Le PS, ce zombie qui pourchasse le Front de gauche

jeudi 28 août 2014.
 

TRIBUNE de Raquel Garrido secrétaire nationale et coordinatrice du programme du "Remue-Méninges" du Parti de gauche dans Le Journal du Dimanche.

Etre citoyen-ne

L’être pour soi, c’est-à-dire pour défendre l’égalité face à l’accaparement scandaleux des richesses dans le cadre du régime oligarchique de la 5ème République. L’être pour tous, c’est-à-dire exercer sa civilité au bénéfice de l’intérêt général, et ce faisant, avec les autres, faire Peuple. Cette aspiration pourtant si simple était bloquée.

Ainsi, c’est par un sentiment plus ou moins prégnant de dépossession civique que nous fumes conduits à la fondation du Front de gauche. Les partis classiques n’étaient plus des outils satisfaisants pour réaliser la transformation qui stopperait la régression néolibérale à l’œuvre en France et en Europe. A partir de 2008, nous avons osé. Et le 18 mars 2012, nous étions 100 000 place de la Bastille pour revendiquer la 6ème République et écouter – in vivo- Jean-Luc Mélenchon qui jusqu’à ce moment-là faisait campagne avec force meetings mais n’avait pas parlé devant le peuple parisien. Le lendemain, c’était le triple meurtre de Toulouse. Quelle douche froide ! A quelques heures d’intervalle, le meilleur de l’Homme et le pire. La solidarité joyeuse et la violence aveugle. Cela ne s’est pas démenti depuis, nous militons dans un contexte où se juxtaposent l’ombre et la lumière, et la France oscille entre les deux.

"Un Front de gauche qui n’a jamais retrouvé les voix de la présidentielle"

En 2012, contre la machine à démoraliser, 4 millions de personnes avaient néanmoins choisi le vote Mélenchon. Las, dès le lendemain de la présidentielle, ce fut le retour à la mort civique pour la grande masse des français-es. Abstention massive, apathie, défiance, et un Front de gauche qui n’a jamais retrouvé les voix de la présidentielle. Devant faire vivre ses idées et son programme dans l’espace restreint de ceux qui votent encore, le Front de gauche avait sans doute perdu de vue un point incontournable : notre système politique est définitivement gangréné car il ne repose plus sur l’idée fondatrice que c’est au peuple de gouverner, le cas échéant via des représentants.

Grand tabou de la 5ème République, le départ silencieux du peuple loin du lieu de la délibération et du pouvoir a été soigneusement ignoré par des élu-e-s qui feignent d’être représentatifs même quand les chiffres le démentent. Quel est l’avenir du Front de gauche ? Etre un instrument de la reconquête civique. Etre "élu-e" dans le cadre de la 5ème République ne peut pas être un horizon unique et efficace pour les militant-e-s du FDG. En revanche, s’indigner que la classe ouvrière ait été minutieusement expulsée de la démocratie et aider à ce que soit renversé ce régime oligarchique afin que chacun exerce pleinement sa parcelle de souveraineté, voilà l’avenir ! Le Front de gauche s’engagera dans la grande bataille pour une Assemblée Constituante ou il vivotera gentiment pour un temps indéfini.

"Le danger guette"

Le Front de Gauche regorge d’énergie, mais il est traqué. Sa force c’est la doctrine écosocialiste qui s’impose tranquillement mais sûrement. Qui songe aujourd’hui à réaliser le partage des richesses ou l’appropriation populaire des moyens de production en oubliant que si le méthane sous le permasfrost de Sibérie est libéré, l’écosystème n’est plus viable pour l’humanité ? Sous différents vocables, procédant de différentes cultures, la synthèse entre socialisme et préservation de l’écosystème s’impose.

Le Front de gauche aura été un lieu pour cette synthèse. Cependant le danger guette. Chacun connait la figure cinématographique, très à la mode dans les séries télévisées actuelles, du zombie. Le zombie est mort, mais le zombie marche encore. Et si le zombie vous mord, il vous transforme en zombie. Le zombie qui pourchasse le FDG, c’est le Parti socialiste. Ce zombie ce nourrit dans un écosystème particulier, le régime oligarchique de la 5ème République. L’entre-soi, la corruption morale et financière, la concentration des pouvoirs, le secret, sont les comportements inhérents à ce mundillo. Le Front de gauche a un avenir s’il aide à ouvrir grandes les portes du pouvoir, non pas pour lui, mais pour tous. Depuis 2012 le problème démocratique s’est aggravé. Cette "République" est définitivement hors de contrôle citoyen, ne faisons pas croire l’inverse.

Osons la révocabilité des élus, osons la parité, osons le vote obligatoire dès 16 ans et la prise en compte du vote blanc, osons la neutralité du web, osons la désacralisation de la propriété privée, osons la citoyenneté dans l’entreprise, osons le droit à la Ville, osons la Règle verte ! Osons, et soyons dignes de notre beau peuple qui mérite autre chose que le nihilisme impavide de ceux qui nous gouvernent ou les sirènes pathétiques du fascisme.

Retrouvez le tribune de Raquel Garrido sur le site du Journal du Dimanche en cliquant sur l’adresse URL portée en source (haut de page, couleur rouge).


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