Les boliviens disent "oui" à Evo Morales

samedi 16 août 2008.
 

Dimanche dernier, les boliviens étaient appelés aux urnes pour voter pour ou contre le maintien du président Evo Morales, ainsi que des préfets de région. Le 8 mai 2008, les députés de l’opposition avaient proposé ce référendum, et le 12, l’Assemblée Nationale votait une loi validant la proposition et convoquant le premier référendum du genre en Bolivie. Après dépouillement, 63% des boliviens ont approuvé la présence d’Evo Morales à la tête de l’Etat et sa politique marquée par la récupération des entreprises publiques et des ressources naturelles (nationalisation des hydrocarbures le 1er mai 2006, opposition à la privatisation de l’eau), par des lois sociales avec la mise en chantier d’une nouvelle Constitution (instaurant notamment des droits aux communautés indigènes), et par la lutte contre les stratégies impérialistes nord-américaines.

Sa politique est également marquée par la volonté de conserver l’unité du pays, à laquelle s’opposent ses puissants opposants, essentiellement localisés dans la "medialuna", entre les riches provinces de Santa Cruz, Tarija, Pando et Beni. Sous couvert d’autonomie, ceux-ci demandent l’indépendance, ce qui implique bien entendu la conservation des richesses dans la région (hydrocarbures notamment), et non une simple décentralisation : cette confusion est souvent utilisée volontairement par les détracteurs de la politique de gauche de Morales, qui en profitant de la complexité de la politique de décentralisation, font le procès d’un soit disant "caudillo narcissique" et autoritaire (1) . Et ce, en Bolivie, comme dans certains journaux français à grand tirage.

Cette stratégie "indépendantiste" des régions à hauts intérêts économique a déjà été appliquée et/ou soutenue plusieurs fois en Amérique Latine par les intérêts financiers et politiques étrangers : par exemple la région pétrolière de Zulia au Venezuela pour priver le gouvernement d’Hugo Chavez de ressources, et plus antérieurement, le Panama, séparé de la Colombie en 1903 pour garantir le contrôle des USA sur le canal.

Toujours est-il que Morales a déclaré aujourd’hui qu’"il lui restait encore deux ans et demi et qu’il voulait en finir avec la pauvreté". Celui-ci a également affirmé qu’"il ne fallait pas croire qu’il y aurait dans le pays un dialogue entre les préfets de la medialuna, mais un dialogue avec les mouvements sociaux et syndicaux" faisant référence aux incidents suite à la grève générale lancée par la centrale syndicale COB pour les retraites (la proposition de Morales était trop libérale) où il a fallu malheureusement la mort de mineurs dans des affrontements avec la police juste avant le référendum pour que le gouvernement négocie. Cet évènement montre les contradictions présentes dans ce gouvernement qui devra avancer rapidement vers des réformes sociales promises, vers l’extension de la propriété publique, la lutte contre les dispositifs néo libéraux mis en place précédemment et surtout dans le contrôle populaire. Le peuple bolivien est un peuple organisé et combatif qui doit rapidement trouver son intérêt dans ce jeune processus.

Malgré cette victoire importante au référendum, les équilibres semblent maintenus, puisque les préfets de la dite médialuna ont également obtenu la majorité des votes approuvant leur maintien, si ce n’est deux opposants à Morales : Jose-Luis Paredes à La Paz et Manfred Reyes Villa à Cochabamba. A l’image de la réaction de ce dernier, le refus de se soumettre au vote populaire, défiant ainsi Moralès de "porter atteinte à la démocratie" en nommant un autre préfet, la situation en Bolivie semble toujours dominée par un rapport de force violent, deux jours seulement après l’exercice par le peuple de son droit de participation au fonctionnement démocratique du pays.

Ce processus de référendum révocatoire fait écho à celui auquel l’opposition vénézuelienne a soumis, sans succès non plus, Hugo Chavez le 15 Août 2004. L’article 72 de la constitution bolivarienne ainsi que l’article 241 du projet de constitution bolivienne offrent, à mi-mandat, ce droit aux électeurs. La LCR s’est toujours battue pour la révocabilité de tous mandats électifs, cette disposition n’existant pas dans la constitution française : c’est donc un droit à conquérir ...Et pourquoi ne pas y soumettre notre si populaire président ?


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