« Les socialistes et le marché » Texte de la direction présenté par Harlem Désir 3 Pour une économie de marché écologique et sociale

lundi 14 janvier 2008.
 

Il y a longtemps que les socialistes français, comme les autres socialistes et sociauxdémocrates en Europe, ont accepté d’agir dans le cadre de l’économie de marché. Avec souvent de meilleurs résultats que les gouvernements libéraux ou conservateurs en matière de croissance, de création d’emploi et de réduction des déficits, comme ce fut le cas notamment en France avec le dernier gouvernement socialiste que le pays ait connu, celui de Lionel Jospin.

Il peut donc sembler étrange de reposer aujourd’hui encore la question de notre rapport au marché. Et pourtant, force est de constater que les socialistes ne semblent toujours pas au clair sur ce point.

Il faut essayer de comprendre pourquoi.

1 - On peut d’abord souligner que les socialistes sont, sur ce plan, à l’image des Français, qui, se distinguent de façon spectaculaire de la plupart des autres nations.

A la question posée : « le système de libre entreprise et de libre marché est-il le meilleur sur lequel fonder le futur du monde », les Allemands répondent qu’ils sont d’accord à 65 % (contre 32 % qui sont en désaccord), les Britanniques à 66 %, les Espagnols à 63 %, les Brésiliens à 57 %, les Kenyans à 59 %, les Américains à 71 %, et les Chinois à 74 % ; tandis que les Français ne sont que 36 % à approuver cette affirmation, 50 % étant en désaccord. (Sondages effectués dans 20 pays, auprès de 20 000 personnes, coordonnés par l’Université du Maryland. Ces résultats recoupent d’autres données de l’Eurobaromètre, ou les études d’opinion du German Marshall Fund).

2 - Deuxième raison, l’histoire, bien sûr, qui a laissé sa trace.

Les socialistes ont longtemps partagé avec les communistes, dont ils ne se sont séparés, au départ, que sur des questions de démocratie et de relation à l’Union soviétique, l’objectif d’un changement radical du mode de production et de construction d’une économie socialiste.

Pendant des décennies, les socialistes se sont proclamés « révolutionnaires et marxistes » ; ils disaient vouloir « abolir la propriété privée des moyens de production et d’échange ». (On pourrait chercher les racines de cette défiance française : la part qui revient à la culture égalitariste républicaine, celle qui est liée à la culture de la terre et à une économie longtemps tournée vers elle-même, par opposition aux nations maritimes et commerçantes, etc)

La déclaration de principe du Parti socialiste adoptée à Epinay affirmait qu’« il ne peut exister de démocratie réelle dans la société capitaliste ». Le Parti socialiste revendiquait la supériorité du Plan sur le marché. Le mot d’ordre dans les années 70 était « nationalisation, planification, autogestion » et le programme commun prévoyait « la socialisation des pôles dominants de l’économie ». Il ne s’agissait pas d’améliorer un système, mais de lui en substituer un autre, par la « rupture », non pas seulement avec les présidences précédentes, mais avec le capitalisme lui-même. Le Parti socialiste français, parti d’élus, bien davantage que parti de masse à large assise ouvrière comme d’autres partis sociaux-démocrates, a-t-il cherché à compenser cette faiblesse historique dans sa compétition avec le parti communiste par une suridéologisation de son discours sans lien avec sa politique réelle ? C’est bien possible et la SFIO de Guy Mollet est souvent tombée dans ce travers.

L’exercice du pouvoir entre 1981 et 1986, puis entre 1988 et 1993, sera pragmatique et aidera à tourner cette page. Dans les faits d’abord, dès 1982 (malgré les nationalisations), puis, progressivement, dans les discours. Dans les années 80, François Mitterrand et Pierre Mauroy parlent d’économie mixte ; Michel Rocard fait du plan un instrument indicatif ; Laurent Fabius s’attelle à la modernisation des entreprises publiques et parachève l’Acte Unique qui consacre le grand marché, préparé par Jacques Delors, président socialiste de la Commission européenne. Avec François Mitterrand, les gouvernements socialistes font le choix de l’Europe. Le second septennat de François Mitterrand est marqué par le « ni ni » et la nonrenationalisation des entreprises privatisées. La négociation et la ratification du traité de Maastricht ouvrent la voie au passage à l’euro, réalisé sous le gouvernement de Lionel Jospin, avec Dominique Strauss-Kahn, puis Laurent Fabius au ministère des Finances.

Mais, contrairement à la révision doctrinale explicite, assumée et précoce du SPD (1959) ou d’autres (les Suédois dès 1933, les Espagnols en 79), le Parti socialiste français aura procédé à un Bad Godesberg, étalé, tardif, longtemps implicite et finalement « discret ».

Cet aggiornamento à reculons, n’aura jamais été pleinement assumé, ni véritablement expliqué aux Français.

C’est évidemment une grave lacune car un parti doit savoir s’adapter aux réalités quand elles changent, aider la société à les voir et les comprendre pour pouvoir proposer des voies adéquates au changement. Ce n’est qu’au Congrès de Rennes en 1990 qu’est révisée la déclaration de principe et à celui de l’Arche en 1991 qu’est engagée une révision doctrinale, dans une relative indifférence. En 1999, Lionel Jospin explicite le nouveau rapport des socialistes au marché dans une formule, retenue depuis par le Parti socialiste européen : « Nous sommes pour l’économie de marché et contre la société de marché ».

Et pourtant, les socialistes donnent encore, parfois, le sentiment d’un malaise et d’une acceptation par défaut seulement des réalités du marché. Comme si persistait un remords, une nostalgie de l’ancien paradigme de supposée supériorité de la propriété publique et de la production d’Etat, sur l’économie de marché. Est-ce la conséquence d’une critique inachevée, parce qu’insuffisamment assumée, des défaillances de l’économie étatisée ? Sans doute, mais ce sont plus sûrement les profondes transformations du marché mondialisé qui ont réouvert l’ère du soupçon entre les socialistes et le marché.

3- Troisième raison, donc, le bouleversement des rapports entre le marché et la société à l’heure de la mondialisation.

En France, comme ailleurs en Europe, les socialistes se sont accommodés du marché sur la base des compromis sociaux négociés après guerre, dans le cadre d’économies industrielles et nationales, et qui ont posé les fondements de l’Etat providence. Tout en ne renversant pas l’ordre capitaliste, les syndicats et les forces politiques de gauche ont arraché progressivement un ensemble de contreparties et d’avancées sociales considérables pour le monde du travail (droit du travail, progressions salariales, sécurité sociale, services publics, etc.). Celles-ci sont devenues constitutives tant du modèle de société de l’Europe de l’Ouest, que de son économie capitaliste spécifique, reposant à la fois sur le marché, un compromis salarial fordiste, un Etat social garant de transferts sociaux massifs, un haut niveau de services publics et d’investissements publics. Ce fut le soubassement de la croissance continue des Trente glorieuses.

Les mutations du capitalisme, sa mondialisation et sa financiarisation, ont ébranlé les assises de ce compromis. Ces changements se sont également accompagnés d’une offensive idéologique « néolibérale », selon laquelle à l’âge de la globalisation, la seule voie pour la survie économique, serait de libérer au maximum le marché de l’Etat, des taxes, des charges et des règles sociales qu’il lui impose. Et donc de renoncer aux éléments du compromis social conquis dans le cadre de l’Etat nation. Comme les socialistes n’acceptent pas cette thèse, ils sont accusés de refuser les réalités du marché ... et sont parfois tentés de tourner le dos à la mondialisation.

I - Notre rapport au marché :

Autant de principes que souhaitables, autant de pragmatisme que nécessaire.

