Benoît Hamon poussé par son camp à tendre la main droite

samedi 11 mars 2017.
 

Après l’accord entre le PS et Yannick Jadot, voté par les seuls écologistes, l’aile droite du PS redouble d’attaques à l’encontre du candidat, dont la ligne «  gauchiste  » pourrait, selon elle, souffler dans les voiles d’Emmanuel Macron.

Manuel Valls est sorti d’un silence qui durait depuis un mois. Par souci, comprenons-le bien, de venir en aide au soldat Hamon. Après les attaques à répétition à l’encontre du candidat PS désigné par la primaire fin janvier, l’ex-premier ministre a réuni ses troupes, à deux reprises, mardi. « Inquiet », il les aurait appelées à « rester ensemble » autour du candidat PS, à l’écart des sirènes macronistes. Moins diplomate en aparté, si l’on en croit le Canard enchaîné, le discours se rapproche de celui de ses comparses de l’aile droite. Il parie sur un score « en dessous des 10 % », évoque un candidat qui a « rompu avec la ligne réformiste du PS », et raille son « programme écolo-gauchiste » et sa « reprise des revendications de tous les zadistes du monde ».

Argument d’un second tour Macron-Le Pen à l’appui, son but est de faire pression sur le candidat pour qu’il penche à droite. Huit membres du « pôle des réformateurs », soit l’aile droite du PS, ont même demandé mardi à Jean-Christophe Cambadélis « une consultation urgente des militants et des instances » suite à l’accord passé avec EELV. C’est qu’ils s’inquiètent, disent-ils en chœur, des ralliements de socialistes à Macron. René Dosière, député PS de l’Aisne, disait hier ne pas vouloir voter pour Hamon, ayant « défendu les lois qu’il veut remettre en cause et qu’il a combattues ».

« On ne va pas faire une primaire tous les deux mois »

L’élu laisse entendre qu’il pourrait offrir son parrainage au candidat d’En marche ! « Il y en a qui sont tentés de rallier Macron tout de suite, d’autres plus tard… Pour ma part, j’attends la présentation du programme », prévue aujourd’hui, avançait, mardi, le député Gilles Savary, qui avait invoqué un « droit de retrait » fin janvier après la victoire d’Hamon, avec son comparse Christophe Caresche, qui, lui, a déjà franchi le pas. « Laisser partir des centaines de milliers de Français vers Macron est incompréhensible », lâche Philippe Doucet, proche de Valls, qui parle de la « logique sectaire » d’Hamon. La secrétaire d’État Juliette Méadel, elle aussi vallsiste, tire la sonnette d’alarme : « Il faut qu’on ait un candidat capable de rassembler la gauche réformiste. Il est urgent d’infléchir son programme. » Mais la charge la plus violente est venue, mardi, d’un autre membre du gouvernement, Jean-Marie Le Guen, qui évoque un accord EELV-PS « en rupture avec (la) famille politique » du PS. « C’est un programme de gauche radicalisée », a-t-il lâché sur RTL, refusant de donner, comme « des dizaines de parlementaires socialistes », son parrainage à un candidat pris dans une « impasse ».

L’« impasse » était prévisible à l’issue même du scrutin du 29 janvier. Benoît Hamon avait pour mission de rassembler son camp sans renier le rejet de la ligne sociale-libérale du quinquennat Hollande sur lequel il s’est basé pour être élu. Du côté de ses fidèles, réunis autour de lui mardi après-midi, l’offensive ouverte par les vallsistes provoque une défense qui l’est tout autant. Annick Lepetit, porte-parole des députés PS, raille ceux qui « reprochaient aux frondeurs d’être frondeurs » et qui « aujourd’hui ne veulent pas soutenir le candidat du PS ». Aurélie Filippetti, désormais dans l’équipe d’Hamon, parle « des mauvais coucheurs qui ne digèrent pas la défaite à la primaire ». Le frondeur Pascal Cherki reproche, quant à lui, le procès en légitimité mené par le camp vaincu : « Benoît Hamon l’a emporté avec près de 60 % des voix. On ne va pas faire une primaire tous les deux mois. Il y a une seule chose qu’on ne peut pas nous demander, c’est de renoncer à notre orientation, parce que c’est un contrat moral et politique que nous avons pris devant les Français. » Et Alexis Bachelay, porte-parole de Benoît Hamon, d’ajouter que, « quand Le Guen tacle, ou même prend de haut notre candidat, c’est un manque de respect pour ceux qui ont voté », et même une « forme de trahison » de la part d’un membre du gouvernement qui, pour lui, « n’a plus sa place au PS ». Jérôme Guedj, autre porte-parole du député des Yvelines, y va de son conseil personnel : que Le Guen ait « le courage de rejoindre directement Macron ».

Audrey Loussouarn, L’Humanité


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