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À Paris, le « taiseux » nouveau premier ministre est devenu bavard. Dans « Le Parisien ». Et il a bien trimballé les nigauds. Il ne leur donnera rien. De l’espoir non plus, car il dit renoncer à débaucher des candidats ministres dans des groupes politiques qui ne soutiendraient pas le gouvernement. Adieu veau, vache, et volaille à plumer pour Brun et Guedj par exemple. Sans mépriser les autres prêts à se dévouer et sacrifier pour la « stabilité » et « le budget » (prononcé d’un air profond : « la France a besoin d’un budget »). Le mercredi, les syndicats sont ressortis bredouilles et ont appelé à une nouvelle journée d’action le 2 octobre, ce qui est proche. On y sera tous à gauche j’espère.
La semaine fut vraiment celle de la fin d’un monde. Macron président français reconnaissant l’État palestinien tout en bafouillant un argumentaire de restrictions hors sol, Netanyahu sifflé et boycotté devant l’ONU, Trump parlant comme un crow boy au reste du monde considéré comme son bétail, quel tableau. « L’Occident » finit sa course de domination avec des visages répugnants de grossièreté et d’isolement mondial. Mais le fond est là : la déroute de Netanyahu est consommée au plan mondial, l’isolement est total, la débandade dans les communautés du monde est engagée car trop c’est trop pour un nombre croissant de monde qui ne veut pas voir ces crimes commis en leur nom.
À l’ONU, le coup de com de Macron n’aura pas duré vingt-quatre heures. Il a été brisé par la force de l’accueil huant à Netanyahu, le discours écrasant de Gustavo Petro président de Colombie, le ridicule du discours de Trump. Depuis, le tableau s’est encore bien dilué dans le vide avec le déploiement des navires de guerre de l’Italie et de l’Espagne et l’inertie grotesque de la France doublée du communiqué du quai d’Orsay infantilisant les embarqués de la flottille.
J’ai vu aussi la France de l’extérieur dans les moments libres entre mes activités. C’est presque pire que de l’intérieur. J’ai mal vécu l’ignominie ordinaire dans laquelle croupissent les Français quand Macron regarde ailleurs tandis que des députés français sont bombardés dans les eaux internationales. Comptons donc plutôt sur les militaires italiens ou espagnols pour défendre nos députés agressés en mer par l’armée de Netanyahu, toujours en première ligne pour agresser des gens désarmés. Vu sous cet angle, la France fait honte. Ici, tout le monde à Madrid rigolait à propos de Macron bloqué dans les rues à New York et terminant son trajet à pied après avoir téléphoné à son pote Trump qui lui a mis un vent public. Une rigolade qui m’a cuit, même si vous savez ce que je pense de ces présidents. Et quand notre grand stratège qui veut étendre le parapluie nucléaire à l’Allemagne et à la Pologne est incapable de se faire respecter par la milice immorale de Netanyahu, cela me cuit tout autant.
Toute la soirée, les militants embarqués échangeaient avec notre boucle centre dédiée pour soupeser les risques encourus. Une ambiance étrange s’est répandue et j’enrageais pensant aux navires français qui nous manquaient et qui auraient été si glorieux devant le monde à l’heure où il est devenu si attentif à cet instant de honte pour Netanyahu. Car le moment est bien là où l’on peut et doit multiplier les offensives pour compléter l’isolement et le discrédit de cette extrême droite israélienne au pouvoir à Tel Aviv. Mais aussi cette Knesset qui a voté l’annexion des territoires occupés. Et tous les voyous qui nous ont agressés sous toutes les formes possibles depuis deux ans. Pour ces criminels directs et indirects qui ont massacré ces dizaines de milliers de civils désarmés. La pauvreté des arguments contre la reconnaissance de l’État de Palestine, la rareté des intervenants, les premiers dédits publics, soulignaient bien l’isolement des négationnistes du génocide. Sans oublier le lâchage d’Olivier Faure au plus mauvais moment, et davantage encore l’ample débandade de leurs réseaux et tête de pont après des mois de pilonnage, des millions dépensés à payer de la pub, des faux comptes et des marionnettes politiques pour rabâcher leurs éléments de langage. La victoire politique et morale est totale.
Peut-être l’avez-vous su ? J’étais à Madrid de mardi à jeudi soir. Je présentais mon livre « Maintenant le peuple » qui vient d’être traduit en espagnol d’Espagne. Cette traduction s’ajoute à celle qui a été faite par les Mexicains de l’institut culturel à l’usage de l’Amérique latine. Avec celle en anglais et en italien, c’est la quatrième traduction de « Faites mieux ». La traduction allemande est achevée et sera bientôt à son tour éditée. Deux universités, la Complutense l’Université autonome de Madrid, une faculté de journalisme, une fondation marxiste ainsi que la revue Viento Sur m’avaient invité ici à Madrid. Je savoure. Ce n’est pas comme à Lille ou à Bordeaux où l’on m’a interdit de venir pendant le génocide sous la pression de l’extrême droite ou de la droite. Les lâches ne sont pas partout au pouvoir dans les universités. Même si en effet le modèle se répand à la suite des USA trumpistes. Ce fut un bonheur d’y avoir rencontré tant de jeunes esprits, d’intellectuels, de gens de l’édition que la réflexion théorique, accroche, intéresse ou même passionne. Même si d’évidence la pensée de gauche et ses capacités de mobilisation sont aujourd’hui bien faibles dans la jeunesse universitaire.
Je figure comme un cas un peu étrange : un responsable politique au 21ème siècle qui théorise dans les termes du matérialisme historique ! Quoi ? L’action politique ne se réduit donc pas à la communication ? Les médias nationaux espagnols me paraissent moins orduriers que les nôtres. Je ne parle pas de « El Païs » le cousin du « Monde » qui est à mon sujet le même genre de gargouille bouffie que la bourgeoisie faites journal chez nous. Mon entretien avec le grand quotidien « El Diario » fut exigeant mais courtois, piquant mais sans venin.
Nous étions au lendemain de la plénière à l’Assemblée Générale de l’ONU. Ici on commentait beaucoup le discours prononcé par le roi Phillipe VI. Il demandait au nom de l’Espagne la fin du « massacre à Gaza ». Quelques réactionnaires se félicitaient qu’il n’ait pas prononcé le mot « génocide ». Telle est cette droite. Elle assume la chose mais non le mot qui la désigne. Et cela jusqu’à l’absurde ! Car se satisfaire d’être accusé de massacre ne paraît pas si enviable pour une personne décente. Le matin suivant, je rencontrais Yolanda Diaz, vice-présidente du gouvernement espagnol, membre de « Sumar », coalition de diverses gauches radicales alliées au Parti socialiste. Son gouvernement venait de décider d’envoyer comme l’Italie un navire de guerre escorter la flottille pour Gaza. Le soir même, le premier ministre annonçait aussi la décision d’embargo sur les armes à destination ou en provenance d’Israël. Et le jeudi, comme l’Italie de nouveau, il passa à deux navires de guerre autour de la Flottille. En effet, les informations venues des milieux diplomatiques étaient sombres et angoissantes après l’attaque aérienne de l’avant-veille. L’ONU avait protesté et demandé une enquête. Yolanda Diaz a l’honneur de s’être vu interdire à deux reprises l’entrée en Israël. Elle n’est pas journaliste à « L’Express » ni au « Journal du dimanche » par exemple. La présidence européenne, affichant sa vassalisation complète aux USA ne souffla mot. Qu’est ce que la vice-présidente de la quatrième économie du continent pour elle si Netanyahu doit se fâcher ?
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