Il est donc nécessaire de clarifier notre conception du marché au regard de ses réalités nouvelles, mais aussi les termes même du débat, avant d’en venir à la mondialisation et au modèle de développement économique et social que nous voulons proposer. Volontairement ou non, on confond souvent, dans le débat politique, le marché, le capitalisme en général et le capitalisme tel qu’il fonctionne aujourd’hui. Cette confusion est parfois source de faux débats ou de malentendus. C’est pourquoi il est utile de repartir de la position de principe des socialistes à l’égard du marché.

1 - Les socialistes reconnaissent de fait et maintenant de longue date, le rôle et l’efficacité du marché dans la production de richesses, sa capacité à répondre à de nombreux besoins de l’économie, des citoyens, des consommateurs. L’échec de toutes les tentatives de lui substituer une économie totalement administrée, quelle qu’en soit la forme, a tranché cette question.

Faut-il pour autant considérer que le marché capitaliste en général et le marché globalisé et financiarisé en particulier, assurent le développement harmonieux de l’économie et des sociétés ainsi que la satisfaction des besoins humains essentiels ? Nous ne le pensons pas.

La domination de la sphère financière sur le marché, loin de garantir un optimum dans l’allocation des ressources, soumet l’économie à une logique de rentabilité maximale immédiate, à une dictature du court terme, qui se développe au détriment des intérêts à long terme de l’économie et de la société, nuit aux logiques industrielles, et souvent même au maintien d’emplois productifs. La recherche de taux de rentabilité financière sans commune mesure avec la croissance réelle de l’économie, pousse à des mouvements permanents de restructuration, d’externalisation, d’acquisition, de cession, qui excèdent la rationalité industrielle. Cette domination financière sur l’ensemble du cycle économique génère une instabilité chronique, la constitution de bulles spéculatives suivie de leur éclatement brutal : A des mouvements de concentration excessive de capital pendant un temps dans certains secteurs, certaines entreprises ou certains pays, succèdent de soudaines destructions de valeur, d’emplois, d’activités, au détriment de pays et de populations entières, dans le cas de crises monétaires, bancaires ou immobilières graves.

Car plus encore qu’aux âges précédents de son histoire, ce capitalisme déployé à l’échelle mondial, crée de la richesse, mais l’affecte sans considération du long terme et de l’intérêt général et accroît les inégalités. Il bénéficie fortement à certains groupes sociaux et à certains territoires quand il apporte capitaux, technologies et débouchés - à cet égard, il peut être un puissant facteur de rattrapage dans certains pays en développement -, mais il abandonne hors de ses circuits d’autres territoires et des pays entiers.

A l’échelle mondiale, il entraîne une consommation de ressources naturelles sans aucune considération pour leurs limites, et là où les régulations sont faibles, des pollutions et des destructions sur l’environnement irrémédiables. Les économistes disent qu’il n’intègre pas ses « externalités » environnementales et sociales. Une société purement marchande, serait sans sécurité sociale, sans droit du travail, sans aides ni indemnités pour les chômeurs, sans soutien pour les régions touchées par les restructurations, sans règles environnementales. Le marché, pas plus aujourd’hui qu’hier, ne s’occupe de désenclavement et d’aménagement du territoire, d’accès de tous à l’énergie, à la poste et aux transports collectifs à des prix abordables. Il assure moins encore le droit pour tous les citoyens de bénéficier gratuitement de biens publics essentiels comme l’éducation et la santé. Quand il intervient dans ces domaines, et il le fait de plus en plus, c’est au bénéfice du seul public solvable, mais au détriment de tout objectif d’égalité ou de justice sociale. Il ne se fixe aucune borne dans l’exploitation de la nature et « fait feu de tout bois » comme le montre les tentatives de brevetabilité des gènes et de marchandisation du vivant.

C’est pourquoi, une société conduite par les seuls marchés serait irresponsable et ne serait tout simplement pas une société.

Par ailleurs, les défaillances du marché font obstacle à son propre développement : le marché veut tout mais ne se suffit pas à lui-même. Sans l’engagement économique de l’Etat dans les infrastructures d’énergie, de télécommunications, de transport routier et ferroviaire, le marché débouche sur le sous-investissement et la panne. C’est l’Etat, avec les collectivités locales, qui assure la compétitivité des territoires, nationaux ou locaux, et qui crée les conditions propices au développement des activités économiques, des investissements et des entreprises. Il en va de même pour l’éducation et la santé, qui contribuent non seulement au bien-être de la population mais aussi aux performances économiques globales d’un pays et de ses entreprises. Les pays industrialisés sont aussi ceux qui dépensent le plus dans l’éducation et la santé, c’est-à-dire dans la productivité de la main d’oeuvre.

Ceux des pays en développement qui ont émergé disposaient d’un Etat solide, même si n’importe quel type d’Etat fort et de politique publique ne produit pas le développement et n’est pas en soi justifiable. Il n’en demeure pas moins, que c’est en changeant de politique, en choisissant l’ouverture graduée des échanges, et non en renonçant à un Etat solide et à des politiques publiques, que la Corée du Sud, Singapour, Taiwan, la Thaïlande, la Malaisie, puis la Chine, l’Inde et le Vietnam, ont pris le chemin du développement. L’absence ou l’extrême faiblesse de l’Etat, dans de nombreux pays d’Afrique et dans certains pays en Asie (Indonésie, Bengladesh, Philippines), n’a en rien favorisé leur développement et leur capacité à s’insérer dans les échanges mondiaux. Des pays d’Amérique latine comme le Brésil et l‘Argentine sont parvenus à réarmer leur économie, considérablement affaiblie par les cures restrictives des institutions internationales, après avoir reconquis leurs marges de politique économique et sociale nationale.

En Europe même, les résultats économiques des pays scandinaves ont montré qu’un haut niveau d’Etat social, de prélèvements publics et de redistribution, n’empêchait pas la croissance forte, la hausse des exportations et la baisse du chômage mais y contribuait puissamment, à la condition que l’effort soit équitablement réparti et que son usage soit tourné vers l‘avenir.

A contrario, la transition des anciens pays communistes vers l’économie de marché, montre que sans institutions, sans société organisée et sans confiance, l’économie de marché ne peut tout simplement pas exister. En appliquant tous les principes d’une politique ultralibérale, la Russie est passée d’une économie planifiée à une économie en partie maffieuse sans réellement devenir une économie de marché5. Ce qui caractérise le développement, n’est pas tant le degré d’ouverture au marché international, désormais très important partout, ni le secteur marchand, toujours majoritaire, c’est au contraire très largement l’ampleur et l’efficacité du secteur non marchand. C’est l’importance et l’efficacité de secteurs comme l’éducation, la santé, les infrastructures, la recherche...qui caractérisent les sociétés développées. Il en ressort, contrairement à une idée répandue, qu’il reste des marges d’action très importantes pour les Etats et les politiques nationales dans la mondialisation.

Cette observation en rejoint une autre, bien connue, mais insuffisamment soulignée, il n’y a pas un capitalisme, mais des capitalismes. Le capitalisme mafieux de la Russie n’a pas grand-chose à voir avec le capitalisme nordique, le capitalisme Chinois avec le capitalisme Rhénan ou encore avec le capitalisme anglo-saxon.

Le discours néo-libéral semble parfois omettre que le marché totalement libre n’existe en réalité tout simplement dans aucune économie de marché moderne. Dans tous les pays développés, au contraire, le marché est à la fois encadré et stimulé, par un ensemble de règles publiques.

* Des règles fiscales. Tout Etat a besoin d’argent, organise une redistribution partielle, sociale et territoriale, des richesses et joue également de la fiscalité pour encourager ou freiner des activités.

* Des règles sociales, consubstantielles à l’acceptation du marché par les travailleurs et dont l’absence fausserait la concurrence entre les entreprises.

