La proportion de personnes sous-alimentées dans toutes les principales régions en développement du monde est aujourd’hui en hausse (rapport de la FAO)

mardi 10 mars 2009.
 

L’état de l’insécurité alimentaire dans le monde 2008

Prix élevés des denrées alimentaires et sécurité alimentaire – menaces et perspectives

Au milieu de l’année 2008, alors que les prix des aliments culminaient après avoir augmenté rapidement pendant deux ans, la communauté internationale s’est mobilisée devant le risque d’une crise mondiale de la sécurité alimentaire. La FAO estime que, entre 2003-2005 et 2007, les prix élevés des aliments ont contribué à accroître de 75 millions le nombre de personnes sous-alimentées, soit un total de 923 millions.

La flambée des prix des aliments a provoqué la plus forte aggravation de la faim depuis 1990-92, période de référence pour le Sommet mondial de l’alimentation et les Objectifs du Sommet du Millénaire relatifs à la réduction de la faim. Cette explosion du nombre de personnes souffrant de la faim a, en outre, sapé les progrès précédemment accomplis en direction du premier Objectif du Millénaire pour le développement (OMD 1), puisque la proportion de personnes sous-alimentées dans toutes les principales régions en développement du monde est aujourd’hui en hausse.

Qui sont les premières victimes de la flambée des prix des aliments ? La grande majorité des ménages pauvres sont des acheteurs nets d’aliments, et ont subi de plein fouet le brusque renchérissement des denrées alimentaires. Les sans-terres et les ménages dirigés par une femme sont les plus vulnérables. À l’inverse, les ménages ruraux pratiquant l’agriculture comme activité principale et ayant accès à la terre ont mieux supporté les augmentations des prix des denrées alimentaires.

Risque accru de malnutrition

L’observation des faits et l’expérience passée indiquent que les prix élevés des denrées alimentaires aggravent la malnutrition chez les ménages pauvres, ceux d’entre eux qui ont déjà une alimentation peu variée étant les plus touchés. La perte soudaine de pouvoir d’achat est à l’origine de modifications tant quantitatives que qualitatives du panier alimentaire. Soucieux de préserver une ration alimentaire minimale, les ménages peuvent être contraints de faire des économies sur les dépenses de santé et d’éducation et de vendre leurs biens de production, ce qui compromet encore davantage leurs chances de sortir de la pauvreté.

La production a augmenté principalement dans les pays développés.

Dans la plupart des pays en développement, les prix élevés des denrées alimentaires n’ont pas eu comme effet – comme ils auraient pu – de relancer l’agriculture. Les estimations de la FAO montrent que la production de céréales dans ces pays (Brésil, Chine et Inde exclus) devrait diminuer de 1,6 pour cent en 2008. Les prix élevés des intrants, le manque d’accès à l’infrastructure essentielle, à la recherche et à la technologie, et l’accès limité au crédit sont, fondamentalement, les facteurs qui expliquent que l’offre peine à réagir à la hausse des prix des denrées alimentaires dans les pays en développement.

Une approche sur deux fronts, pour remédier aux effets à court et à long termes des prix élevés des denrées alimentaires. Pour traiter les effets dévastateurs de la cherté des denrées alimentaires sur les populations les plus vulnérables et réduire la probabilité de futures crises alimentaires, il est nécessaire de prendre des mesures tant à court terme qu’à long terme. Les ménages qui sont les plus vulnérables à l’insécurité alimentaire ont besoin d’une aide d’urgence pour améliorer leur capacité d’avoir accès à des denrées alimentaires ou d’en produire. Il faut une protection sociale, mais aussi un accès suffisant aux intrants, pour que les petits exploitants augmentent leur production et leurs revenus. À plus long terme, le potentiel du secteur de l’agriculture de répondre aux prix plus élevés doit être renforcé grâce à des mesures d’amélioration de la productivité, y compris un meilleur accès aux terres et à l’eau, aux technologies, aux marchés, aux infrastructures et au crédit.

Les cours mondiaux des aliments de base et d’autres denrées alimentaires ont baissé. En septembre 2008, l’indice FAO des cours des céréales est tombé à 228 points – soit une chute de 18 pour cent par rapport au pic d’avril, mais il reste encore supérieur de 10 pour cent à celui de la même période en 2007. Cette diminution s’explique en partie par des récoltes records et des conditions climatiques favorables. Les effets de la récente tourmente financière peuvent aussi y avoir contribué. Quoi qu’il en soit, la diminution des prix des denrées alimentaires observée récemment ne saurait faire oublier, sous peine d’une grave erreur, combien il est nécessaire d’intensifier les efforts pour améliorer la productivité agricole.

Tout d’abord, les prix restent élevés sur les marchés dans de nombreux pays en développement ; en second lieu, on prévoit que la croissance démographique mondiale et la croissance socioéconomique multiplieront la demande par deux d’ici à 2050. Pour relever ces défis sans que les denrées alimentaires se renchérissent outre mesure, le rendement des céréales dans les pays en développement devra augmenter de 40 pour cent, les besoins en eau d’irrigation de 50 pour cent, et il faudra peut-être quelque 100 à 200 millions d’hectares de terres supplémentaires.

L’avenir reste incertain pour les plus vulnérables. À l’heure où la communauté internationale lutte contre les effets du renchérissement des denrées alimentaires, d’autres importants défis doivent être relevés :

la crise financière et les effets possibles sur les pays en développement d’un ralentissement économique, des conflits en cours et du changement climatique. Jamais autant qu’aujourd’hui il n’a été nécessaire de rester vigilants et de procéder à un suivi continu des pays et des populations les plus vulnérables. Il faut continuer à accorder une grande priorité, dans les activités d’aide au développement, à l’éradication de la faim dans le monde et à la promotion de la croissance de la productivité agricole.

MESSAGES CLÉS

• La faim dans le monde est en train de s’aggraver. Selon les dernières estimations de la FAO, le nombre de personnes qui souffrent de la faim est de 923 millions, soit une augmentation de plus de 80 millions depuis la période de référence 1990-92.

• La crise est imputable en grande partie à la cherté des denrées alimentaires.

La FAO estime que, entre 2003-05 et 2007, le nombre total des personnes sousalimentées a augmenté de 75 millions.

• Les personnes les plus pauvres, et les sans-terres et les ménages dirigés par une femme sont les plus durement touchés. Dans les pays en développement, l’alimentation de la très grande majorité des ménages – aussi bien urbains que ruraux – consiste essentiellement en denrées achetées, et ces personnes risquent fort de pâtir de la cherté des denrées alimentaires.

• Les mesures politiques ad hoc pour contenir les effets négatifs des prix élevés des denrées alimentaires, telles que les contrôles des prix et les restrictions imposées aux exportations, risquent fort de ne pas être efficaces ni viables à long terme. Certaines de ces mesures exacerbent l’instabilité des prix du marché.

• Les prix élevés des denrées alimentaires représentent un atout pour l’agriculture. La plupart des pays en développement n’ont pas profité de telles opportunités.

• Il faut une approche globale sur deux fronts pour remédier à l’impact des prix élevés des denrées alimentaires sur la faim : i) des mesures visant à permettre au secteur agricole de réagir aux prix élevés ; et ii) des filets de sécurité et des programmes ciblés de protection sociale au profit des personnes les plus sujettes à l’insécurité alimentaire et les plus vulnérables


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