Appel pour un nouveau système économique et social (Forum Social Mondial de BELEM)

dimanche 22 février 2009.
 

Pour un nouveau système économique et social : Mettons la finance à sa place !

La crise financière est une crise systémique qui s’inscrit dans le contexte de crises globales multiples (climatique, alimentaire, énergétique, sociale…) et d’un nouvel équilibre des puissances.

Cette crise résulte de trente ans de transferts des revenus du travail vers le capital, tendance qu’il faut inverser. Elle est la conséquence d’un système de production capitaliste fondé sur le laissez – faire et qui se nourrit de l’accumulation des profits à court terme par une minorité, des déséquilibres financiers internationaux, de la répartition inégale des richesses, d’un système commercial injuste, de la perpétration et l’accumulation de dettes irresponsables, écologiques et illégitimes, du pillage des ressources naturelles et de la privatisation des services publics. Cette crise frappe l’humanité dans son ensemble, à commencer par les plus vulnérables (les travailleurs, les chômeurs, les paysans, les migrants, les femmes…) et les pays du Sud, qui sont victimes d’une crise dont ils ne sont en rien responsables.

Les moyens utilisés pour sortir de la crise se limitent à socialiser les pertes en vue de sauver, sans réelle contrepartie, le système financier à l’origine du cataclysme actuel. Où sont les moyens pour les populations qui sont victimes de la crise ? Le monde n’a pas seulement besoin de régulations, mais d’un nouveau paradigme qui ramène la sphère financière au service d’un nouveau système démocratique fondé sur la satisfaction de tous les droits humains, le travail décent, la souveraineté alimentaire, le respect de l’environnement, la diversité culturelle, l’économie sociale et solidaire et une nouvelle conception de la richesse. C’est pourquoi nous demandons de :

• Mettre les Nations unies, réformées et démocratisées, au cœur de la réforme du système financier, car le G20 n’est pas un forum légitime pour apporter les réponses adéquates à cette crise systémique.

• Etablir des mécanismes internationaux, permanents et contraignants, de contrôle des mouvements de capitaux.

• Mettre en œuvre un système monétaire international fondé sur un nouveau système de réserve et incluant la création de monnaies de réserve régionales, afin d’en finir avec la suprématie du dollar et d’assurer la stabilité financière internationale.

• Mettre en œuvre un mécanisme global de contrôle public et citoyen des banques et des institutions financières. L’intermédiation financière doit être reconnue comme un service public garanti à tous les citoyens du monde et doit être sortie des accords commerciaux de libre échange.

• Interdire les fonds spéculatifs et les marchés de gré à gré, sur lesquels sont échangés les produits dérivés et autres produits toxiques hors de tout contrôle public.

• Eradiquer la spéculation sur les matières premières, à commencer par les produits alimentaires et énergétiques, par la mise en œuvre de mécanismes publics de stabilisation des prix.

• Démanteler les paradis fiscaux, sanctionner leurs utilisateurs (individus, compagnies, banques et intermédiaires financiers) et créer une organisation fiscale internationale chargée d’enrayer la concurrence et l’évasion fiscales.

• Annuler la dette insoutenable et illégitime des pays appauvris et établir un système responsable, démocratique et juste de financement souverain au service du développement durable et équitable.

• Etablir un nouveau système international de répartition des richesses par la mise en œuvre d’une fiscalité plus progressive au niveau national et par la création de taxes globales (sur les transactions financières, sur les activités polluantes et sur les grosses fortunes) pour financer les biens publics mondiaux.

Nous appelons les associations, les syndicats et les mouvements sociaux à converger pour créer un rapport de force citoyen en faveur de ce nouveau modèle. Nous les appelons à multiplier les mobilisations partout dans le monde, notamment face au G20, dès le 28 mars 2009.

Signatures des organisations et liste de signataires à www.choike.org/gcrisis ou signatures par email à finance@eurodad.org (nom de l’organisation, pays, contact email).

Proposition de Yifu LIN, économiste en chef de la Banque mondiale

Le lundi 9 février 2009, l’économiste en chef de la Banque mondiale, Justin Yifu Lin, a lancé : "Il faut que nous soyons plus imaginatifs. Et j’aimerais proposer un plan mondial de reprise dans l’esprit du plan Marshall".

Il propose "que les pays à revenus élevés, emmenés par les Etats-Unis et les pays riches en réserves comme la Chine et les pays exportateurs de pétrole, rassemblent 2 000 mds de $ dans les cinq années à venir, c’est-à-dire environ 1 % du PIB des pays riches, pour aider les pays pauvres à participer au plan de relance budgétaire coordonné mondial". Pour appuyer son propos, il a ajouté "Nous prévoyons toujours une reprise économique en 2010 ; il y a cependant beaucoup, beaucoup d’incertitudes. Le risque de ne pas atteindre ces prévisions est vraiment élevé".

La Banque mondiale reste la Banque mondiale bien entendu, mais les personnalités que l’on y rencontre ne sont pas parfaitement interchangeables même si elles partagent bien des traits communs. Ce n’est pas la première fois que Monsieur Lin fait des déclarations quelque peu iconoclastes au sein de la banque. Cependant, on est en droit de demander à Monsieur Lin, pourquoi s’arrêter en si bon chemin. Pourquoi donc seulement, en effet, 400 milliards annuels ? Pourquoi donc adresser cette demande vertueuse "aux pays riches", gommant ainsi les classes sociales et les responsabilités respectives de celles-ci ? Il ne peut pas ne pas savoir que toutes les demandes de cette nature ont, toutes, depuis le début des années 1960, échoué. Pourquoi donc ne pas sortir des inscriptions budgétaires, volontaires et nationales, quand on sait leur "rendement" ? Pourquoi donc ne pas choisir la seule méthode éprouvée partout à travers le monde, tout au long de l’histoire, la voie fiscale ?

La seule méthode efficace, si tant est que l’on vise autre chose qu’un effet d’annonce, ce sont bien les taxes globales. Elles ont l’avantage de s’inscrire dans un processus de coopération au contraire de la compétition si mortifère du système capitaliste. Elles mobilisent les ressources de ceux qui en disposent, en premier lieu les propriétaires du capital qui ont vu, ces vingt dernières années, leurs revenus croître considérablement pendant que la taxation qui leur était appliquée, diminuait. Elles sont en mesure de collecter des montants sensiblement supérieurs aux 400 milliards évoqués par Monsieur Lin. Les propriétaires du capital n’en veulent pas, certes. Mais, on se demande pourquoi le mouvement altermondialiste, unanime, ne s’empare pas de cette revendication. Comment se fait-il que le Forum de Belem ait été plus modeste encore que l’économiste en chef de la Banque mondiale ?

Jacques Cossart


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