* Des règles commerciales, protégeant et soutenant certains secteurs face à la concurrence internationale, y compris des dispositions réservant des parts de marché à certaines entreprises nationales (quotas d’oeuvres européennes dans l’audiovisuel, Small Business Act en faveur des PME aux Etats Unis, etc.).

* Des règles de concurrence et de protection des consommateurs ; laissés à eux-mêmes, les marchés créent la concentration, les oligopoles et les monopoles et détruisent la compétition censée les stimuler.

* Des règles prudentielles, imposées aux banques, assurances, mutuelles, aux entreprises cotées, qui deviennent un enjeu majeur de la stabilité de l’économie compte tenu de sa financiarisation.

* Des procédures d’autorisation spécifiques de création d’entreprises dans certains domaines au nom de l’intérêt public (pharmacies, casinos, débits de boissons, etc.)

* Des règles d’occupation des sols qui interdisent, restreignent ou soumettent à autorisation la construction de logements, d’usines, d’hôtels, d’exploitations agricoles (et protègent notamment les forêts, les rivières, le littoral, etc.).

* Des règles qui écartent, partiellement ou complètement, du domaine concurrentiel des activités de service public ou instaurent des monopoles publics dans des secteurs où existent des monopoles naturels (même dans les pays les plus voués au capitalisme comme les Etats- Unis, pour le contrôle aérien, ou en Suisse pour l’électricité et l’eau jusqu’à maintenant). Des règles environnementales et de santé publique qui vont devenir un enjeu central de la régulation de la production et des échanges.

On pourrait ajouter d’autres exemples à cette liste.

La combinaison des divers degrés de régulation publique dans chacun de ces domaines définit, à bien des égards, le caractère plus ou moins solidaire, responsable et humain des sociétés modernes.

C’est à partir de leurs valeurs de justice, d’émancipation, de liberté et d’égalité, et de leurs objectifs de progrès social, de bien-être et de développement durable, que les socialistes doivent aborder de façon pragmatique la meilleure utilisation de ces instruments, en fonction des circonstances, du contexte et du moment.

Pour les socialistes, les formes de régulation de l’économie, de propriété publique ou privée, dépendent de la nature des productions et des secteurs d’activité, de la place de ceux-ci dans la satisfaction des besoins humains, de l’importance des programmations à long terme qu’ils exigent, de leur impact sur l’environnement, de la nécessité de garantir à chacun l’accès à des biens ou des services indispensables à une vie décente. Il s’agit donc de combiner en fonction de l’efficacité et de l’intérêt public, les avantages des deux types d’organisation, marchande ou non marchande, privée ou publique.

Les socialistes acceptent plus pragmatiquement que les libéraux, dogmatiquement hostiles à l’intervention publique, cette gradation et la variation possible des dosages entre marchand et non marchand, selon les secteurs et la situation. Ainsi, les libéraux ont-ils poussé au niveau européen, par pur dogmatisme et sous la pression d’intérêts privés, la libéralisation du secteur de l’énergie censée faire baisser les prix. Elle s’est traduite dans tous les pays où elle a été mise en oeuvre par une flambée incontrôlée des tarifs de l’électricité et du gaz en raison des tensions entre offre et demande et du contrôle des marchés par quelques oligopoles. De plus, la libéralisation ne répond en rien aux enjeux majeurs de la sécurisation des approvisionnements, de l’investissement dans les infrastructures de production et de transport, de la promotion de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables.

Les socialistes doivent donc assumer et revendiquer le pragmatisme de leur approche, plus fondée au plan économique comme au plan de l’efficacité écologique et sociale que les approches dogmatiques, qu’elles soient purement étatistes ou exclusivement libérales. Nous préférons de beaucoup le dosage au dogme. D’autant, qu’il n’y a pas un marché mais des marchés dont les fonctionnements, les biens faits et les travers, ne sont pas les même. On ne régule pas de la même façon le marché du travail, qu’il vaut mieux encadrer fortement, et celui des biens de consommation courante, qui peut l’être moins, le marché des capitaux et celui des biens culturels, etc. Pour chacun de ces marchés, les régulations doivent être adaptée et les enjeux ne sont pas les même.

La place du marché, et celle de la maîtrise publique, doivent pouvoir aller selon les cas et les objectifs poursuivis de 0 à 100 %. Les formes de la maîtrise publique, exercée par l’Etat ou les collectivités territoriales, peuvent être différenciées : elles vont du contrôle total ou partiel de la propriété à la simple régulation, en passant par la réglementation plus ou moins étendue et rigoureuse. Leur périmètre et leur intensité doivent être variables. Par exemple, la sécurité, la justice, l’école, la santé et la protection sociale, le logement, les transports, l’énergie, l’eau, certains services culturels ou d’information constituent des besoins vitaux pour l’individu ou pour le pays, dont la satisfaction exige une maîtrise publique étendue, exercée soit directement par l’Etat, soit par des entreprises publiques, soit par un contrôle public strict. Pour des objectifs comme l’économie d’énergie, la lutte contre les pollutions, le transport routier de marchandises, les services bancaires indispensables à chacun, la maîtrise publique peut s’exercer par de simples règlementations. Il faut observer que ces missions de service public peuvent être exécutées soit par des entreprises publiques, soit par des entreprises privées, comme pour les transports urbains, par exemple. Il ne faut donc pas confondre comme on le fait couramment, service public et secteur public. Les socialistes reconnaissent également que les contours du secteur public, du service public, des services sociaux, peuvent évoluer dans le temps.

Les socialistes sont ainsi beaucoup mieux préparés que les libéraux, à aborder l’un des enjeux centraux de l’économie future : réguler la production et les échanges pour les rendre compatibles avec les exigences écologiques, la lutte contre le changement climatique, le développement durable. C’est-à-dire comment inventer un modèle d’économie de marché mieux équilibrée, plus juste et durable, écologique et sociale.

Le marché est une réalité trop importante de l’économie, pour être laissé à lui même. A charge pour la société et le politique de le réguler, de l’exclure de certains secteurs, de le stimuler dans d’autres et de lui imposer ses priorités. La vraie question n’est donc pas de savoir s’il faut accepter ou non le marché. Le véritable débat est entre laisser faire et ultralibéralisme d’un côté et régulation, maîtrise publique, équilibre entre marchand et nonmarchand de l’autre. Ce que nous voulons encourager c’est la création de valeur pour la société, c’est-à-dire d’emplois, de biens d’équipement et de consommation, de services, d’activités économiques abondantes, mais compatibles avec le développement durable, sources de rentrées fiscales et sociales.

Ce que nous combattons, c’est la soumission de la société et de l’économie à la seule logique financière et spéculative, c’est la concentration des richesses entre les mains d’une minorité, c’est l’évasion fiscale, c’est la destruction irresponsable de la planète, c’est l’hégémonie marchande7, c’est la dictature du court terme.

Il ne s’agit donc pas de supprimer le capitalisme, mais de le réguler, de faire rentrer le fleuve dans son lit, d’utiliser sa force motrice, mais d’éviter qu’il n’emporte tout sur son passage. Ce qui décide des hauteurs des digues, du tracé des berges, du nombre des écluses, c’est la démocratie et non la main invisible du fleuve.

Pour les socialistes, les vraies questions sont donc :

* Quelles règles d’encadrement du marché ?

* Dans quel cas les défaillances du marché justifient-elles que la puissance publique s’y substitue ?

* Quelles activités doivent échapper au marché pour des raisons d’intérêt public ?

* Quelle politique de régulation et d’incitation pour promouvoir une économie qui respecte les objectifs écologiques et réponde aux besoins essentiels de la société ?

Quelle stratégie de croissance, de justice sociale et de développement durable pour la France et l’Europe dans le marché mondialisé ?

Quels mécanismes de redistribution des richesses, quelle fiscalité juste ?

Quelles régulations mondiales pour un monde plus juste, vivable et durable ?

