Déclaration commune des organisations syndicales de France sur la situation en Turquie

jeudi 1er décembre 2016.
 

Les nouvelles qui nous parviennent de Turquie sont de plus en plus alarmantes.

Depuis la tentative de coup d’Etat avortée du 15 juillet dernier, l’état d’urgence est instauré dans tout le pays. Le pouvoir gouverne par décrets-lois sans recours possible.

Sous prétexte de punir le réseau des responsables, qualifiés de terroristes, ainsi que toute personne supposée avoir des liens avec le terrorisme, 111.000 personnes ont été limogées ou suspendues par décrets, dont 48.500 dans l’enseignement et les universités, 34.000 des ministères de la santé, de la justice et de l’intérieur, 22.000 dans la police.

Les médias sont une cible importante : 170 ont été fermés, 777 cartes de presse confisquées, 2500 journalistes licenciés, 105 journalistes mis en prison, portant à 142 le nombre de journalistes détenus.

Après cette première vague d’arrestations (plus de 36.000) et de licenciements, la première semaine de novembre a donné lieu à une véritable escalade de la répression tous azimuts, l’arbitraire étant devenu une règle.

Le 29 octobre, jour anniversaire de la République, les autorités limogeaient plus de 10.000 fonctionnaires supplémentaires, annonçaient la fermeture de 15 autres médias et la limitation des droits des avocats. Désormais, les recteurs d’université ne seront pas élus, mais choisis par le président de la République.

Le 31 octobre à l’aube, la police turque faisait une descente aux domiciles de plusieurs journalistes du quotidien d’opposition Cumhuriyet, « La République », et arrêtait neuf d’entre eux.

Le 1er novembre, était nommé un administrateur pour diriger la principale ville du sud-est à majorité kurde de la Turquie, Diyarbakir, dont les co-maires, accusés d’activités terroristes, avaient été placés en détention deux jours auparavant. Une vingtaine de mairies de la région avaient subi le même sort en septembre.

Le 4 novembre, les co-présidents et plusieurs députés du Parti démocratique des peuples (HDP), ont été placés en détention préventive. Le HDP est le troisième parti à l’Assemblée nationale, ayant obtenu 13 % des voix, soit 6 millions de votes, aux élections de juin 2015.

Les autorités bafouent sciemment la Constitution en vigueur, se livrant à une entreprise de musellement de toute opposition. L’Etat de droit est en train de disparaître, au profit de l’instauration de ce qu’il faut appeler par son nom, une dictature.

Aucun critère ne peut justifier ces purges collectives qui ne sont fondées sur aucune preuve d’acte répréhensible.

Face à cette situation d’une extrême gravité, nous soutenons l’action des syndicats qui exigent la réintégration immédiate de tous les salariés licenciés ou suspendus.

Nous sommes entièrement solidaires des travailleurs de Turquie et de leurs syndicats en ces moments difficiles où sont violemment enfreints leurs libertés et droits syndicaux.

Nous appelons les autorités françaises et les instances de l’Union européenne à agir résolument afin que la Turquie respecte notamment la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales dont elle est signataire.

CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT, FO, FSU, Solidaires et UNSA

Courrier à l’ambassadeur de Turquie en France

Paris, le 23 novembre 2016

à Monsieur Ismail Hakki Musa Ambassadeur de Turquie à Paris

Ambassade de Turquie 16, avenue de Lamballe 75016 Paris

Monsieur l’Ambassadeur,

Les organisations syndicales françaises CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT, FO, FSU, Solidaires et UNSA suivent avec beaucoup d’inquiétude les dernières évolutions de la situation en Turquie.

Depuis la tentative de coup d’Etat du 15 juillet de cette année et l’instauration de l’état d’urgence, les nouvelles qui nous parviennent de Turquie sont alarmantes. En réponse à la tentative avortée, les autorités turques ont limogé ou suspendu plus de 111.000 fonctionnaires par décret, plus de 36.000 personnes ont été arrêtées. La presse et les médias ont été pris pour cible avec la fermeture de plus de 170 médias et la confiscation de près de 777 cartes de presse. Aujourd’hui, 142 journalistes sont détenus dans les prisons turques. Au début de ce mois, 11 députés de l’opposition ont été arrêtés et plusieurs élus locaux mis en détention.

Les organisations syndicales françaises CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT, FO, FSU, Solidaires et UNSA condamnent avec force ces atteintes graves et répétées à la liberté d’expression et aux droits humains.

Les organisations syndicales françaises, comme leurs homologues turcs, ont fermement désapprouvé la tentative de coup d’Etat, dont seuls les responsables devront en répondre, devant une justice indépendante. Elle ne devrait en aucun cas servir de prétexte pour organiser une chasse aux sorcières visant à museler l’opposition.

