Loisirs numériques : un impact sur les performances scolaires et cognitives ?

vendredi 22 novembre 2019.
 

À une époque où deux familles sur trois disposent de l’Internet à leur domicile, où 70 % des 12 – 14 ans et 90 % des 15 – 17 ans possèdent un téléphone mobile, il paraît nécessaire de connaître l’impact de ces instruments, dans leur usage de loisirs, sur les performances scolaires des adolescents.

Le journal l’Humanité a attiré notre attention sur un article paru dans le revue Les cahiers pédagogiques concernant les effets des loisirs sur les performances scolaires des jeunes adolescents.

La DEPP(Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance) du Ministère de l’Éducation nationale avait réalisé en 2008 une enquête étudiant l’impact des loisirs des élèves sur la réussite scolaire. Chez des enfants de 11 ans, elle ne révéla pas d’impact significatif .

Mais depuis les technologies du numérique ont explosé et envahi notre quotidien. C’est pourquoi la DEPP avait prévu une nouvelle enquête trois ans plus tard (en 2011) sur un large échantillon représentatif de 27 000 adolescents français (14 ans et demi) en classe de 3e de collège. Cette enquête est l’objet de cet article.

Nous publions donc ici un extrait de l’article paru dans la revue pédagogique (sa conclusion).

Les résultats montrent clairement les loisirs positifs ou négatifs pour les performances cognitives scolaires.

La lecture est la plus bénéfique, puisque les changements liés à une pratique fréquente sont favorables à tous les tests, notamment à la compréhension (+10%) et surtout à l’acquisition de connaissances (+20%).

Les jeux vidéo n’ont pas d’influence, et notamment, on remarque qu’il n’y a aucune amélioration pour le raisonnement, ce qui infirme l’hypothèse de transfert de la pratique des jeux vidéo sur l’intelligence fluide, comme l’ont supposés certains chercheurs.

A l’inverse, jouer aux jeux vidéo (action, combat, plateforme) n’a pas non plus d’incidence négative. Téléphoner très souvent a une incidence mais faible, sauf pour l’acquisition des connaissances de ceux qui téléphonent (ou envoient des SMS) (-10 %).

Mais c’est le visionnage très fréquent des programmes de téléréalité (et également les séries romantiques) qui a l’impact le plus négatif sur les performances cognitives et scolaires, de -11 % pour les maths à -16 % pour les connaissances.

Quand on contraste la pratique fréquente de certains loisirs, on s’aperçoit que leur influence n’est pas négligeable. Ainsi, si l’on compare le visionnage de programme de téléréalité à la lecture de romans (policiers ou de littérature), la différence est de 35 % pour les connaissances scolaires (mémoire encyclopédique) ce qui correspond à plus d’un tiers de la note.

Traduit en note scolaire traditionnelle, un élève moyen qui lit beaucoup aurait une note de 14 sur 20 (+20%) comparée à une note de 8,5/20 (-alors qu’un élève qui est «  accro  » à la téléréalité aurait 8,4 sur 20 (-16 %).

Dans l’ensemble, la majorité des loisirs, comme les jeux vidéo, n’a pas ou peu d’influences sur les performances scolaires et cognitives, ce sont des loisirs qui permettent la détente, ou l’expression des dimensions affectives et sociales des élèves (téléphone, sms).

Mais la pratique trop fréquente de la télé (ou vidéo sur ordinateur) est associée à de moindres performances. A l’inverse, la lecture est bénéfique.

Pourquoi ? La raison principale en est la richesse de vocabulaire. Hayes and Ahrens (1988 ; Cunningham & Stanovich, 1998) ont montré un nombre de 1 000 mots différents en moyenne dans des livres mais jusqu’à 4 000 mots différents dans des magazines scientifique. Même le vocabulaire de bandes dessinées (867) est plus riche que celui d’émissions populaires en prime time pour les adultes (598 mots). Ces chiffres sont mêmes faibles par rapport aux manuels scolaires qui comptent jusqu’à 6 000 mots en plus du vocabulaire courant en 6e et jusqu’à 24 000 en 3e, niveau scolaire des élèves de notre étude (Lieury, 2012). En conclusion, oui aux loisirs numériques à dose raisonnable, mais l’école reste la vraie source de stimulation du cerveau.

Alain Lieury Laboratoire de psychologie expérimentale, (CRP2C, EA 1 285), université Européenne de Bretagne (Rennes2)

Sonia Lorant Laboratoire interuniversitaire des sciences de l’éducation et de la communication (LISEC, EA 2310), Université de Strasbourg, (IUFM d’Alsace)

On peut lire la totalité de l’article en cliquant ici

Hervé Debonrivage


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