2- L’économie des besoins

Les socialistes gagneraient à intégrer dans leurs réflexions les travaux menés autour de la notion d’économie des besoins.

Les finalités du socialisme résident, plus que dans les moyens de la production, dans la satisfaction des demandes sociales et individuelles et plus exactement des besoins. Sans reprendre le détail des thèses d’Amartya Sen, ce qui caractérise la gauche et les socialistes résident dans la volonté de répondre de façon équitable à la question suivante : comment rendre chacun « capable » de satisfaire ses « besoins essentiels » en mettant à sa disposition les « biens et services utiles » ?

Sous cet angle aussi, les questions du marchand et du non-marchand, du public et du privé sont secondes, car ils ne constituent que des moyens pour atteindre des objectifs premiers situés du côté de la demande.

Cinq termes essentiels donnent un cadre d’analyse des finalités et des moyens d’une action publique en termes d’économie des besoins8 :

- Le terme de « justice » indique la volonté de mettre en oeuvre une action qui ne soit pas strictement égalitaire, mais qui soit « juste » au regard de principes politiques que la société s’est donnée démocratiquement ;

- Le terme d’ « équité » pointe le fait qu’il ne suffit pas de répartir également les biens ou les moyens pour que soient atteints des objectifs de justice sociale. Il arrive qu’il faille faire des « discriminations positives », qui, ne devraient être fondées que sur des critères sociaux et non ethniques (exemples : ZEP, tarifs sociaux pour les cantines scolaires et les centres aérés, transports gratuits pour les demandeurs d’emploi ...) pour établir une véritable égalité d’accès gommant les inégalités liées aux situations initiales ;

- Le terme de « besoins » permet de faire apparaître que l’homme cherche à acquérir les moyens de satisfaire les besoins « essentiels » relatifs à son épanouissement, lesquels peuvent varier selon les époques et les sociétés ;

- Le terme de « biens » et notamment de « biens publics » identifie les biens qui sont à même de satisfaire ces besoins essentiels ;

- Le terme de « capacités » indique que tous les citoyens n’ont pas les mêmes capacités à utiliser les biens et notamment les biens publics (l’exemple le plus simple étant l’éloignement). Il convient donc non seulement de mettre ces biens à disposition, mais de la faire dans des conditions telles que tous les citoyens soient « capables » concrètement d’en bénéficier.

Ces cinq termes dessinent un cadre global d’intervention de la puissance publique sur une part majeure de l’économie. Ils permettent également de se donner des critères modernes d’évaluation des politiques publiques.

Nous devons d’abord déterminer les besoins essentiels à satisfaire, qui ne sont pas nécessairement les mêmes qu’au siècle précédent. Par exemple, aujourd’hui, l’accès à la ressource financière, aux moyens d’information et de communication, ou encore à la formation tout au long de la vie, sont tout aussi importants que le soutien à la production de nourriture de base à bon marché il y a soixante ans.

Ce qui est dit ici à partir d’une approche nationale vaut aussi à l’échelle de l’Europe. Il est essentiel de construire également une logique de biens essentiels à ce niveau. L’objectif de la gauche européenne peut ainsi être de sortir des règles strictes du marché les services publics, ou services d’intérêt général, c’est-à-dire la fourniture de biens et services qui relèvent des besoins essentiels dans des conditions harmonisées au niveau européen.

Cette approche peut également être promue au niveau mondial pour mobiliser les acteurs publics en faveur de l’accès de tous aux « biens publics mondiaux » tels que les médicaments, l’eau, l’éducation, conformément aux Objectifs de Développement du Millénaire.

II - Notre rapport à la mondialisation

Nous ne sommes pas tant face à la mondialisation, que dans la mondialisation. Nous sommes entrés dans un monde nouveau qui nous pose des défis considérables, mais nous ne reviendrons pas à l’ancien. Pour la France, refuser la mondialisation n’est pas plus une option, que pour aucun autre pays : dans un monde ouvert, s’isoler c’est s’appauvrir, c’est se priver de débouchés et d’apports technologiques, c’est renoncer à influencer, à rayonner, à diffuser ses idées, c’est s’interdire de peser sur la définition des règles communes. Quand au mouvement socialiste, de même qu’il a dû se battre pour maîtriser le capitalisme et lui imposer des compromis sociaux à l’échelle des nations, il doit maintenant se battre pour imposer ses objectifs au capitalisme dans sa forme mondialisée. Il s’agit donc d’utiliser les instruments publics et d’en créer de nouveaux, à l’échelle globale si nécessaire, d’inventer ou de renouveler les instruments politiques et syndicaux, pour organiser la mondialisation, la façonner, la civiliser, en un mot, la réguler. Et non espérer y échapper.

1- Pour agir, il nous faut d’abord comprendre la mondialisation.

En vingt ans, l’organisation planétaire de la production et des échanges, la répartition des richesses et celle de la puissance ont radicalement changé. Trois grands facteurs ont joué un rôle décisif dans ce basculement vers une ère nouvelle :

- l’abaissement du coût des transports et le développement des technologies de l’information et de la communication qui ont favorisé la déconnection des lieux de fabrication et de consommation, la fragmentation des processus de production, l’externalisation des activités de services et l’interconnexion des marchés financiers à l’échelle mondiale ;

- des décisions politiques de libéralisation prises à partir des années 70 à l’échelle internationale et nationale, et notamment la suppression du contrôle des changes, la libéralisation des mouvements de capitaux et l’abaissement des barrières commerciales ; sous la pression des institutions financières internationales, la diminution du rôle économique de l’Etat a été brutalement imposée à de nombreux pays en développement.

- La chute du mur de Berlin, l’ouverture de la Chine à l’économie capitaliste, son intégration dans le marché mondial, ont déplacé le centre de gravité du monde, ouvert la totalité de la planète au nouveau capitalisme financiarisé et mis à sa disposition une quantité de force de travail à bas coût, sans précédent.

Ces évolutions ont entraîné une exacerbation de la concurrence sur les marchés mondiaux, mais ont aussi, paradoxalement, renforcé le pouvoir d’un petit nombre de très grands groupes multinationaux qui pèsent d’un poids considérable, supérieur à celui de bien des Etats.

Par ailleurs, la gestion de l’épargne retraite par des fonds d’investissement (fonds de pension), dans de nombreux pays, a mobilisé d’immenses quantités de capitaux qui ont beaucoup contribué à renforcer le poids de la finance sur l’économie mondiale, et à alimenter les hedges funds (fonds alternatifs) et les fonds de Private Equity (capital investissement) 9 qui participent au financement des entreprises, mais pèsent sur leur gestion. Du fait de leur comportement spéculatif et de leur faible encadrement prudentiel ils également font courir de considérables « risques systémiques » de crises se propageant à l’économie réelle. De leur côté, les pays riches en matière premières (OPEP, Norvège, Russie...), suivis d’autres (Singapour, Chine, etc.) ont créés des fonds souverains en forte croissance, dont les avoirs représentent déjà plus du double des hedges funds (de l’ordre de 3000 milliards de dollars) et dont l’opacité et les objectifs constituent une menace potentielle nouvelle pour les autres pays.

La nouvelle organisation de la chaîne de production internationale a également permis l’enrichissement de quelques économies émergentes de grande taille, Chine, Inde, Brésil, Russie (davantage pour des raisons énergétiques), et a profondément bouleversé les rapports de force économiques entre les nations. Au sein de l’OMC, leur regroupement dans le G 20, a permis à ces pays de devenir un acteur incontournable des négociations multilatérales. La Chine est en passe de devenir le premier exportateur mondial. Le poids de ces pays sur les marchés de matières premières est décisif. Le plus que doublement des réserves de change mondiales entre 2001 et 2007 est dû, pour l’essentiel aux pays émergents d’Asie dont les réserves sont passées de 600 milliards à plus de 2 000 milliards de dollars sur un total de 5 000 milliards de dollars au début 200710. La plus grande part finance, pour l’instant, le déficit budgétaire des Etats-Unis. Les rachats de branches industrielles de sociétés européennes par des sociétés chinoises, indiennes ou coréennes illustrent aussi ces nouveaux rapports de force.