Les dérives autoritaristes en cours du pouvoir en place contreviennent à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, dont votre pays est signataire.

Nous appelons la Turquie au respect de cette Convention du Conseil de l’Europe, pour le règne du droit et de la justice, des valeurs et des principes démocratiques.

Nous vous prions de croire, Monsieur l’Ambassadeur, en l’assurance de notre respectueuse considération.

Pour la CFDT - Laurent Berger, Secrétaire général

Pour la CFE-CGC - François Hommerile, Président

Pour la CFTC - Philippe Louis, Président

Pour la CGT - Philippe Martinez, Secrétaire général

Pour FO - Jean-Claude Mailly, Secrétaire général

Pour FSU - Bernadette Groison, Secrétaire générale

Pour Solidaires - Cécile Gondard-Lalane et Eric Beynel, Co-délégué-e-s généraux

Pour l’UNSA - Luc Bérille, Secrétaire général

Copie à Monsieur Jean-Marc Ayrault, Ministre des affaires étrangères.

Courrier au ministre français des Affaires étrangères

Paris, le 23 novembre 2016

Monsieur Jean-Marc Ayrault Ministre des Affaires étrangères 37 Quai d’Orsay 75007 Paris

En octobre dernier vous avez effectué une mission officielle en Turquie. Les nouvelles qui nous parviennent de ce pays sont de plus en plus alarmantes.

Depuis la tentative de coup d’Etat avortée du 15 juillet dernier, l’état d’urgence (que votre homologue turc a qualifié de similaire à celui en vigueur en France) est instauré dans tout le pays.

Mais, sous prétexte de punir le réseau des responsables, assimilés à des terroristes, ainsi que toute personne supposée avoir des liens avec le terrorisme, 111.000 personnes ont été limogées ou suspendues par décrets, dont 48.500 dans l’enseignement et les universités, 34.000 des ministères de la santé, de la justice et de l’intérieur, 22.000 dans la police.

Les médias sont aussi une cible importante : 170 ont été fermés, 777 cartes de presse confisquées, 2500 journalistes licenciés, 105 journalistes mis en prison, portant à 142 le nombre de journalistes détenus.

Après cette première vague d’arrestations (plus de 36.000) et de licenciements, la première semaine de novembre a donné lieu à une véritable escalade de la répression tous azimuts, l’arbitraire étant devenu une règle.

Le 29 octobre, jour anniversaire de la République, les autorités limogeaient plus de 10.000 fonctionnaires supplémentaires, annonçaient la fermeture de 15 autres médias et la limitation des droits des avocats. Désormais, les recteurs d’université ne seront pas élus, mais choisis par le président de la République.

Le 31 octobre à l’aube, la police turque faisait une descente aux domiciles de plusieurs journalistes du quotidien d’opposition Cumhuriyet, « La République », et arrêtait neuf d’entre eux.

Le 1er novembre, était nommé un administrateur pour diriger la principale ville du sud-est à majorité kurde de la Turquie, Diyarbakir, dont les co-maires, accusés d’activités terroristes, avaient été placés en détention deux jours auparavant. Une vingtaine de mairies de la région avaient subi le même sort en septembre.

Le 4 novembre, les co-présidents et plusieurs députés du Parti démocratique des peuples (HDP), ont été placés en détention préventive. Le HDP est le troisième parti à l’Assemblée nationale, ayant obtenu 13 % des voix, soit 6 millions de votes, aux élections de juin 2015.

Les autorités bafouent sciemment la Constitution en vigueur, se livrant à une entreprise de musellement de toute opposition. L’Etat de droit est en train de disparaître, au profit de l’instauration de ce qu’il faut appeler par son nom, une dictature.

Aucun critère ne peut justifier ces purges collectives qui ne sont fondées sur aucune preuve d’acte répréhensible.

Vous n’êtes pas sans savoir que ces atteintes graves et répétées contreviennent aux dispositions de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales dont la Turquie est pourtant signataire.

Nous vous appelons à agir par tous les moyens pour le respect de cette Convention en Turquie, pour le règne du droit et de la justice, des valeurs et des principes démocratiques.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de nos sentiments les plus distingués.

Pour la CFDT - Laurent Berger, Secrétaire général

Pour la CFE-CGC - François Hommerile, Président

Pour la CFTC - Philippe Louis, Président

Pour la CGT - Philippe Martinez, Secrétaire général

Pour FO - Jean-Claude Mailly, Secrétaire général

Pour FSU - Bernadette Groison, Secrétaire générale

Pour Solidaires - Cécile Gondard-Lalane et Eric Beynel, Co-délégué-e-s généraux

Pour l’UNSA - Luc Bérille, Secrétaire général


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