arrêtons les incapables (Parti de Gauche)

Alors que de toute part l’alerte était sonnée, le chaos est là. 400 000 lycéen.ne.s sont sans proposition d’affectation dans le supérieur et plongé.e.s, au moment où s’ouvre la période de révision du baccalauréat, dans l’inquiétude.

Le gouvernement a échoué à prendre en charge le devenir de la jeunesse du pays. Il a organisé le tri social et territorial entre les élèves. La ministre, Frédéric Vidal, qui prétendait qu’aucun lycéen ne recevrait de « non », a menti à leurs familles.

Rien ne saurait empêcher les aspirations de centaines de milliers de jeunes de pouvoir se concrétiser dans la liberté de choisir ses études.

Le Parti de Gauche appelle les lycéen.ne.s, leurs familles et leurs enseignants à prendre part aux marées populaires, partout en France, samedi 26 mai, pour mettre en échec la politique de sélection à l’université.

2) La FSU dénonce le fiasco de Parcoursup : 400 000 lycéen·ne·s mis dans l’angoisse juste avant le bac !

Les premiers chiffres sont vertigineux : selon la ministre, 400 000 lycéen.ne.s sont "en attente" ou “refusé.e.s” sur l’ensemble de leurs vœux (soit 50% des inscrits).

La FSU constate avec affliction que ces premiers chiffres dépassent les analyses les plus pessimistes quant à l’usage de la plate-forme "Parcoursup" pour affecter les bacheliers .

Depuis des mois, la FSU a dénoncé la méthode choisie par le gouvernement qui institutionnalise une forme de tri social des bacheliers pour leur inscription en premier cycle universitaire.

Plus de la moitié des futurs bacheliers reçoivent un premier signal décourageant à quelques jours du baccalauréat. C’est inacceptable !

Le gouvernement a fait le choix de refuser d’entendre l’expression de la jeunesse à accéder à une formation et un diplôme de l’enseignement supérieur. Depuis des mois, un mouvement social conteste les fondements de la politique de sélection à l’entrée de l’université. Le gouvernement s’enferme dans le déni et choisit la répression comme seule réponse.

La FSU exige que tous les lycéens lauréats du baccalauréat puissent choisir leurs études. Ce qui nécessite :

un renforcement de l’orientation scolaire comme mission de l’éducation nationale et un renoncement du transfert de cette mission aux régions et aux opérateurs privés,

une augmentation des moyens dans l’enseignement supérieur pour accroître le nombre de place afin d’accueillir toutes les bachelières et tous les bacheliers qui le souhaitent dans de bonnes conditions d’encadrement et d’études.

Pour la FSU, l’avenir des jeunes ne peut se réduire à des visions de court terme, et certainement pas à une logique de tri.

La FSU exige que les MEN et MESRI ouvrent sans tarder des négociations pour construire une autre politique pour l’enseignement supérieur et un système d’affectation national, transparent, juste et respectueux des aspirations des lycéennes et des lycéens.

3) Université. Parcoursup lève le voile sur sa mécanique de tri social

La publication de l’algorithme s’est faite sous la pression de la Cnil, qui contraint les autorités à se mettre en règle avec leurs obligations légales de transparence. Jeanne Franck/Item pour Les Jours La publication de l’algorithme s’est faite sous la pression de la Cnil, qui contraint les autorités à se mettre en règle avec leurs obligations légales de transparence. Jeanne Franck/Item pour Les Jours

Le gouvernement a dévoilé lundi l’algorithme qui régit la plateforme. Cette publication confirme l’injustice qui sous-tend le nouveau dispositif d’orientation et ne suffira sans doute pas à le préserver de futurs recours en justice.

Une usine à gaz, une Moulinette, un hachoir, une loterie… Les images ne manquent pas pour décrire la plateforme Parcoursup, qui a commencé à rendre son verdict hier soir. Un verdict attendu par quelque 810 000 jeunes et leurs familles, qui ont déposé depuis janvier pas moins de 7 millions de vœux dans ce dispositif opaque, duquel dépend pourtant leur avenir. Opaque  ? Que nenni, répond le gouvernement, qui a rendu public lundi, à la veille du jour J, le fameux algorithme (le programme informatique) censé donner à tous les futurs bacheliers leur juste place dans l’enseignement supérieur.

Une publication faite sous la pression de la Cnil (Commission nationale de l’informatique et des libertés), qui met enfin les autorités en règle avec leurs obligations légales de transparence. Du moins en partie, puisque lors du vote, à l’Assemblée nationale, de la loi sur la protection des données personnelles, le gouvernement a exigé que les établissements d’enseignement supérieur n’aient pas à révéler les dispositifs complémentaires mis en œuvre pour procéder au tri des candidats, abritant cette partie essentielle du dispositif sous le masque du secret de la délibération des jurys d’examen. L’algorithme de Parcoursup est inopérant

Ceux qui se sont plongés dans les méandres du système ainsi révélés y ont tout de même relevé quelques lièvres. Les plus notables sont la découverte que la plateforme reclasse, de sa propre initiative (si l’on peut employer cette formule s’agissant d’un programme informatique), les listes de candidats envoyées par les établissements. Elle pondère en fait ce classement «  pédagogique  » en fonction de deux critères  : le nombre de boursiers (qui auraient donc plus de chance d’être «  remontés  » au classement si leur effectif est jugé insuffisant), et celui de «  non-résidents  » dans l’académie de l’établissement concerné. Si le système juge ces derniers trop nombreux dans le classement «  pédagogique  », il n’hésitera pas à les rétrograder. Il intervient en outre pour aider les établissements à déterminer le nombre de bacheliers qui seront placés sur liste d’attente, ou pour gérer la difficile problématique des admissions dans les internats.

Mais l’essentiel est ailleurs. Étudiants et professeurs en lutte l’ont dénoncé avec force, faits à l’appui  : l’algorithme de Parcoursup est inopérant pour classer l’afflux des demandes arrivées dans les établissements. Ceux-ci ont donc ajouté leurs propres critères, et parfois leurs propres algorithmes, pour permettre aux commissions d’examen – censées classer chacun des 7 millions de vœux – de mener à bien leur tâche. C’est cette partie que le gouvernement a refusé de dévoiler. Non sans prendre un sérieux risque juridique, comme l’a expliqué mardi Yves Macchi, professeur d’espagnol à l’université de Lille, lors d’une conférence de presse organisée par le Collectif pour l’égalité d’accès à l’université  : «  Les décisions des commissions d’examen des vœux seraient couvertes par le secret des délibérations. Mais un vrai jury ne dissimule pas ses critères de décision  ! Pour les candidats, c’est comme passer un concours sans connaître les épreuves ni leurs coefficients…  » Selon lui, la dissimulation des algorithmes locaux contrevient, à la fois, à la loi sur la «  République numérique  », applicable en octobre prochain, et au règlement général sur la protection des données, issu d’une directive européenne, applicable… dans deux jours.

Ce n’est pas tout. Étudiants et enseignants en lutte ont depuis des semaines dénoncé la mécanique de tri social, au détriment des classes populaires, qui constitue le cœur même de Parcoursup. Ce que l’on sait des critères retenus par certaines formations pour classer les vœux des candidats le confirme  : prise en compte du classement du lycée d’origine, des cursus «  européens  », des activités extrascolaires… sont autant de choix socialement discriminants qui risquent d’écarter les élèves les moins favorisés des cursus de leur choix.

Au final, la grande variabilité des critères retenus ou non par les filières pour classer les vœux aboutit à un résultat prévisible  : une même candidature, déposée pour une même formation dans plusieurs établissements différents, a toutes les chances de s’attirer des réponses… différentes. «  Arbitraire, injustice et opacité conduisent à une rupture de l’égalité républicaine  », conclut gravement Yves Macchi.

Olivier Chartrain, L’Humanité


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message