Les jeans vieillis par sablage sont mortels

vendredi 18 mars 2011.
 

Campagne pour mettre fin au sablage des jeans

Les jeans vintage sont toujours aussi tendance. Pour leur donner cet aspect usé, certaines marques ont recours à la technique du sablage, qui consiste à projeter du sable à forte pression sur le tissu. Les ouvriers qui la pratiquent travaillent sans protection. Ils inhalent les poussières de silice extrêmement toxiques, qui provoquent la silicose, maladie respiratoire incurable. 47 travailleurs en sont déjà décédés en Turquie. Près de 5000 autres pourraient être touchés. Beaucoup plus à travers le monde. Pour eux, ces jeans sont réellement « mortels ».

Le Collectif Ethique sur l’étiquette et son réseau européen Clean Clothes Campaign ont questionné de nombreuses marques de jeans sur leur pratique du sablage. Certaines ont refusé d’entrer en dialogue ou d’annoncer publiquement l’arrêt de cette technique. D’autres ont déjà cessé le sablage pour leurs prochaines collections.

Source :

http://www.ethique-sur-etiquette.or...

2) Ils sont mortels, ces jeans tendance

Par Maïté Errecart, présidente du Collectif Éthique sur l’étiquette (*)

Avec près de 5 milliards de jeans produits dans le monde chaque année, les jeans vintage dominent le podium de la mode depuis près de vingt ans. Au hit des ventes  : ces jeans vieillis qui ont l’air déjà portés… Une « tendance » qui fait souvent appel à une technique irresponsable et mortelle  : le sablage manuel du jean.

Or, on sait désormais, grâce notamment au Comité turc de solidarité avec les sableurs, créé en 2008, que cette technique rentable est très dangereuse pour les travailleurs. C’est en effet en Turquie que des médecins ont démontré pour la première fois le lien entre la silicose, une affection pulmonaire mortelle, et l’industrie du vêtement. Depuis le début des années 2000, plus de 1 200 sableurs ont en effet contracté la silicose et 47 en sont morts. À la suite d’une forte mobilisation de la société civile, la Turquie a interdit officiellement le recours à cette technique, mais le combat reste hélas d’actualité. Les experts estiment en effet qu’un ouvrier sur deux ayant travaillé dans ce secteur en Turquie depuis les années 1990 pourrait désormais souffrir de silicose légère, moyenne ou aiguë, soit près de 5 000.

La situation est d’autant plus grave que les sableurs développent une forme particulièrement aiguë de la silicose, qui se déclenche après seulement trois à vingt-quatre mois de travail, contre dix à trente ans d’exposition dans l’industrie minière. Une différence qui s’explique par les conditions de travail de l’industrie textile  : le sable utilisé contient plus de 80 % de silice cristalline, le temps d’exposition peut excéder le nombre d’heures travaillées, les heures de travail dépassent largement le cadre prévu par les normes internationales et les équipements de protection, essentiels, sont quasi inexistants.

Les recherches menées par la Clean Clothes Campaign montrent par ailleurs que l’industrie textile a déjà délocalisé cette partie de la production dans des pays moins regardants ou dépourvus d’une réglementation effective tels que l’Inde, la Chine, le Mexique ou encore la Syrie.

Convaincu que les marques du secteur ont une responsabilité envers les travailleurs qui interviennent tout au long de leur chaîne de production, le collectif Éthique sur l’étiquette (ESE) a demandé entre novembre 2010 et février 2011 à sept d’entre elles (1) de fournir des informations sur leurs pratiques de blanchissement des jeans. Un dialogue a été amorcé avec certaines. Globalement, le niveau de connaissance est, sur la question, inégal. Et pour cause. L’organisation actuelle de la production de vêtements, avec des chaînes internationales de sous-traitance complexes et ramifiées, rend ardu le contrôle des intermédiaires. Forts de cette première investigation, et face à l’urgence de la situation, nous, collectif ESE, lançons une campagne de signatures en ligne de lettres adressées aux marques n’ayant pas répondu à nos demandes (2), ni pris la mesure de l’enjeu.

Pour être efficace, cette pression doit être largement relayée par les consommateurs(trice)s. Parce qu’il est impossible de différencier à l’œil nu les jeans ayant fait l’objet d’un sablage de ceux blanchis par d’autres techniques moins nocives, le consommateur doit exiger des marques l’arrêt de la production et de la vente de ces jeans « trop mortels ». Aujourd’hui plus que jamais, chaque citoyen(ne) qui achète un jean doit être sûr qu’il n’est pas mortel… et en être fier(ère)  !

(1) Pimkie, Kookaï, é. Leclerc, Auchan, Promod, Carrefour et Casino.

(2) Au 1er mars  : Pimkie, Kookaï, é.. Leclerc et Auchan.

(*) www.ethique-sur-etiquette.org/

Maïté Errecart


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