Echos de campagne et débats avec le MRC

mardi 7 avril 2009.
 

Le nez collé sur le guidon, je cours le pays, d’un meeting à une porte d’usine. La Célanèse mercredi, sur le bassin de Lacq, la Société Nationale des poudres et explosifs à Bergerac jeudi, la Snecma à Bordeaux, vendredi. Le soir je fais des réunions publiques. Pour l’instant ce sont des salles bondées, partout. 700 à Carmaux, 500 à Périgueux, 1000 dans la banlieue de Bordeaux. Mon camarade Jacques Généreux fait aussi bien, à ce qu’il me dit quand par hasard on se croise. Le tandem avec le PC fonctionne à plein régime. Depuis l’arrivée de Christian Picquet, l’énérgie monte d’un cran encore. Pendant ce temps, les négociateurs à Paris continuent à faire des pieds et des mains pour élargir le Front de gauche. Sur le terrain cet élargissement fonctionne. Des comités du NPA, des sections du MRC, des groupes, des associations de gauche locales, des personnalités, répondent à l’appel et prennent leur place dans le combat commun. Pour autant je crois m’épargner des heures d’explications personelles avec tant de vrais amis en m’arrêtant un instant sur ce qui s’est passé avec le MRC. Mon propos est juste de dire ce qu’il en est. Chacun ensuite se fera son idée. En effet dans une déclaration de son Conseil National le 23 mars puis dans un argumentaire publié par Sami Naïr cette semaine, la direction du MRC de Jean-Pierre Chevènement donne sa version de l’échec des négociations pour l’entrée dans le Front de Gauche de ce mouvement. Pour la qualité des dialogues à venir et celle des échanges avec ceux qui m’écrivent à ce sujet, il est nécessaire de rectifier plusieurs arguments avancés. En effet, ils ne correspondent pas à la réalité du texte politique de résolution du Front de Gauche que le MRC met en cause.

La question de la souveraineté nationale

La résolution du CN du MRC nous impute un « rejet de la souveraineté nationale et particulièrement d’un amendement MRC indiquant qu’« on ne fera pas l’Europe sans et à plus forte raison contre les nations qui sont le lieu privilégié de l’expression démocratique et de la solidarité(…). Les organisations du « Front de Gauche » partagent en fait, à travers des expressions comme « souveraineté européenne », « assemblée constituante européenne », les mêmes postulats illusoires que ceux qui ont conduit les sociaux-libéraux à accepter, au nom de la supranationalité, la prise en otage de la construction européenne par le capitalisme financier mondialisé ». Qui peut croire sérieusement que « comme les socio-libéraux », les partis du Front de Gauche contribueraient à « la prise en otage de la construction européenne par le capitalisme financier mondialisé » ? A quoi riment ce genre d’outrances ? Surtout quand elles s’appuient sur des citations inventées. Car malheureuresement, c’est le cas. En effet, dans la résolution du Front de Gauche on ne trouve par exemple aucune trace d’une « assemblée constituante européenne » ou équivalent ni de « souveraineté européenne ». Pire. Dans le texte, rien ne contredit l’idée que les nations restent aujourd’hui, qui peut nier cela, le cadre de la souveraineté populaire. Il est donc écrit sans aucune ambiguité quelle est notre démarche : « Ce que nous voulons, c’est affirmer une vision nouvelle de la société et de l’Europe fondée sur l’intérêt général et la souveraineté populaire à l’échelle nationale comme à l’échelle européenne ». L’articulation entre les deux niveaux de la souveraineté est donc décrite avec précision. S’il fallait polémiquer c’est à cela que nous aurions aimé trouver réponse.

Cependant, il est exact que nous avons refusé à Jean-Pierre Chevènement et aux négociateurs du MRC un amendement sur ce point. Chevènement l’avait ainsi rédigé : « on ne fera pas l’Europe sans et à plus forte raison contre les nations qui sont le lieu privilégié de l’expression démocratique ». Cette formule a été refusée. Comme ont été refusées toutes autres références aux contours institutionnels et politiques à venir de l’Union européenne telle que nous pourrions la souhaiter (on l’a dit le texte ne parle ni de « constituante », ni même de « pouvoir accru au parlement européen » ce que des composantes du Front de Gauche auraient pourtant pu souhaiter). Nous connaissons en effet les désaccords des partis de l’autre Gauche sur ces questions (confédération / fédération, traité/traité constitutionnel, assemblée constituante / rôle des Etats nations, etc..). A ce stade nous estimons que cela n’empêche pas une campagne commune. Il n’y a d’ailleurss pas d’inconvénient à ce que chacun décline dans sa propre propagande le modèle qu’il propose pour la construction européenne. Mais en conditionnant sa participation au front à ce que nous acceptions cet amendement, Jean-Pierre Chevènement aurait imposé en réalité aux partenaires du Front de Gauche sa vision particulière de la construction future de Europe, celle d’une Europe des Nations. Mais que l’on veuille bien le noter : l’inverse n’était pas vrai ! Nul ne demandait au MRC de signer un texte en opposition à sa doctrine.