A cette échelle inédite, le capitalisme mondialisé reproduit et décuple ses caractères propres : il est un formidable moteur de la production de richesses, mais aussi d’inégalités croissantes dans le monde comme à l’intérieur des sociétés.

Il engendre une instabilité internationale dont la crise des subprimes et sa contagion est la nouvelle illustration, après de nombreuses autres crises financières et désordres monétaires, dont les risques sont aujourd’hui accentués par l’opacité des circuits financiers, les paradis fiscaux, les centres offshore et l’ampleur des fonds spéculatifs et des fonds souverains.

C’est l’un des paradoxes de la mondialisation : la pauvreté recule, mais les inégalités s’aggravent partout. Selon la Banque Mondiale11, environ 985 millions de personnes dans le monde vivaient, en 2004, avec moins de 1 dollar par jour (seuil de la pauvreté extrême) - même si le taux de pauvreté au niveau mondial a baissé puisqu’elles étaient 1, 25 milliard en 1990 12 - et 2,6 milliards avec moins de 2 dollars par jour, considéré comme le seuil de pauvreté, 1,4 milliard d’habitants de la planète n’ont pas accès à l’eau potable et chaque jour, 25000 personnes, dont la moitié sont des enfants de moins de cinq ans, décèdent en raison de maladies liées à l’eau stagnante et polluée.

D’un côté, l’extrême pauvreté d’une grande partie de la population crée des situations de misère de masse effarantes en particulier dans les mégalopoles du Sud ; de l’autre, les plus riches deviennent riches dans des proportions ahurissantes. Quant aux classes moyennes elles restent, bien qu’en croissance, très minoritaires dans la plupart des pays en développement, faute de mécanisme de redistribution sociale.

En Europe, par ailleurs, l’expansion des marchés mondiaux a créé de nouvelles opportunités et des débouchés pour de nombreuses entreprises, mais en a déstabilisé beaucoup d’autres. Le nouveau capitalisme ébranle les bases de l’Etat social et de son financement. Le capital est fluide, le travail est abondant à l’échelle mondiale, les choix de localisation des investissements permettent d’échapper aux contraintes des Etats et de mettre en concurrence les systèmes sociaux et fiscaux. Les externalisations, nouvel impératif des taux de rentabilité élevés, ne portent plus seulement sur des activités industrielles à faible valeur ajoutée, mais aussi sur les activités de service à valeur ajoutée croissante (centres d’appel, saisie et conversion de données, recherche et ingénierie). Même si les délocalisations directes ne représentent qu’une petite partie des fermetures d’entreprises, les externalisations, ou leur menace, exercent une pression très forte sur les conditions de travail et de rémunération. Une masse de travailleurs précaires et de travailleurs pauvres s’est constituée dans tous les pays, même ceux qui connaissent le plein emploi. C’est l’une des dimensions de la répartition plus inégalitaire de la part des richesses créées qui va à la rémunération du capital au regard de celle qui est affectée aux salaires et aux revenus de protection sociale.

Quelle que soit la méthode statistique utilisée, « usuelle » ou « désagrégée », la baisse de la part salariale dans la répartition des richesses a été très marquée et elle s’ est fortement dégradée au cours des 25 dernières années. Elle se stabilise toutefois, à un niveau plus élevé selon la seconde méthode, à la fin de la période observée dans ce tableau (1998, 2002).

Le revenu des foyers les plus riches a cru dans une proportion infiniment plus grande que le revenu moyen des Français. On trouve une des explications de cet écart dans l’évolution très inégalitaire des différentes sources de revenus, revenus des capitaux, revenus fonciers ou salaires. Ces derniers augmentent infiniment moins rapidement et dans de moindres proportions que les premiers, quand ils ne stagnent ou ne baissent pas.

Le nouveau capitalisme a ainsi profondément modifié les rapports sociaux. Les classes ou couches dirigeantes détentrices du capital, ou dont la rémunération est directement liée à son rendement, n’ont jamais été aussi fortes et aussi sûres d’elles-mêmes, aussi peu concernées par le financement du pacte social. De leur côté, les couches populaires ou moyennes qui dépendent complètement du revenu de leur travail n’ont jamais été aussi émiettées et inquiètes quant à leur avenir. Elles ne se vivent d’ailleurs plus sous le mode de l’unité. Elles sont segmentées et morcelées par le développement considérable de la soustraitance, du travail à temps partiel non choisi, du contrat de travail précaire. Elles subissent de plein fouet la concurrence internationale, si bien que la peur du lendemain, la crainte du « descenseur social », pour soi-même ou ses enfants, est de retour.

En France, en 30 ans, la part des dividendes dans le revenu national est passée de 2,3 % à près de 8 %. Mais ces gains ne profitent pour l’essentiel qu’à une petite minorité. 1 % des ménages possèdent près de la moitié du patrimoine en action du pays.

Les révolutions conservatrices et « l’économie du ruissellement »

Les idéologues des révolutions conservatrices de Reagan et Thatcher dont Nicolas Sarkozy est le digne successeur ont toujours prétendu que les impôts sur les riches affaibliraient tellement leurs incitations qu’ils travailleraient moins, épargneraient moins et que l’économie s’en trouvait affaiblie. Ils ont poussé le cynisme jusqu’à soutenir que la meilleure façon d’aider les pauvres était de donner de l’argent aux riches. C’est la théorie de « l’économie du ruissellement » : en déversant des cadeaux fiscaux sur les plus riches, la richesse est censée finir par ruisseler jusqu’au bas de l’échelle des revenus. Rien de tel ne s’est passé. Le revenu des salariés les plus modestes a baissé tout au long des années Reagan. Quant à l’argument traditionnel selon lequel les baisses d’impôt allaient stimuler l’économie et engendrer des rentrées fiscales il s’est trouvé tout aussi démenti dans les années Reagan qu’il l’a été dans les années Chirac. Dans les deux cas les déficits publics se sont creusés massivement et la dette s’est envolée.

C’est la même politique et le même cynisme que met en oeuvre Sarkozy avec le paquet fiscal voté le 1er Août 2007. La France souffre depuis 5 ans d’une création d’emploi trop faible, d’une compétitivité fortement dégradée, de déficits extérieurs et publics colossaux, d’un fort creusement des inégalités et d’une croissance potentielle insuffisante. Aucun des cadeaux fiscaux qui concernent en grande partie les plus fortunés n’est susceptible de répondre à ces défis ni à la réhabilitation du travail.

L’impôt sur le revenu et l’impôt sur les successions ont joué un rôle central au cours du siècle dans la réduction des inégalités et dans la disparition des rentiers. Après avoir au cours du quinquennat précédent creusé les inégalités de revenus et de patrimoine avec la réforme de l’impôt sur le revenu et le bouclier fiscal, la droite y ajoute aujourd’hui la réhabilitation des inégalités de naissance. La rente et l’héritage n’ont jamais permis de renouer avec le dynamisme économique.

2- Organiser la mondialisation : la force du droit contre le droit du plus fort

La gauche est internationaliste et progressiste. C’est pourquoi nous combattons la tentation du repli. L’ouverture des échanges internationaux est aussi un facteur de développement, de progrès, de création de richesse : par l’apport de capitaux et de technologie, par l’amélioration de la productivité, elle a permis d’accroître le niveau de vie d’une partie de la population dans de nombreux pays en développement.

