Second tour : La défaite de SarkoPen

jeudi 17 mai 2012.
 

Une participation qui ne faiblit pas

Au niveau national, la participation progresse légèrement par rapport au 1er tour pour se hisser à 80,3%. Ceux qui avaient cru que le vote Le Pen au 1er tour allait produire de l’abstention au second se sont donc lourdement trompés. La participation reste cependant de 3,5 points en dessous de celle de 2007. Son évolution est contrastée selon les départements. La participation est en nette hausse là où la gauche progresse : elle augmente plus fortement en Ile-de-France et cette hausse dépasse même les 3 points à Paris et en Seine-Saint-Denis. Néanmoins il n’y pas eu lors de ce second tour de démobilisation prononcée de l’électorat de droite. On observe même de manière très localisée un sursaut de mobilisation de la grande bourgeoisie, comme à Neuilly où l’abstention a chuté de 16 à 11% entre les deux tours.

Un vote blanc sans rapport avec le choix de Marine Le Pen

Le choix de Marine Le Pen en faveur du vote blanc n’a pas été suivi par ses électeurs du 1er tour. A l’image de l’importance disproportionnée qu’ils ont accordé au FN dans l’entre deux tours, les médias ont insisté sur le niveau prétendument élevé des votes blancs. La réalité donne 5,8% de bulletins blancs et nuls. Et ils n’ont pas plus progressé entre les deux tours en 2012 qu’en 2007 puisqu’ils ont été multipliés par trois dans les deux cas. L’augmentation des votes blancs et nuls n’a donc pas grand-chose à voir avec le choix exprimé par Le Pen en faveur du vote blanc. Elle reflète surtout une constante de tous les seconds tours d’élection présidentielle. D’ailleurs les votes blanc et nul étaient plus élevés en 1995 qu’en 2012.

Le vote SarkoPen démasqué

Alors que la présidente du FN avait misé sur la défaite de Sarkozy à la fin de sa campagne, ses électeurs ont majoritairement fait un autre choix stratégique en prêtant main forte au président sortant. Ce dernier gagne en effet plus de 7 millions de voix entre les deux tours. Même à supposer que les 3 millions de voix de Bayrou se seraient reportées sur lui, il resterait au moins 4 millions de voix de Sarkozy venues des électeurs de Marine Le Pen, soit 60% des voix du FN. Et à supposer que les électeurs de Bayrou se soient répartis à égalité entre Sarkozy et Hollande, cela signifie que le report de voix du FN sur Sarkozy dépasserait les 80%. Ces projections sont confirmées par l’examen des résultats locaux. C’est là où le vote FN était élevé au 1er tour que le vote Sarkozy recule le moins par rapport à 2007. Sarkozy limite la casse dans l’Oise, l’Ain ou le Gard grâce à des reports très majoritaires des voix du FN. Et il arrive même à conserver une confortable avance dans le Vaucluse, le Var et les Alpes maritimes où il bénéficie d’un report intégral des voix Le Pen. Ces reports montrent l’émergence d’un électorat SarkoPen qui peut voter aussi bien pour l’UMP que pour le FN.

La droite décroche

En dépit de ces importants vases communicants entre Sarkozy et Le Pen, la stratégie d’extrême-droitisation choisie par Sarkozy a été rejetée par une nette majorité de citoyens. Sarkozy perd plus de 2 millions de voix par rapport au second tour de 2007. Il les perd partout, même à Neuilly où il réalise 1 500 voix de moins qu’en 2007. Il perd dans toutes les grandes villes, à commencer par Paris, Lyon et Marseille où il était majoritaire lors de la dernière présidentielle. Et il s’effondre dans les départements populaires où il avait percé en 2007 comme le Nord, la Somme, les Ardennes ou l’Aisne. Les villes des principaux dirigeants de l’UMP ne font pas exception. La très médiatique porte-parole Nathalie Kosciusko-Morizet est enfoncée dans sa ville de Longjumeau avec 45% pour Sarkozy. Il dégringole aussi dans la ville du secrétaire général de l’UMP Jean-François Copé, à Meaux où il passe de 52,5 % à 46%. Sans parler de Bordeaux où les 57 de Hollande ont torpillé les velléités de Juppé de redevenir député. Sarkozy connait enfin un décrochage particulièrement violent dans les Outre-mer, victimes de plein fouet des politiques d’austérité : il y réalise les scores les plus faibles d’un candidat de droite sous la 5ème république.

Une victoire de Hollande moins large qu’attendue

Avec 51,6% François Hollande arrive en tête dans une large majorité de départements (61 sur 101). Hollande tutoie ainsi sans l’égaler le score de Mitterrand en 1981. Il obtient 1,2 million de voix de plus que Ségolène Royal en 2007. Une performance relative quand on sait que le corps électoral a progressé dans le même temps de 1,5 million d’électeurs. La progression du candidat PS n’est donc pas homogène. Il recule en effet en nombre de voix par rapport à Ségolène Royal dans des fiefs PS comme Liévin dans le Pas-de-Calais, Denain dans le Nord ou encore le bastion fabiusien de Rouen. A noter la contreperformance de son directeur de campagne, Pierre Moscovici, dans sa ville ouvrière de Montbéliard où Hollande fait moins de voix que Royal. De même qu’au Mans, ville du directeur de cabinet de Hollande, Stéphane Le Foll. Et dans la commune qui compte la plus grosse section socialiste de France, à Allauch dans les Bouches du Rhône, avec 911 cartes du PS pour 16 000 inscrits sur les listes électorales, Nicolas Sarkozy l’emporte à 60% ! Ces exemples montrent que la victoire de Hollande n’a pas été particulièrement tirée par l’appareil du PS qui est largement déconnecté des mouvements de la société.

Laurent Maffeis


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