VAGUES A PROPOS DES ETATS UNIS ?

La résolution du MRC a été appuyée quelques jours plus tard par un argumentaire. Celui-ci mélange quelques vrais désaccords, la citation de positions du MRC n’ayant effectivement pas été intégrées mais surtout des raccourcis et pas mal de contre-vérité. Au final ce tableau exagère l’étendue des désaccords. Pourtant nombre des propositions du MRC, une douzaine, ont finalement été intégrées avec l’accord des négociateurs.Alors pourquoi cet acharnement ? Voyez plutôt. L’argumentaire du MRC dit : « Sur la mondialisation régulée : nous avons plaidé pour une analyse sérieuse de la crise mondiale dont les Etats-Unis constituent l’épicentre et la principale cause. Nos interlocuteurs ont d’abord refusé de mentionner les Etats-Unis puis ils ne l’ont accepté qu’au détour d’une formule vague. » En réalité avant même l’arrivée du MRC dans les négociations, la résolution consacrait une partie importante du texte à la critique de « la politique militariste des Etats-Unis ». Précisant même que « l’Europe doit rompre avec l’atlantisme et l’alignement sur les Etats-Unis notamment dans le cadre de l’OTAN ». Ceux qui lisent ce blog avant qu’ils n’ont jamais trouvé ici des hésitants face aux Etats unis d’Amérique…. Pensent-ils que le PCF soit moins ferme a ce sujet ? Il est vrai que le MRC a voulu pointer dès l’introduction du texte la seule responsabilité des Etats-Unis dans la mondialisation libérale en expliquant que « Cette dérégulation portée par les Etats-Unis, a conduit à la fuite dans l’endettement intérieur, à la faiblesse du dollar et aux interventions militaires à l’extérieur, comme en Irak et au Moyen Orient ». Mais nous ne souhaitions pas exonérer totalement d’autres puissances de cette responsabilité. Par exemple l’Union Européenne. Et nous ne voulions pas introduire au hasard d’une phrase des notions trop précises. En effet, compte tenu de la nature d’un texte résumé à quelques pages, de tels raccourcis pouvaient être tout à fait contre performants. Ils nient en effet des facteurs explicatifs forts et peuvent inverser le sens de l’affirmation initiale : l’endettement intérieur des Etats-Unis et la politique d’un dollar faible pouvait en effet paraître justifier a contrario les politiques monétaristes ! C’est pourquoi nous avons voulu ajouter la condamnation d’une « dérégulation principalement portée par les Etats-Unis, (qui) a été accompagnée par des interventions militaires à l’étranger, comme en Irak et au Moyen-Orient ». Reste après tout cela qu l’incrimination de Chevènemnt selon laquelle nous serions restés vagues su le rôle des Etats unis est en réalité, pour rester aimables, une éxagération sans fondement. D’autres dirait une pure falsification assez injurieuse.

Nous ne voulons pas d’une Europe qui protège ?

Le reste est plus souvent risible que méchant. Argumentaire Chevènement : « Ils n’ont pas non plus accepté d’intégrer la notion de régulation, arguant que leur objectif n’était pas de réguler le capitalisme ». C’est vrai que l’idée de réguler, donc de réformer, le capitalisme et non le dépasser ne faisait pas consensus…. Nous assumons. A noter : le NPA nous fait le reproche exactement inverse. Puis l’argumentaire du MRC relève « Sur une Europe sociale qui protège : nous avons été très vivement contesté au nom de l’« identité européenne » conçue comme espace de libre échange ouvert. La critique du « protectionnisme » a été faite au nom du refus du « repli national ». Nous avons essayé de porter le débat sur le fond, mais cela fût impossible : le Parti de Gauche excipant de son fédéralisme européen (« nous sommes pour une Assemblée Constituante Européenne »), le Parti communiste au nom du refus d’un espace européen qui serait fermé au « reste du monde ». Il nous a été impossible d’ouvrir une discussion théorique sur la question. » Il faut donc se répeter. J’ai noté plus haut que le texte ne contient pas la revendication « d’assemblée constituante ». On ajoutera qu’aucun des négociateurs du PG ne l’a proposé. Et si le protectionnisme fait effectivement débat entre les partenaires du Front de gauche ce n’est pas seulement avec le MRC. En effet le Parti de gauche s’est par exemple prononcé pour un bouclier douanier. C’est un débat qui doit se poursuivre. Mais ce n’est en rien un argument qui permet d’affirmer aussi grossièrement que le Front de gauche serait contre une « Europe sociale qui protège » ! Au reste, ailleurs, l’argumentaire du MRC se contredit. Il reproche au contraire l’expression « boucler social » qui est dans le texte. Un bouclier n’est-il pas déjà une arme de protection ?

