Nationalisations : Maîtrise économique et politique (par un militant PCF)

mardi 2 décembre 2008.
 

La question de l’abolition de la propriété privée des moyens de production et de leur appropriation sociale, qui est capitale, a été délaissée par notre parti au profit d’un management confus voire illisible particulièrement depuis l’échec des nationalisations de 1981, dans lesquelles le mode de gestion capitaliste n’a nullement été remis en cause. L’état a été assimilé à l’étatisation bureaucratique particulièrement en réaction aux expériences négatives des pays de l’est, ce que certains ont appelé à tort « le socialisme réel » ajoutant encore à la confusion.

Le caractère éminent de la propriété d’état sous contrôle démocratique, notamment dans la réalisation de la planification, a été remplacé par celle des collectivités territoriales ou telle ou telle participations des salariés ou des usagers au capital. La primauté a été donnée à la gestion comme une solution moderne sur la nationalisation et la propriété publique. La privatisation d’Air France avait par exemple été présentée par le ministre Gayssot comme une « appropriation sociale » en raison de l’acquisition de près de 10 % du capital par les salariés.

Cette perte de repères et cette édulcoration de notre programme ont été sévèrement jugés par les couches de travailleurs les plus conscients et les plus acquis à la lutte pour le socialisme, et c’est là une des causes du déclin électoral et organisationnel de notre parti.

Notre congrès est à la croisée des chemins. Notre parti ne retrouvera la place qui lui revient sur l’échiquier politique qu’en revenant à un programme de lutte pour le socialisme apte à être porté par les travailleurs et la jeunesse. Notre peuple a besoin d’un parti communiste porteur d’un véritable projet communiste. Dans une situation comme celle que nous connaissons, les choses peuvent bouger très vite et notre parti ne saurait être absent de ces nouveaux rendez-vous de l’histoire.

Un exemple, un seul, de la pourriture de ce système décadent : Avec le plan de secours des banques concocté sur le dos des travailleurs, c’est entre 4000 et 6000 milliards d’euros de fonds publics qui vont être sacrifiés au profit des capitalistes soit 1700 milliards en Europe. 4000 à 6000 milliards d’euros pour sauver-temporairement- le système alors qu’il ne faudrait que 65 milliards d’euros pour assurer le programme alimentaire mondial, relancer l’agriculture des pays les plus touchés, et empêcher 800 millions à 1 milliard d’être humains de mourir prochainement de faim. (on pourrait aussi mettre cette somme en parallèle avec le supposé déficit de la sécurité sociale de 8,6 milliards en 2009)

Il ne sera pas possible d’en finir avec la régression sociale tant que les capitalistes conserveront la maîtrise des banques et des moyens de production. Notre parti doit absolument faire de la nécessité de mettre fin au pouvoir économique des capitalistes l’axe central de son programme en revendiquant la nationalisation - ou « socialisation », si l’on préfère - de l’ensemble du secteur bancaire, des compagnies d’assurance, des grandes entreprises de l’industrie, de l’agroalimentaire, des services et de la distribution.

La nationalisation est la seule revendication concrète qui possède une cohérence fondée sur l’appropriation publique des moyens de production et d’échange, la gestion démocratique et décentralisée du secteur public, et la planification démocratique de l’économie.

Le socialisme (je suppose que nous nous battons toujours pour le socialisme ?) se fixe pour objectif de remplacer les forces aveugles de la concurrence et de l’exploitation capitaliste qui ont conduit la société au marasme actuel par une planification rationnelle de l’économie soumise au contrôle et à la gestion démocratique des travailleurs, à tous les niveaux.

Les idées du socialisme n’ont rien d’utopistes. En les exprimant, je n’ai nullement le sentiment d’être un dinosaure rescapé d’un « monde perdu »En fait, les véritables utopistes sont ceux qui s’imaginent qu’il est possible d’en finir avec le chômage, la pauvreté, la destruction de l’environnement sans mettre fin au système qui en est la cause ou en essayant de s’en accommoder, de l’humaniser, pourquoi pas de le métamorphoser lui aussi, puisque le mot est à la mode.

La planification démocratique de l’économie ne peut se concevoir sans nationalisation et centralisation étatique, même si cet état est démocratique et si le processus associe largement les instances régionales afin d’orienter l’économie non en fonction des intérêts particuliers mais des priorités sociales. Il s’agit de changer les critères de production et de gestion en orientant l’économie en fonction des besoins au-delà des critères de gestion capitaliste et en assurant la socialisation du travail.

La réalisation du socialisme dans un pays comme la France, surtout à notre époque, se ferait dans des conditions matérielles infiniment plus favorables que toutes les expériences passées et aurait un énorme retentissement en Europe et dans le monde. Le niveau actuel de développement des forces productives, avec une productivité du travail très élevée et l’écrasante prépondérance du salariat qui en résulte, font que l’appropriation sociale de ces moyens de production permettrait une amélioration rapide et importante du niveau de vie de la masse de la population, à commencer par les couches sociales les plus pauvres.

Le socialisme se servira de la technologie à un degré infiniment plus élevé que le capitalisme, en mettant fin aux énormes gaspillages engendrés par l’anarchie systémique de la production, afin de libérer le plus possible l’humanité, tout en assurant les conditions de son élévation culturelle et la disparition de la famine sur l’ensemble de la planète.

En résumé, je propose au congrès d’amender le projet sur la base des éléments que je viens d’évoquer afin de ramener les nationalisations au coeur de notre projet politique.

Cette question et la lutte pour le socialisme seront dans la période à venir la seule alternative sérieuse pour les travailleurs en France, en Europe, et dans le monde, exactement comme elle est à l’ordre du jour, dès à présent, au Venezuela et en Bolivie.

Marco


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message