CONTRE LA RATIFICATION DU TRAITE D’AMSTERDAM : Explication de vote de Alain BOCQUET, député du Nord, président du groupe communiste

lundi 9 mai 2005.
 

3 mars 1999

Monsieur le Président,

Messieurs les Ministres,

Mesdames, Messieurs,

L’Assemblée nationale s’apprête à ratifier le Traité d’Amsterdam. L’issue du scrutin ne fait en effet aucun doute, puisque le gouvernement est assuré de trouver une majorité sur tous les bancs de notre assemblée. Et ce n’est pas là le moindre des paradoxes !

Certes, le Traité d’Amsterdam n’est que la suite logique du Traité de Maastricht, lui-même suite logique de l’Acte unique européen, suite de bon nombre de Conférences intergouvernementales, le tout à la suite du Traité fondateur de Rome. L’alternance politique en France a fait que les gouvernement successifs ont poussé les feux de l’intégration au nom de cette continuité.

Pendant tout ce temps, la société française s’est radicalement transformée. Le chômage, la précarité et la misère se sont développées dans des proportions considérables, à la mesure de l’explosion, en parallèle, des profits financiers.

Les françaises et les français vivent dans leur majorité plus difficilement, et les jeunes générations vivent désormais plus mal que leurs aînées.

Un des phénomènes marquant est sans doute l’irruption de la citoyenneté, s’exprimant comme une demande de plus en plus forte de démocratie à tous les niveaux.

Comment, en effet, ne pas voir cette aspiration grandissante des peuples, du nôtre en particulier, à voir leurs attentes prises en compte ?

Comment ne pas répondre à leur volonté que la construction européenne soit élaborée et décidée avec eux ?

En esquivant ces interrogations fondamentales, l’on prive assurément les citoyens et les peuples d’Europe de véritables projets qui soient porteurs d’espérance.

Monsieur le Président de la République regrettait, hier, dans son adresse aux députés, que "les peuples ne se sentent pas assez concernés par la construction de l’union européenne". Alors pourquoi a-t-il refusé obstinément de consulter les français par référendum. Cela aurait pourtant été le bon moyen démocratique d’y contribuer.

Monsieur CHIRAC n’a donc pas permis que se déroule le grand débat national qu’exigeait la ratification du Traité d’Amsterdam. Ainsi, va-t-on aboutir à la ratification en catimini d’un très mauvais traité que l’Histoire jugera peut-être un jour comme étant le produit mort-né d’un mécanisme institutionnel aux rouages décidément bien grippés.

Les députés communistes ne craignent pas, quant à eux, la confrontation d’idées sur l’Europe. Au contraire, nous l’appelons de tous nos vœux et souhaitons que chacune et chacun puissent y participer et s’emparer des projets de gauche novateurs et porteurs d’avenir pour tous.

Dans leurs interventions, mes amis Robert HUE, Jean-Claude LEFORT et Guy HERMIER ont eu l’occasion de réaffirmer notre choix, notre volonté, notre projet européen.

Après eux, je voudrais revenir succinctement sur quelques uns des aspects de notre ambition euroconstructive pour l’Europe.

Les députés communistes qui sont européens, sont naturellement pour l’Europe, pour la construire sans réticences ni arrière pensées.

En nous engageant dans cette construction, nous appelons une Europe conçue comme un espace moderne de co-développement de nations décidant souverainement de partager leurs efforts et leur destin, capable d’affronter positivement les défis contemporains.

Europrogressistes, nous combattons les politiques, les choix ultralibéraux que l’on voudrait nous imposer, afin de promouvoir d’autres choix qui permettent d’avancer vers l’Europe sociale, l’Europe du progrès humain, de l’égalité, d’une citoyenneté élargie et reconnue, vers une Europe réellement solidaire et pacifique.

C’est le sens de notre proposition de renégocier le pacte de stabilité pour lui substituer un pacte pour l’emploi et la croissance.

De la même façon, nous souhaitons parmi d’autres mesures que soit instauré un SMIC européen de 1000 EUROS et la réduction à 35 heures de la durée du travail, sans perte de salaire.

Pour être des artisans actifs sinon volontaristes d’un tel projet, il faut être à l’écoute des citoyens, de leurs inquiétudes et de leurs aspirations. En même temps, le changement en France n’est pas conditionné à l’attente d’une évolution en Europe, car cela serait par trop hypothétique.

C’est en permettant aux citoyens d’être partie prenante de la politique européenne de la France que nous rendrons l’Europe aux citoyens. Nous pourrions y contribuer en inscrivant le principe du référendum dans la Constitution avant toute ratification d’un traité. De même, un renforcement des pouvoirs du Parlement européen, notamment le pouvoir de contrôle des institutions, rapprocherait l’Europe de l’ensemble des citoyens.

Cette Europe des nations solidaires que nous appelons pourra sur cette base s’élargir, car comment s’élargir sans ce grand dialogue entre nos visions, nos histoires et nos cultures, sans cet enthousiasme en faveur de la liberté et du progrès humain ?

Une telle Europe, qui sera forte, ne sera pas alignée sur les Etats-Unis d’Amérique ou sur un modèle ultralibéral prônant une mondialisation de la guerre économique.

Le Traité d’Amsterdam entérine une telle logique libérale et c’est pourquoi nous le combattons comme nous nous sommes résolument opposés au Traité de Maastricht.

Le pouvoir appartient au peuple et à lui seul. Il n’appartient pas à notre Assemblée de voter, au lieu et place de notre peuple que l’on refuse de consulter, le transfert d’un pan entier de notre souveraineté nationale au profit des institutions communautaires.

Ceux qui s’apprêtent à apporter leur soutien au Traité d’Amsterdam sont dans le doute plus que dans l’espérance, ce sentiment est bien réel.

En cohérence avec leur choix europrogressiste, les députés communistes voteront contre ce projet de loi d’un autre âge.


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