NOUS PROTEGEONS LA BANQUE CENTRALE ?

Ne vous pincez pas ils l’écrivent vraiment. « Sur la Banque centrale : nous voulions une réforme de ses statuts et de ses missions afin de mettre l’Euro au service des européens et non comme c’est le cas actuellement au service du capitalisme financier. Refus de nos partenaires de prendre en considération cette proposition. En réalité à trois reprises le texte d’origine critiquait amplement le statut et les missions de la BCE ! Qu’on en juge. Notre texte condamne : « une banque centrale européenne (BCE) échappant à la souveraineté populaire et totalement dévouée aux marchés financiers ». Franchement qui pouvait attendre autre chose de nous ? Notre texte réclame : ‘la maîtrise du crédit pour orienter la gestion des entreprises dans le sens de ces nouvelles priorités, et ce depuis les régions jusqu’à la BCE. Elle doit également tendre vers une maîtrise publique du système bancaire pour parvenir à une politique européenne coordonnée en matière monétaire qui mette au centre de la construction européenne une stratégie de l’emploi et de lutte contre le chômage. » Il conclut : « A cette fin la BCE doit être transformée dans ses missions pour être mise au service des populations et soumise à un contrôle démocratique. » Le lecteur appréciera. C’est a lui d’estimer si la critique du MRC n’est pas du coup quelque peu…. fallacieuse…

ET MAINTENANT L’INDEPENDANCE DE L’EUROPE

L’argumetaire Chevènbementistes affirme : « Sur une Europe acteur stratégique et solidaire dans un monde multipolaire : nous avons proposé l’idée d’une Europe indépendante, comme acteur stratégique dans la formation d’un monde multipolaire. L’idée a été rejetée au nom du refus de l’Europe « puissance ». Hum ! En réalité un paragraphe entier est consacré à cette question. Il ne reprend pas le vocabulaire du MRC mais n’est pas en reste sur l’indépendance de l’Europe. Qu’on juge, une fois de plus, à partir de ce qui est écrit par nous : « L’Europe doit rompre avec l’atlantisme et l’alignement sur les Etats-Unis notamment dans le cadre de l’OTAN. Une politique extérieure européenne indépendante doit se fonder sur le droit international.. » Plus loin :« En tant que représentants de la France au parlement européen, nous ferons entendre – à l’opposé de la politique de Nicolas Sarkozy - le projet d’une Europe indépendante, récusant les logiques de mise en concurrence des peuples et au service de la paix et du désarmement ». Le reste est a l’avenant. L’argumentaire du MRC dit :« Nous avons proposé un partenariat stratégique avec la Russie, l’idée a été rejetée.Vis-à-vis de l’Afrique, nous avons proposé la remise en question des accords de Cotonou : l’idée a été abandonnée. » Il est exact qu’il a bien eu refus de l’idée de partenariat stratégique avec la Russie. Cela nefaisait pas consensus. On peut le comprendre. Au pon t de rompre un front de gauche en France. Par contre la deuxième affirmation procède une fois de plus du procès d’intention. La citation des accords de Cotonou n’a pas été retenue faute d’informations suffisamment précises des négociatr au mot où ils écrivaient ! Au moment de la discussion nos amis ne savaiet pas s’il fallait limiter la critique de fond aux seuls accords de Cotonou. Ce n’était nullement un désaccord sur la dénonciation de ces traités. D’ailleurs le texte a intégrée l’amendement suivant avec le plein accord du MRC : « Nous défendrons, au parlement européen, un vrai projet de coopération et de solidarité avec les peuples de la Méditerranée et avec l’Afrique. » L’idée de fond n’a donc évidemment pas été abandonnée !

ET SUR LES MIGRATIONS ?

On sait que cette question est sensible. Le MRC écrit : « Sur la question des migrations, nous avons proposé une gestion des flux migratoires conforme au droit et respectueuse de la dignité des personnes, ce qui signifie en France l’abrogation des lois Sarkozy sur l’immigration. Notre proposition a été rejetée au prétexte qu’il fallait se contenter de la notion de « régularisation des sans-papiers avec une stratégie de co-développement ». Il y a effectivement un large débat sur cette question Et pas seulement entre le MRC et les forces du Non de gauche. Il se poursuivra sans aucun doute encore pas mal de temps. Entre la notion « brute » de « régularisation de tous les sans papiers » qui aurait pu effectivement laisser penser que nous résumions la politique de l’immigration à cette revendication et la « régularisation sur critères » que proposait le MRC, le compromis de « régularisation des « sans papiers » a finalement été trouvée. Le MRC demandait que cette régularisation soit « dans le cadre d’une stratégie de co-développement ». Nous avons écrit « avec la mise en place d’une stratégie de Co-développement » La différence valait-elle rupture ?

DRÔLE DE CONCLUSION

Enfin l’argumentaire du MRC conclut : « En réalité, nos interlocuteurs ne voulaient pas d’un accord, comme en témoigne la parution dans L’Humanité du 19 mars (date de notre dernier sommet) de la liste quasi complète des candidats ». La réalité factuelle est plus complexe. La parution de ces listes s’est faite dans le cadre du supplément « Communistes » intégré dans l’Humanité. Le PCF estimait nécessaire de porter à la connaissance de ses militants avant leur vote du 25 mars son approche de ces listes pou rendre leur vote possible. Un chapeau introduisait ces listes en expliquant qu’elles étaient provisoires. Une précaution effectivement utile car le Parti de Gauche lui-même n’avait pas validé la composition de ces listes.. Au vu et au sus de tous, clairment expliqué, cette publication exprimait donc les propositions du PCF. Non des listes acceptées par les partenaires du Front de Gauche. Depuis, elles ont d’ailleurs évolué au fil des négociations. Nous avons également regretté cette parution publique qi a cré d la confuion davantagg qu del’aide au tavail quchacun dvaitt accomplir. Mias il n’y a pas de quoi fouetter un chat.. Surtout entre gens avertis de ces sortes de questions…En réalité jusqu’au vote du MRC et des Alternatifs, les propositions qui avaient été faites à ces partis restaient sur la table. Lesquelles ? Une tête de liste pour une candidate MRC dans le Sud-est . Il s’agit d’une des quatre régions considérée comme pouvant élire un député du Front de gauche. Une autre tête de liste dans l’Est. Le bastion de Jean Pierre Chevènement, si les Alternatifs, à qui elle était réservée, avait finalement refusé l’accord, ce qui a été le cas. Avec cela 9 candidats sur les 7 listes de la métropole. Certes le MRC en réclamait deux par liste, soit 14 au total. En parti habitué aux négociations, le MRC pouvait donc supposer que l’écart entre ses demandes et les propositions faites pouvait se combler par la dicussion, a supposser que tout ceci ait vraiment de l’importance… Il n’a manifestement pas souhaité en vérifier la possibilité.…

POUR CONCLURE

Tous peuvent constater avec nous l’essentiel : les références à la « souveraineté populaire » sont centrales et sans ambiguité dans le texte. Elles sont devenues aujourd’hui une référence commune de la plupart des textes unitaires de la gauche critique lorsqu’il est question de démocratie. Les négociateurs du MRC ont paru trouver cela « naturel ». Les différentes composantes fondatrices du Parti de gauche qui ont œuvré en ce sens depuis plusieurs années se souviennent pourtant que cela n’avait rien d’une évidence au début de la campagne contre le TCE par exemple. A l’époque, la simple évocation de la « souveraineté populaire » vous assimilait facilement à un « souverainiste »,donc à un nationaliste. A force d’arguments échangés dans des combats unitaires, les choses ont évolué. Ce constat souligne de nouveau une approche différente entre les forces républicaines que nous sommes. La meilleure façon de faire avancer l’idée de République sociale et de la replacer au centre de gravité de l’autre Gauche par le débat et la conviction. Et pas de se retirer sur son Aventin pour fulminer des excommunications. C’est pourquoi la méthode pour construire le Front de Gauche interdit d’imposer une vision politique aux autres partenaires. Avec cet amendement sur une souveraineté nationale présentée de fait comme incontournable, la direction du MRC savait ne pouvoir trouver un consensus. Jean-Pierre Chevènement et la majorité de la direction du MRC ont donc préféré une fois de plus l’isolement. Curieuse leçon donnée ainsi par des républicains à des « mouvementistes », pour reprendre la terminologie de la résolution du MRC, que de faire l’impasse sur des élections. Nous pensons à l’inverse que dans la situation de crise que nous connaissons, face à la dramatique situation dans laquelle peut se retrouver le peuple français comme tous les peuples d’Europe, les républicains de gauche se doivent de proposer une expression politique devant le suffrage universel. Quitte à faire des compromis. Tant qu’ils ne vous contraignent pas à vous renier, où est le mal ? Nous sommes certains que notre parti qui se revendique de la république sociale sera compris en ce sens par un grand nombre de républicains de gauche. Le Front de gauche est leur outil. Ils vont le dire eux-mêmes en pranant librement leur décision de nous rejoindre. Dans toute la France ce mouvement est commencé.


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