L’Onu dénonce un "bain de sang" au Sri Lanka

mardi 12 mai 2009.
 

COLOMBO (Reuters) - L’assaut mené au Sri Lanka qui a fait des centaines de morts est pour l’Onu le "bain de sang" qu’elle redoutait dans le conflit opposant l’armée aux séparatistes tamouls des Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE).

Selon les informations disponibles, plusieurs centaines de personnes ont été tuées dimanche et lundi dans des tirs d’artillerie contre le réduit de 5 km² où sont désormais confinés les rebelles sur la côte nord-ouest de l’île.

"Nous avons régulièrement mis en garde contre les risques de bain de sang, et le massacre de civils dont plus de 100 enfants ce week-end tend à montrer que ce bain de sang est devenu réalité", a déclaré Gordon Weiss, porte-parole de l’Onu.

Les séparatistes tamouls ont imputé les tirs à l’armée gouvernementale ; Colombo affirme que ce sont les LTTE qui ont ouvert le feu contre les civils bloqués dans la zone de guerre pour amener la communauté internationale à réclamer une trêve.

Présent dans la zone de combats, un médecin, rémunéré par le gouvernement mais dont la sécurité dépend du bon vouloir des LTTE, a affirmé qu’au moins 433 corps avaient été conduits dans un hôpital de fortune et que 1.347 personnes avaient été blessées en deux jours de pilonnage.

"La plupart des corps gisent sur la route, dans les maisons, partout. Le pilonnage devrait avoir causé la mort d’environ 1.000 personnes", a déclaré ce médecin qui se présente comme Thurairajah Varatharajan, le responsable médical du secteur.

REUNION DU CONSEIL DE SECURITE

Il est pratiquement impossible de savoir exactement ce qui se passe dans la zone de guerre, en général interdite aux observateurs. Ceux qui ont accès craignent pour leur sécurité et sont soumis à la pression des armes.

"Rien de ce qui sort du Wanni (la zone où ont lieu les combats) n’est objectif et indépendant. Nous savons que les LTTE ont le plein contrôle de la zone et ces fonctionnaires sont sous pression", a déclaré à la presse la ministre des Droits de l’homme, Mahinda Samarasinghe.

Le site internet pro-tamoul www.TamilNet.com rapporte les propos d’un haut responsable de la guérilla qui affirme que 2.000 personnes ont été tuées et dément toute responsabilité des LTTE.

"Nous appelons la communauté internationale et le Conseil de sécurité de l’Onu à agir dans l’urgence pour prendre les mesures capables d’empêcher véritablement d’autres massacres", a déclaré le chef de la diplomatie des LTTE, Selvarajah Pathmanathan, sur le site internet. Pathmanathan, qui a longtemps été l’artificier en chef des rebelles tamouls, est recherché par Interpol.

Le Conseil de sécurité de l’Onu devrait une nouvelle fois se réunir de manière informelle ce lundi pour discuter du Sri Lanka.

Le chef de la diplomatie britannique, David Milliband, qui s’était rendu sur place fin avril s’est déclaré "consterné" par les informations en provenance de l’île.

"Notre message est simple. La tuerie doit cesser", a-t-il dit à la presse avant une réunion du Conseil de sécurité consacrée à d’autres sujets. "Les civils (...) pris au piège dans cette zone sont les victimes d’une guerre sans témoin."

"Je pense très très fermement que la situation des civils dans le nord-ouest du Sri Lanka requiert l’attention des Nations unies à tous les niveaux", a-t-il poursuivi.

Washington a fait part de sa profonde préoccupation face au dégré "inacceptable" de violences qui frappent les civils.

"Nous sommes profondément inquiets. Le nombre des victimes civiles a atteint un niveau inacceptable", a dit Ian Kelly, porte-parole du département d’Etat.

"Nous avons appelé à plusieurs reprises les Tigres tamouls à déposer les armes et à autoriser l’évacuation des civils. Le gouvernement du Sri Lanka devrait respecter sa déclaration du 27 avril selon laquelle les opérations de combat sont terminées et les forces armées doivent cesser d’utiliser des armes lourdes", a ajouté Kelly.

Les membres du Conseil de sécurité sont divisés sur la suite. Etats-Unis et Grande-Bretagne, favorables à un cessez-le-feu, souhaitent qu’il se saisisse formellement de la situation afin de pouvoir agir ; Russie et Chine y sont opposés.

La guerre civile entre les rebelles séparatistes des LTTE et le gouvernement sri-lankais a éclaté en 1983.

Par Ranga Sirilal et Shihar Aneez

Version française Henri-Pierre André et Mathilde Gardin


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