En 2017, comme je l’ai fait en 2012, je voterai pour Jean-Luc Mélenchon (Maxime VIVAS)

dimanche 28 février 2016.
 

Chacun ici dira ce qu’il veut, à sa guise et dans le respect des autres contributeurs. Je vais user de ce droit pour rapporter ce que j’ai vu, ce que je sais, ce que je crois et ce que je ferai aux élections présidentielles de 2017. Je m’adresse ici surtout à ceux qui, aux présidentielles, ont souvent voté communiste (même pour Robert Hue !), ou socialiste (au moins au second tour), parfois pour les « Verts », ou pour LO, ou pour le NPA, voire, une fois (inoubliable !) pour Chirac.

Jean-Luc Mélenchon ?

Je l’ai vu, alors qu’il était sénateur socialiste, mener le combat contre un projet de motion ignominieuse que l’UE a fini par voter contre Hugo Chavez, grand démocrate s’il en fut, révolutionnaire et qualifié de « dictateur », de « caudillo » par l’essentiel de la classe médiatico-politique européenne qui en avait convaincu l’opinion (vous aussi ? Un peu ?).

Je l’ai vu, lui, dix fois refuser de clouer Cuba au pilori quand d’autres, se prétendant plus à gauche que lui, lâchaient l’île assiégée par la plus grande puissance militaire que le monde ait jamais connu.

Je l’ai entendu, en 2008, invitant Elkabbach à lire mon livre sur Reporters sans frontières pour que tombe le masque de Robert Ménard, alors intouchable à gauche et à droite et désormais maire FN de Béziers.

Je l’ai entendu dire ce qui devait être dit sur l’imposteur dangereux qu’est le dalaï lama, tout entier arc-bouté sur son projet de rétablir une théocratie moyenâgeuse dans une région chinoise grande comme cinq fois la France.

Je l’ai entendu dire aussi que la Chine et la Russie n’étaient pas des pays ennemis de la France et qu’il fallait discuter avec eux dans un respect mutuel.

Je l’ai entendu dire que l’immigration était une chance pour le pays.

Je l’ai vu mener mille autres combats dont la plupart le desservaient électoralement, mais qui sauvent l’honneur de la classe politique.

Je l’ai entendu dire que la politique extérieure des Etats-Unis constitue un vrai danger.

Je l’ai entendu dire qu’il ne faut pas retourner dans l’OTAN.

J’ai participé avec lui et André Chassaigne en 2011, dans un théâtre de Bordeaux, à un meeting « Contre le capitalisme vert, unir l’écologie et la justice sociale » où chacun était plus attaché à l’écologie que les éléphants d’EELV qui se bousculent pour des postes, des honneurs, de l’argent.

Je l’ai vu, assailli par les médias de sarcasmes, de mensonges, d’attaques. J’ai vu leur bassesse dans le choix des photos de lui qui visent « à créer un effet de peur chez le passant » comme les portraits de l’Affiche rouge.

Et j’assiste à son procès permanent où se délectent ceux qui ignorent que 95 % des grands médias français appartiennent à des banquiers, industriels, marchands d’armes. Ah ! Malcom X : « Si vous ne faites pas attention aux médias, ils vous feront détester l’opprimé et aimer l’oppresseur ». Justement Jean-Luc Mélenchon est l’homme qui dit dans les médias ce que sont les médias (et cela ne lui sera pas pardonné). Qui d’autre le fait ?

On se tire une balle dans le pied ?

Par quel néfaste miracle, en ce pays, les petits, les obscurs, les sans-grades (« Nous qui marchions fourbus, blessés, crottés, malades, – Sans espoir de duchés ni de dotation ». Edmond Rostand, L’Aiglon), les chômeurs, les vieux ouvriers maintenus au travail quand l’âge est là, les femmes sous-payées, les jeunes sans avenir, tous ceux pour qui la vie est plus dure que celle de leurs parents, les petits commerçants écrasés par les grandes surfaces, les paysans qui travaillent à perte, tous ceux qui désespèrent d’acheter un appartement, d’avoir un jour une retraite, les professeurs au pouvoir d’achat en chute libre depuis 25 ans, tous les fonctionnaires, indispensables et méprisés et dont le statut est menacé, tous ceux-là, qui sont l’écrasante majorité des Français, par quel mystère votent-ils si nombreux pour les prédateurs ou leurs complices matois badigeonnés en vert ou en rose ? Ou en bleu-blanc-rouge sur du vert-de-gris ?

La vérité est que les médias font les élections. Je connais (vous connaissez) des villages ou des quartiers sans immigrés, sans pic local de chômage, sans incivilité, sans militants du FN, mais où le FN recueille plus d’un quart des suffrages sur des noms d’inconnus qui n’ont jamais organisé une réunion ou collé une affiche.

La vérité aussi est que les électeurs ont besoin d’un projet visible qui annonce enfin la rupture avec les solfériniens, lesquels n’ont rien de socialistes et qui ne peuvent être absous de leur trahison par la froide raison mathématique des reports de voix qui fait élire (pas toujours) des candidats de gauche.