La mondialisation n’est pas uniquement économique. Elle concerne l’information, la culture, diffuse les idées, notamment celles de la démocratie, des droits de l’Homme, de l’égalité entre les hommes et femmes, de la responsabilité environnementale. Elle met en contact les sociétés, provoque des débats mondiaux sur les grands défis communs de l’humanité. Un embryon de société civile mondiale est né sur des questions comme l’accès aux médicaments pour les malades du sida, l’abolition de la dette, la revendication d’institutions internationales plus justes et transparentes, l’interdiction des mines antipersonnelles, la protection de la planète.

Il faut non seulement bâtir une gouvernance de l’économie mondiale, mais aller vers la construction d’une société globale fondée sur des valeurs communes et qui agit de façon responsable et solidaire à l’égard de tous ses membres. Le commerce en est un instrument, mais il doit être accompagné d’autres politiques.

Car le marché mondial crée des interdépendances, mais il ne suffit pas à bâtir un ordre international équitable, pacifié et durable et donc à assurer l’adhésion à des valeurs communes. Il ne repose pas sur l’équité et la solidarité, et n’assure pas suffisamment le partage des bénéfices de la mondialisation par tous les peuples. De nombreux pays du Sud restent pris dans la spirale du sous-développement et n’arrivent pas à s’insérer à leur profit dans les échanges internationaux. Leur économie n’est pas assez diversifiée et ils restent trop dépendants de l’exportation de quelques matières premières dont ils ne maîtrisent pas les cours. Le niveau de formation et la productivité sont faibles, les infrastructures de transport et d’énergie défaillantes, tout comme le système bancaire, etc. Certains sont en proie à la guerre civile ou à la faillite de l’Etat qui se remet à peine du cycle de la dette. C’est le cas de beaucoup de pays d’Afrique, mais aussi d’autres en Amérique centrale et dans la Caraïbe, ainsi que de quelques pays d’Asie.

Il y a des oubliés de la mondialisation, c’est s’aveugler que de le nier. C’est pourquoi les politiques d’ouverture doivent être accompagnées de puissants correctifs au niveau national comme international.

La gauche doit toujours lier politiques d’ouverture et renforcement de l’inclusion sociale.

L’Europe, comme expérience commune de paix, montre, depuis près de soixante ans, qu’une union économique et commerciale adossée à un fort système de cohésion sociale, à des fonds structurels et des mécanismes de solidarité pour les régions pauvres, permet de tourner la page des guerres, de renforcer le consensus sur les valeurs, et de faire naître un sentiment d’appartenance commune.

Alors que l’écart s’est creusé dans le monde entre les pays riches et les pays pauvres, il s’est réduit au sein de l’union européenne. L’Espagne, le Portugal, l’Irlande qui sont entrés dans l’union avec un faible niveau de développement ont eu une croissance rapide qui les a progressivement amenés à se rapprocher des niveaux de développements des autres pays de l’union. Le même phénomène est à l’oeuvre avec la Pologne et les pays du dernier élargissement. C’est la combinaison de l‘ouverture au marché européen, de la modernisation économique et des mécanismes de solidarité entre territoires qui a permis cette réduction des inégalités : des prélèvements très faibles sur les régions riches conduisent à des redistributions très élevées pour les régions les moins développées, comparables à celles que réalisent automatiquement les systèmes de protection sociale nationaux.

Pour passer de la jungle actuelle des échanges internationaux au « doux commerce » de Montesquieu qui pacifie les relations entre les nations, il faudra donc davantage que des règles de libre échange. Les échanges actuels ne sont en effet ni libres, ni justes, mais dominés les Etats les plus puissants et quelques grandes entreprises.

Des règles de juste commerce doivent prendre en compte les inégalités de développement, (avec un « traitement spécial et différencié ») et s’accompagner d’aides au rattrapage avec les fonds nécessaires. Elles supposent, comme l’Union européenne s’y est engagée, la suppression des subventions aux exportations dans l’agriculture, où elles ruinent les paysans du sud, et l’encouragement à des politiques agricoles qui soutiennent, dans tous les pays, la sécurité alimentaire, le développement rural et la protection de l’environnement.

Ces règles doivent également garantir le respect de normes internationales dans le domaine social, sanitaire (accès aux médicaments) et environnemental. L’absence de telles règles peut laisser place aux pires abus en matière de conditions de travail, de restriction de l’accès aux soins, ou de dégâts environnementaux dans les pays en développement. Elles peuvent du coup entraîner des formes de dumping inacceptables vis-à-vis des pays où le niveau de réglementation est plus élevé. Enfin le juste commerce doit respecter le droit de chaque société à conserver ses préférences collectives (accepter ou non les OGM, protéger sa diversité culturelle, etc.) et à réguler ses services publics (dans les accords sur le commerce des services, les investissements et les marchés publics, notamment).

La mondialisation doit donc être beaucoup plus fortement régulée, tant par les Etats, qui gardent un rôle majeur, que par les institutions internationales, pour réellement bénéficier au développement de tous et ne pas détruire la planète. Les institutions internationales doivent toutes, y compris le FMI, la Banque mondiale et l’OMC, être mises au service des objectifs de développement, de l’accès aux droits fondamentaux (éradication de la pauvreté, accès à la santé, à l’éducation, droit au travail décent, à l’énergie propre, etc.) et d’un objectif de cohésion sociale mondiale. Et non au service de la seule libéralisation comme cela a été trop longtemps le cas.

Cela passe par le renforcement de la gouvernance de la mondialisation et la mise en cohérence de l’action des ces institutions et des autres agences internationales, sous l’égide des Nations Unies.

C’est pourquoi nous proposons la mise en place d’un Conseil Mondial du Développement Durable au sein des Nations Unies, qui doit jouer le rôle du « conseil de sécurité » pour ce qui concerne les interventions de la communauté internationale dans les domaines économiques, sociaux et environnementaux. Tous les continents devraient y être représentés. Il serait chargé de coordonner les politiques des organisations internationales et de s’assurer de leur mise en cohérence au service du développement durable. Le FMI, la Banque mondiale, l’OMC devraient être placés sous sa supervision, de même que l’Organisation mondiale de la santé, l’Organisation internationale du travail, le Programme des Nations Unies pour le développement, et l’Organisation mondiale de l’environnement à créer. Il nommerait les responsables de ces institutions et il veillerait à doter toutes les agences internationales à vocation sociale, sanitaire, environnementale de pouvoirs de sanction et d’un organe de règlement des différends à l’instar de l’OMC. Ce nouveau Conseil serait l’instance d’orientation et d’arbitrage qui aurait vocation à établir une hiérarchie des normes internationales pour assurer la primauté des droits humains, sociaux et environnementaux. Il se substituerait au G8, directoire aujourd’hui impuissant à réguler les grands déséquilibres économiques et monétaires mondiaux, en même temps que dépourvu de légitimité, ainsi qu’au Conseil économique et social (ECOSOC) des Nations Unies, devenu inefficace. Cette réforme viendrait en complément de celle de l’élargissement du Conseil de Sécurité.

3- Les normes sociales et le « travail décent » doivent être une priorité de la régulation mondiale pour les socialistes.

Le débat sur les normes du travail dans les pays en développement a longtemps été bloqué par ces pays eux-mêmes. Ils considéraient que l’accroissement des coûts qu’impliquerait l’établissement de normes sociales plus élevées serait de nature à ruiner leur avantage comparatif et qu’il s’agissait d’un prétexte des pays riches pour leur imposer de nouvelles mesures protectionnistes.

Cependant, l’entrée de la Chine dans l’OMC et la fin des accords multifibres, dont elle a été le principal bénéficiaire au détriment d’autres pays en développement, ont contribué à changer en partie la perception dans ces pays eux-mêmes.

L’OIT a également clarifié le débat sous l’impulsion de Juan Somavia, son directeur général, socialiste chilien. Quatre principes ont été retenus comme constituant le socle des « normes fondamentales du travail » à faire respecter en priorité à l’échelle internationale :

* l’élimination du travail forcé ;

* l’abolition effective du travail des enfants ;

* l’élimination des discriminations en matière d’emploi ;

* le respect de la liberté d’association et du droit à la négociation collective sur les conditions de travail et de rémunération, ce qui revient à la liberté syndicale.

Puis, partant d’un diagnostic établi par une Commission internationale associant tous les continents, à propos des conséquences de la mondialisation sur l’emploi et les conditions de travail, l’OIT et le mouvement syndical mondial20 ont lancé une vaste action internationale pour promouvoir le droit au « travail décent ». L’expression désigne le droit pour tous à un travail, effectué dans des conditions conformes aux normes fondamentales, et qui permette au travailleur de vivre décemment, de faire vivre sa famille et de bénéficier d’une protection sociale minimale. L’agenda du travail décent va ainsi au-delà du seul respect des normes juridiques de l’OIT. Sans les délaisser, il les englobe dans une approche plus large, plus proche de la situation concrète des travailleurs. Ce qui est en cause et doit être défendu est le droit fondamental de chacun, à vivre et non simplement survivre de son travail - et à en récolter les justes fruits. Cet agenda met l’accent sur le fait que partout, quels que soient les niveaux de développement, indépendamment d’un définition de seuils de salaires à l’échelle internationale, impossible à réaliser, les revenus procurés par le travail doivent permettre de faire vivre le travailleur et sa famille (comment combattre sinon le travail des enfants et les scolariser ?), l’emploi doit donner accès à une protection sociale, le travail doit être effectué dans des conditions compatibles avec la sécurité, la santé, la dignité du travailleur ; celui-ci doit pouvoir s’organiser librement pour exprimer ses revendications et négocier collectivement. Il s’agit là de droits universels, élémentaires que tous les Etats doivent s’engager à faire respecter. L’agenda du travail décent définit les bases d’un combat commun des salariés du Nord et du Sud pour que les droits des travailleurs ne soient pas pris en otage par les conditions de la compétition mondiale.

Il est en train de faire son chemin dans l’agenda international. Il faut désormais en faire un but effectif de toutes les politiques des institutions mondiales, non de la seule OIT, mais aussi de la Banque Mondiale, du FMI, et de l’OMC.

L’Europe doit s’engager beaucoup plus fortement dans sa promotion qui correspond profondément à ses valeurs et à ses intérêts. Elle doit placer le travail décent au coeur de ses politiques d’aide au développement et de sa politique commerciale. L’Union conditionne déjà la signature de quelques accords commerciaux bilatéraux22 à la ratification de certaines conventions de l’OIT. Mais la suspension du bénéfice commercial est rarement appliquée en cas de violation des libertés syndicales par les pays bénéficiaires. Tous les accords de libre échange en cours de négociation entre l’Europe et la Corée, l’Inde, etc., devraient comporter des clauses sociales. Or, ce n’est pas le cas. L’Europe fait ainsi moins que les Etats-Unis pour promouvoir les libertés syndicales et les normes sociales en contrepartie du commerce.

Il faut rouvrir le débat au sein de l’OMC où une première coopération a été établie avec l’OIT sous l’égide des deux directeurs généraux, socialistes, Juan Somavia et Pascal Lamy. Mais l’OIT devrait s’y voir reconnu un véritable statut d’observateur comme c’est le cas du FMI. Elle devrait pouvoir remettre des avis sur les accords négociés et les jugements de l’organe de règlement des différends. Il faudrait reconnaître la prééminence des décisions de l’OIT sur les règles du commerce en cas de violation des normes sociales fondamentales et faire de la ratification des principales conventions de l’OIT une obligation préalable à l’adhésion à l’OMC, ce qui n’a été le cas ni pour la Chine ni pour le Vietnam. L’Europe doit commencer par demander la création d’un comité « commerce et travail décent » au sein de l’OMC pour débattre de ces questions, sur le modèle du comité « commerce et environnement » qui a permis d’importants progrès24.

Mais pour que les choses changent à l’OMC qui est une organisation dont les règles sont fixées par les Etats membres, la bataille doit être menée dans chaque pays, en lien avec le mouvement syndical, en mobilisant l’opinion et les parlementaires pour que ces exigences deviennent un élément du mandat de chaque Gouvernement au sein de l’Organisation multilatérale.

Enfin, les pays industrialisés et l’Union européenne doivent faire respecter par leurs multinationales les principes directeurs pour la responsabilité sociale et environnementale des entreprises définies à l’OCDE, avec les syndicats.

Le mouvement socialiste doit faire du travail décent un axe majeur de ses campagnes internationales. Il permet de remettre la question sociale au coeur du débat international, dans une approche non pas protectionniste, mais régulatrice.

Le travail décent est une condition indispensable à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement, une voie essentielle pour lutter contre la pauvreté, promouvoir une mondialisation équitable et créer les conditions d’un juste commerce en luttant contre les formes d’esclavagisme moderne. Il est aussi un moyen de renforcer les liens de solidarité entre syndicats du Sud et du Nord.

Le Forum Progressiste Global (GPF) créé à l’initiative du PSE avec le soutien de l’IS, poursuit ce combat, à travers son action menée avec les syndicats internationaux et des plateformes d’ONG , dans l’"Alliance for Decent Work" pour que le travail décent de priorité, devienne une réalité.

4- Le rôle de l’Europe pour la régulation : l’Europe de l’excellence.

Nous ne pèserons pas sur les grands enjeux de régulation mondiale sans l’Europe. Si nous voulons des réponses au changement climatique, des règles sociales dans le commerce, des réformes des institutions internationales, il faut une Europe unie. Le renforcement du rôle de l’Europe dans la régulation mondiale passe une définition plus claire de ses objectifs, mais aussi par une unification de sa représentation dans les institutions internationales. Les pays de la zone euro pourraient ainsi partager « une chaise unique » pour parler d’une seule voix au sein du FMI et de la Banque mondiale comme l’Europe le fait déjà au sein de l’OMC.

Comme elle l’a fait pour le protocole de Kyoto, l’Europe doit continuer à agir pour de nouvelles régulations dans tous les domaines d’intérêt commun pour l’humanité, commerce, accès aux matières premières, énergie, social, pour organiser le monde autour de « la force du droit », contre le « droit du plus fort ».

C’est la seule voie vers un ordre international fondée sur la justice et la paix à l’échelle mondiale.

Le choix des socialistes pour l’Europe dans la mondialisation, c’est l’Europe de l’excellence.

La voie proposée par les libéraux pour faire face à la mondialisation, celle d’une course sans fin à la baisse des financements sociaux, du coût du travail, des dépenses publiques, est une impasse et contresens pour l’Europe. L’Europe n’a pas d’avenir comme producteur à bas coût dans la compétition mondiale. Elle ne pourra jamais faire jeu égal avec ses rivaux potentiels dans ce domaine. Elle doit être en mesure de vendre du travail cher, donc des produits et des services à forte valeur ajoutée, innovants, de qualité élevée, positionné dans le haut de gamme. L’Europe doit considérer son système social comme un facteur productif qui contribue à la compétitivité, même si cela passe par des réformes. Les pays nordiques, mais aussi l’Allemagne, redevenue le premier exportateur mondial, montrent que cela est possible.

Pour renforcer sa compétitivité, l’Europe doit jouer de ses atouts, le fait de disposer de la main d’oeuvre dont le niveau moyen de qualification est le plus élevé au monde, la qualité de ses infrastructures, de ses services publics, de ses universités et centres de recherche renforce sa compétitivité globale. Encore faut-il qu’elle ne prenne pas de retard, en particulier dans la recherche où elle investit moins que les Etats-Unis ou le Japon et dans la formation initiale26 et tout au long de la vie.

