La dynamique Mélenchon, souffle d’espoir pour transformer la société

vendredi 21 avril 2017.
 

La présence du candidat de la France insoumise au second tour de la présidentielle signifierait la possibilité pour les électeurs d’un véritable choix de société.

Ce dimanche soir, nous retiendrons notre souffle au moment de découvrir les résultats du premier tour de la présidentielle. Si, depuis des mois, rien ne s’est passé comme annoncé par les principaux commentateurs politiques, nul doute qu’une situation inédite peut sortir des urnes. Voyons les six scénarios possibles.

Un face à face entre Le Pen et Macron

C’est le scénario décrit par les sondages depuis des semaines et annoncé par le sérail médiatique… mais qui n’est plus évident. Face à un Front national resté autour d’un cinquième des exprimés, l’ancien ministre de l’Économie aurait réussi son coup : faire croire que ses propositions sont nouvelles, alors qu’elles refourguent le catalogue des politiques voulues par l’Union européenne et se situent dans la continuité de la politique de Hollande et Valls. À l’arrivée, une tentative de recomposition politique au forceps s’annoncerait, Macron cherchant à rallier une partie de la droite pour pouvoir gouverner. Il n’est pas écrit qu’il y parvienne, ce qui conduirait à une période compliquée entre l’exécutif et le pouvoir législatif. Quoi qu’il en soit, avec ce scénario, on peut annoncer sans crainte de se tromper qu’une énorme frustration d’une large majorité de l’électorat est à prévoir à court terme : tous ceux qui ont une appréciation très négative du quinquennat soi-disant socialiste devraient se rappeler très vite au nouveau président. Dans un pays où des millions de citoyens, soutenus par une large partie de l’opinion publique, se sont mobilisés contre la loi El Khomri, les lendemains pourraient vite déchanter pour le partisan de l’ubérisation de la société.

Un duo entre Le Pen et Fillon

C’est le scénario le plus sombre, car il opposerait l’extrême-droite et la droite radicalisée et cynique. Fillon aurait réussi, malgré ses multiples casseroles, son programme anti-social et la défection d’une partie de ses soutiens en principe acquis, à consolider son socle conservateur et xénophobe. Voilà qui promet du sang et des larmes, un climat social tendu, vu son programme économique ultra libéral, sans parler des retournements annoncés en matière de politique étrangère, vu en particulier les affinités du candidat avec le pouvoir syrien et avec la Russie de Vladimir Poutine. Élu président, le père fouettard de la droite se trouverait dans un premier temps confronté à l’obligation d’obtenir une majorité à l’Assemblée nationale, pour tenter d’imposer ses projets à un pays de plus en plus réfractaire. Il aura là de sérieuses difficultés, car une partie des centristes ne partagent les aspects les plus radicaux du programme filloniste, et cela dans tous les domaines.

Un affrontement Fillon contre Macron

Au secours, le bébé Hollande - Valls face à l’ancien collaborateur de Nicolas Sarkozy ! Voilà de quoi consterner tous ceux qui estiment que les gouvernements néolibéraux et socio-libéraux ont failli depuis de nombreuses années, menant toujours les mêmes politiques économiques, et tous ceux qui espèrent une alternative. Alors, que préférez-vous ? 120 000 fonctionnaires en moins ou 500 000 ? Le Code du travail, vous le voulez laminé par ordonnances ou par le 49.3 ? Vous préférez les valeurs chrétiennes de la Manif pour tous ou l’idée que « La France n’a jamais été et ne sera jamais une nation multiculturelle. » (Macron dans la revue Causeur) ? Qu’il s’agisse de la suppression de l’ISF, de la réduction des dépenses publiques, de punir les chômeurs, de mettre en cause le statut des fonctionnaires… comme l’écrit L’Humanité, Macron et Fillon sont « les deux faces d’un même libéralisme » minoritaire dans la société.

Un duel Mélenchon – Le Pen

Ce scénario signerait la faillite des partis qui dominent la politique française, d’alternance en alternance aux manettes gouvernementales, depuis tant d’années. La vraie gauche face à l’extrême-droite, il y aurait là une forme d’aboutissement (provisoire) du délitement du système politique et de ses forces les plus institutionnalisées. Vraiment pas de quoi se réjouir : le FN au second tour pour la seconde fois après 2002, cela témoignerait qu’une partie importante de l’électorat est tentée par des propositions xénophobes, teintées de repli national et identitaire. Et que les derniers jours de la campagne, où Marine Le Pen a choisi de donner une tonalité radicale à ses propos (bienfaits de la colonisation de l’Algérie, moratoire sur l’immigration légale…), n’auraient pas rebuté son électorat potentiel. Notons au passage que quels que soient les finalistes du second tour, le score du FN restera en tout état de cause très haut, loin du besoin de le renvoyer à sa marginalité d’autrefois. Cependant, dans ce scénario, on pourrait au grand jour et à vitesse grand V avoir un immense affrontement contradictoire sur la vision de la société (pas seulement entre les candidats, mais aussi en se mobilisant partout, dans la rue et sur le Net), pour rompre avec le pourrissement du système qui sert Marine Le Pen.

Un duel Mélenchon – Fillon

L’ancien ministre et ses casseroles, le chantre d’un néolibéralisme de type thatchérien face à la gauche d’alternative, voilà bien une situation inédite. Côté Mélenchon, cela serait le triomphe d’une troisième voie, alternative, entre politique de droite et une fausse social-démocratie en voie de décomposition. Côté Fillon, cela montrerait l’affirmation d’un socle fort de la droite dure, dont certaines composantes sont favorables à des convergences avec l’extrême-droite. Voilà cependant, potentiellement, une revanche populaire possible face aux chantres du Traité constitutionnel européen, rejeté à 55 % lors du référendum de 2005, mais repassé par la fenêtre ensuite par Sarkozy, en tout déni démocratique. Le gros avantage, si l’on peut dire, de ce duel là, c’est la clarté de l’enjeu pour les citoyens.

Un duel Mélenchon – Macron

La gauche insoumise, populaire et citoyenne, contre la fausse gauche technocratique et élitiste, voilà encore une configuration où l’affrontement concerne non seulement la question sociale mais aussi la question démocratique. Face à une orientation politique claire, déclinée par L’Avenir en commun, la viscosité du programme d’Emmanuel Macron, qui, dit-il lui-même, emprunte à la fois « à la gauche, à la droite et au centre ». Si, comme l’expriment certaines études, c’est peut-être la configuration la plus dure pour Mélenchon, c’est que Macron est un faux masque, énième fer aux feux des libéraux et de la technocratie administrative qui les sert. Vu ce qui s’est passé ces derniers mois, faire tomber le masque en quinze jours, êtes-vous sûr que cela soit impossible ?

Un pronostic ? Non, un souhait : celui d’un affrontement entre Jean-Luc Mélenchon et François Fillon, pour tenter de remporter la seconde bataille victorieuse contre le libéralisme, après le référendum de 2005 sur le Traité constitutionnel européen.

Gilles Alfonsi. Publié dans Cerises.


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