Les « toutourienistes »

Les propriétaires des médias, aujourd’hui comme hier, préfèrent n’importe quoi au Front populaire. Ils barbouillent les panneaux électoraux de leur plus dangereux adversaire. Des toutourienistes relaient leurs salades empoisonnées et nous voyons, contre l’annonce de la candidature de Jean-Luc Mélenchon, un (relatif) pilonnage mécanique venant de ceux qui devraient être avec lui. Certes, un proverbe japonais dit que le clou qui dépasse appelle le marteau. Mais le marteau ne réfléchit pas. Or, LA question qui devrait se poser est la suivante : quel est le programme rassembleur, acceptable par toute la gauche, que Jean-Luc Mélenchon pourrait porter ?

Il y en a un peu plus (4%) je vous le laisse ?

Pourquoi lui ? Parce qu’un(e) autre obtiendra 3 % (allez, 4,9 % si vous voulez). Ne me dites pas que je ne sais rien des résultats possibles, que si l’on se rassemble, que si l’on s’y met tous… Vous savez que ce n’est pas vrai. Les élections présidentielles requièrent une tête d’affiche connue et si possible un tribun. La Sixième République proposée par Jean-Luc Mélenchon mettra fin à l’élection publicitaire d’un monarque élyséen, mais en attendant, il faut un candidat.

Portrait du candidat idéal

Il le faudrait immaculé. Dans ce cas, on lui reprochera son manque d’expérience, de stature internationale (a-t-il rencontré Obama, Merkel ?).

Il le faudrait assez âgé, avec l’épaisseur nécessaire à la charge. Mais attention, il convient aussi que, dans son passé, il ait accompli un sans-faute, que nulle part dans un de ses articles, une de ses déclarations, un de ses votes, on ne puisse trouver matière à heurter la pureté révolutionnaire. On exigera de lui des décennies d’infaillibilité, vertu dont sont désormais exemptés le pape et (restons sur le sujet) tous ceux dont les médias nous suggèrent qu’ils feraient mieux l’affaire que Jean-Luc Mélenchon, ainsi que tous ceux qui approuvent les médias qui disent ça.

Reste vierge : un jour, ton Prince viendra

L’intégriste politique (comme le religieux) ne veut épouser qu’une vierge (néanmoins experte dans les jeux de l’amour). Et comme on en manque sous nos latitudes, l’intégriste renonce à fonder un foyer, à procréer. Il préfère être seul que mal accompagné, même si la marche en commun qu’on lui propose conduit hors du désert et l’éloigne de l’onanisme politique, forcément stérile.

C’est l’apanage des puceaux de n’avoir jamais mal fait l’amour et quiconque a un jour élevé des enfants, participé à la gestion d’une association, d’une commune, d’un pays, s’est exposé à l’erreur, à la faute, au compromis, voire à la compromission.

« Quoi je me suis trompé cent mille fois de route » écrit Louis Aragon qui ajoute, trop optimiste : « On sourira de nous pour notre dévouement ». Et aussi :

« On sourira de nous pour le meilleur de l’âme

On sourira de nous d’avoir aimé la flamme

Au point d’en devenir nous-mêmes l’aliment

Et comme il est facile après coup de conclure

Contre la main brûlée en voyant sa brûlure. »

Et où sont ceux qui ne se sont pas trompés, au moins une fois ?

La France insoumise

Il serait temps que la France se souvienne qu’elle émerveilla le monde au siècle des Lumières, en 1789, en 1936, pendant la Résistance, en 1968, en 2005 en rejetant le Traité constitutionnel européen.

En 2012, elle a raté son nouveau rendez-vous avec l’Histoire. Il est probable que les peuples d’Europe, asservis par la puissance de l’argent, attendent un signal français qui ne serait pas la ruée du « parti de la trouille » vers les urnes pour y lâcher avec dégoût un bulletin de vote contre le FN, puisque le choix ne serait pas donné de voter « pour » un projet avec quelque chance de le voir s’imposer.

Nous avons d’abord besoin d’être ensemble. Ensemble dans la diversité, chaque pièce du puzzle étant un bout de l’Hexagone. Il suffit de les assembler. Chacun de nous y trouvera sa place dans le respect de ce qu’il est et qu’il entend continuer à être.

Si l’on ne s’échappe pas des mâchoires de la tenaille forgée par la droite et les Solfériniens, nous aurons à choisir l’an prochain entre leurs candidats. Tel citoyen qui n’a pas aidé à faire émerger un autre projet votera en 2017 pour un des programmes conçus contre lui.

Quant à moi, je voterai pour Jean-Luc Mélenchon au premier et au deuxième tour des présidentielles. S’il s’avérait que le choix ne m’est pas donné de le faire deux fois, je me tiendrai à l’écart des isoloirs le dimanche du second tour.

J’ai écrit depuis 10 ans des livres, des articles sur la droite, la fausse gauche, les fascistes. Si la fille Le Pen, si Juppé ou Hollande s’installent à l’Elysée en 2017, merci de ne pas en faire reproche à tous ceux qui, s’étant battus, sont dans le fossé et comptent leurs blessures, vaincus par les leurs qui chantent en permanence les vertus négatives du doute et vantent les chemins que la prudence suit (merci encore, Aragon ; ah ! camarade, que serais-je sans toi ?).

Maxime Vivas

(Ecrivain non encarté)

NB. Les raisons de ne pas voter Jean-Luc Mélenchon, nous les connaissons par les médias qui les déversent par tombereaux. Au besoin ils en inventent. Il suffit d’y ajouter des raisons personnelles (son physique, son style…) et ainsi sera creusé le sillon de dérivation qui empêchera un peuple de s’unir pour renverser la table sur laquelle vont festoyer pendant 5 ans ceux dont nous voulons plus.


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