C’est pourquoi, la voie socialiste face à la mondialisation est celle de l’Europe de l’excellence et non celle du démantèlement de son modèle social. Une politique de relance européenne dans l’esprit de la stratégie de Lisbonne, qu’il faut muscler avec des efforts d’investissements coordonnés dans la recherche fondamentale, l’innovation, la formation, les infrastructures de réseau, mais aussi dans les industries d’avenir, permettrait de mieux situer l’Europe sur les marchés mondiaux. Elle aiderait les entreprises européennes à tirer parti des nouveaux débouchés dans les pays émergents. Nous avons aussi besoin de l’Europe unie pour mener à bien de grands projets industriels stratégiques et créer dans de nombreux domaines les Airbus de demain comme Galiléo ou ITER.

Pour cela l’Europe doit se doter d’un budget à la hauteur de ses ambitions dans les domaines de la recherche, la formation, les réseaux de transports, les énergies renouvelables.

L’Europe doit développer notamment une politique de l’énergie qui ne se définisse pas par la libéralisation des marchés, mais qui soit fondée sur l’innovation, la recherche dans l’efficacité énergétique, le soutien aux transports non polluant, le développement de la voiture propre, etc.

L’excellence énergétique et environnementale est un enjeu de développement durable, mais aussi d’industrie dans un secteur stratégique du futur, potentiellement créateur de richesse et d’emplois nouveaux. Dans ce domaine, par exemple, l’Union doit jouer de l’effet de levier de son budget pour intensifier la recherche, soutenir les industries innovantes. Il en va de même dans les biotechnologies, les nanotechnologies, etc. Pour ne pas être qu’un marché, l’Union doit aussi pouvoir continuer à financer la solidarité et la convergence structurelle entre ses territoires, développer les programmes de formation du type Erasmus et en inventer de nouveaux pour la formation tout au long de la vie, en situation professionnelle. La question des ressources propres de l’Union - c’est-à-dire d’une recette fiscale européenne - devra donc être posée de nouveau. Elle pourrait être constituée, par exemple, d’une part de l’impôt sur le bénéfice des sociétés, qui sont les premières bénéficiaires du marché européen.

Sa politique monétaire doit être débattue sans tabous, adaptée face aux stratégies monétaires offensives de nos compétiteurs internationaux, et mise au service de tous les objectifs de l’euro, la stabilité des prix mais aussi la croissance et l‘emploi. Comme le dit Jacques Delors, aujourd’hui « l’euro protège mais ne dynamise pas ». Il manque une politique macroéconomique cohérente et dynamique à l’Europe, qui repose sur un meilleur « policy mix » des stratégies monétaires et budgétaires, et encourage les investissements publics et privés. La coordination politique et budgétaire entre les Etats de la zone euro au sein de l’eurogroupe doit se renforcer et s’affirmer pour assurer ce pilotage politique la stratégie de croissance face à la Banque centrale28. Mais une telle coordination, suppose que les gouvernements respectent leurs engagements de gestion saine des finances publiques au sein de la zone monétaire commune et n’aggravent pas, sans justification de relance contracyclique, les déficits publics par des mesures fiscales sans effet sur la croissance. En revanche et en contrepartie de cette gestion saine, les investissements dans les dépenses définies en commun comme prioritaires pour la stratégie de Lisbonne, comme la recherche, et l’université, ne devraient plus être comptabilisées totalement à l’avenir dans le calcul des « déficits excessifs ».

Pour les socialistes, l’Europe est aussi un espace de droits sociaux inscrits, notamment, dans la Charte des droits fondamentaux29. Une Europe qui protège doit défendre son modèle d’inclusion sociale dans la mondialisation, par une politique plus ferme et active sur les normes internationales du travail dans ses accords commerciaux et de coopération.

Elle doit être une Europe qui protège ceux qui sont les plus exposés aux changements économiques, les victimes des délocalisations et doit donc développer les dispositifs de solidarité et de compensation des effets négatifs de mondialisation, venir en aide aux travailleurs et aux bassins d’emploi affectés par les restructurations, comme elle commence à la faire avec le Fonds Européen d’Ajustement à la Mondialisation créé en 2007 pour accompagner les reconversions industrielles et soutenir la formation des travailleurs.

Mais elle doit commencer par refuser les logiques de dumping et de concurrence fiscale en son sein. Le renforcement du socle de droits sociaux est un enjeu décisif et les socialistes doivent agir avec leurs Partis frères dans l’Union pour la mise en oeuvre des objectifs de « la nouvelle Europe sociale »30 adoptés lors du Congrès de Porto du PSE. Pour les socialistes l’achèvement du marché intérieur doit en permanence être équilibré par les autres dimensions du projet européen et reposer sur les principes qui avaient été énoncés par Jacques Delors « le marché qui stimule, la coopération qui renforce, la solidarité qui unit ». C’est cette philosophie qui a présidée à la création des fonds structurels, de la politique régionale, comme de la législation sur la protection de la santé et la sécurité au travail, ou encore sur l’information et la consultation des travailleurs. C’est le contraire d’une politique de concurrence entre les systèmes sociaux du type de la directive service (du commissaire Bolkestein). Les socialistes doivent aujourd’hui notamment se battre sur 5 législations sociales prioritaires, qui sont également au coeur des objectifs du Groupe socialiste au Parlement européen31 et de la Confédération Européenne des Syndicats. Elles sont actuellement bloquées soit par la Commission européenne, soit par des minorités de blocage au sein du Conseil :

- La révision de la directive « temps de travail » qui doit limiter à 48 heures la durée hebdomadaire du travail sauf dérogations encadrées, qui est enlisée en raison de l’ « opt out » obtenue par la Grande Bretagne et demandé par d’autres.

- La directive sur les agences de travail temporaire pour garantir aux intérimaires les mêmes droits qu’aux travailleurs permanents, c’est-à-dire lutter contre la précarisation du travail en Europe.

- La révision de la directive sur les Comités d’Entreprises Européens dont les pouvoirs doivent être renforcés face aux délocalisations et aux restructurations

- L’adoption d’une directive sur les services publics (services d’intérêt économique général) et d’une sur les services sociaux d’intérêt général qui ne doivent pas relever des pures règles de la concurrence. Une telle directive serait le pendant de la directive sur les services dans le marché intérieur.

La droite ne fait rien sur ces questions, pas davantage que sur le budget européen. Nicolas Sarkozy n’a fait aucune proposition et n’a pas prononcé le mot social une seule fois devant le parlement européen lors de son premier discours devant cette assemblée le 17 novembre 2007.

La gauche française devrait davantage se concentrer sur ces points dans le débat européen, sur les politiques concrètes de l‘Europe, sur les batailles à mener, face aux conservateurs et aux libéraux, avec les syndicats européens, pour défendre une Europe des droits sociaux et des solidarités, et mobiliser l’opinion autour de campagnes européennes, comme celle lancée par la CES et le Groupe socialiste du parlement européen pour les services publics.

Elle devrait mettre ces questions, ainsi que celles de l’engagement écologique de l’Europe, au coeur de ses exigences vis-à-vis de la présidence française de l’Union européenne en 2008. Elle y gagnerait en unité et en efficacité pour agir sur des questions qui concernent directement les citoyens et qui déterminent l’avenir du modèle social européen.

III - La stratégie de développement économique, sociale et écologique de la France dans la mondialisation

1- Un modèle économique, écologique et social pour la France du XXI ème siècle.

Il est urgent pour la gauche et les socialistes de définir un modèle économique, écologique et social pour la France du XXI ème siècle. Un modèle qui garantisse à la fois l’efficacité économique, la croissance, la compétitivité, la promotion de l’égalité et de l’inclusion sociale et la protection de l’environnement.

C’est à la gauche de le proposer. