Afrique : La France doit cesser son soutien aux dictateurs

dimanche 30 avril 2017.
 

Le prochain président aura la lourde tâche de trouver la boussole française, de rompre avec des pratiques éculées, qui condamnent les peuples africains à la souffrance et à la désolation et qui nous mènent vers des drames que l’on pourrait pourtant éviter.

Cette question doit s’«  incruster  » dans le débat présidentiel. Trop c’est trop  ! Il est facile de s’insurger quand des voix s’élèvent pour qualifier la colonisation de «  crime contre l’humanité  ». Il est facile de laisser prospérer toutes sortes d’idées nauséabondes pour se servir de l’immigration comme cause de tous les maux de notre société.

Il est facile de parler de roman national, en se fondant sur un passé glorieux, qui occulte toutes les périodes sombres où la France, notre France, n’a pas été à la hauteur. Que devient notre diplomatie  ? Son utilité se limiterait donc à proposer le statu quo, bien que ce dernier perdure au détriment des aspirations des peuples  ? Dénoncer les manques, les dérives des postures officielles et officieuses de la France n’est pas de l’autoflagellation. C’est même salutaire pour que l’on puisse redresser la barre. Ali Bongo a ordonné des centaines d’arrestations arbitraires et l’attaque militaire du QG de son adversaire ainsi que des rafles dans les rues des grandes villes gabonaises. Il a causé la mort de dizaines de jeunes Gabonais pour imposer par le feu et le sang son élection frauduleuse. Ce dernier se sert donc encore de cette relation incestueuse avec la France pour se protéger des éventuelles sanctions individuelles préconisées par le Parlement européen  ! La stabilité, la paix sont directement menacées par ces dictateurs persuadés d’être présidents de droit divin, avec le pouvoir de vie et de mort sur les citoyens. Comment la France pourrait-elle continuer de donner des leçons de démocratie tout en servant la soupe aux dictateurs sanguinaires  ? Les peuples sont dans la pénombre, ils regardent vers la lumière, vers la France révolutionnaire, notre pays libre pour lequel leurs aïeux ont tant donné, y compris la vie pendant les grandes guerres.

La France, porteuse d’une histoire, porteuse de valeurs universelles, doit retrouver ce chemin qui a fait sa grandeur. Cela passe par une mise à jour de son logiciel diplomatique. Ayons la lucidité de dire qu’aucun intérêt ne peut être préservé si les droits humains ne sont pas respectés, si les aspirations des peuples sont battues en brèche par les fossoyeurs de la démocratie. Sachons dire stop  ! La nouvelle génération sait comment dire non avec cohérence et détermination en assumant son rôle. C’est le sens de l’histoire, en France, en Afrique et partout ailleurs. Pourquoi les pratiques démocratiques et l’État de droit contournent toujours les anciennes colonies françaises  ?

Impulsons une diplomatie du XXIe siècle, portée par nos valeurs et non par l’inertie, à l’instar de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), qui a observé une élection (au Gabon) et constaté comme tout le monde les violations de la démocratie et des droits de l’homme, sans proposer de rapport. Stop  ! Posons des actes forts, soyons fiers de notre France et prouvons-le en impulsant ce nouveau modèle.

Yannick W. J. Nambo, auteur, cofondateur de Diplo21.

Tribune parue dans l’Humanité


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