Comme une épidémie de grèves pour l’augmentation des salaires

mercredi 27 février 2008.
 

Les caisses de l’Etat sont vides ? Qu’à cela ne tienne : certains salariés français du privé ont décidé de prendre le problème du pouvoir d’achat à bras le corps en faisant grève. Avec un certain succès, note Le Temps.

"Cent trente euros pour tout le monde ! Cent trente euros pour chacun !" Le slogan hurlé la semaine dernière devant le siège du groupe Prisma Presse s’est avéré aussi simple qu’efficace. Après quelques jours de grève, l’éditeur des magazines people Gala et Voici a accepté d’augmenter ses employés d’au moins 100 euros par mois pour les salaires les plus bas.

Le cas de Prisma Presse est loin d’être isolé. Ces derniers jours, des salariés réclamant de meilleures rémunérations se sont mis en grève chez le fabricant des cosmétiques L’Oréal et le distributeur Carrefour. Une société de transport bordelaise, GT Logistics, a même tenté d’enrayer un mouvement analogue en proposant une prime de 1 000 euros aux employés qui renonceraient à cesser le travail. Une nouvelle grève nationale dans la grande distribution - la première a eu lieu le 1er février - a été annoncée pour le week-end de Pâques.

En France, les salaires du privé n’ont augmenté que de 0,5 % par an entre 2000 et 2005. Mais cette ère de rigueur touche peut-être à sa fin. "Ce qui est nouveau, avec les grèves des derniers jours, c’est qu’elles touchent le secteur privé", souligne l’économiste Nicolas Bouzou, et non plus les bastions syndicaux du secteur public. Des branches peu connues pour leur combativité, comme la presse magazine ou les supermarchés, ne sont pas épargnées.

Le contexte politique explique en partie cette flambée de revendications. Pendant la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy avait dénoncé "un gigantesque problème de pouvoir d’achat" et promis qu’il œuvrerait à son "augmentation". D’aucuns en ont déduit que l’Etat décréterait une hausse générale des salaires. Ce n’est pas le cas, et ce malentendu explique à la fois la chute du président dans les sondages et le fait que certains employés se soient mobilisés au sein de leur entreprise.

Mais des forces économiques sont aussi à l’œuvre. Les produits alimentaires ont subi des hausses massives en janvier - jusqu’à 10 % pour les pâtes et les œufs - et le prix de l’essence a fortement augmenté. Certains ménages, notamment les couples avec enfants de la classe moyenne, ont vu leur pouvoir d’achat diminuer (selon les statistiques officielles, il aurait globalement augmenté de 3 % l’an dernier). Enfin, l’annonce d’une hausse de 40 % des rémunérations des patrons du CAC 40 l’an dernier - chiffre extrait d’une étude de La Tribune - n’a rien fait pour calmer les esprits. "En tant qu’économiste libéral, je comprends que les caissières soient écœurées", commente Nicolas Bouzou.

Reste une question : les salaires peuvent-ils réellement augmenter ? En France, la moitié des employés gagnent moins de 1 528 euros par mois. Les grandes entreprises, qui ont engrangé des profits confortables en 2007, ont les moyens de mieux payer leurs salariés. Dans les PME, en revanche, seule une amélioration des perspectives de croissance pourrait changer la donne.

Pour sa part, le gouvernement français compte sur la conversion des stocks d’heures supplémentaires en argent comptant, la poursuite de la baisse du chômage et la réforme engagée du marché du travail pour faire repartir les salaires à la hausse dans les mois qui viennent.

Sylvain Besson

Le Temps


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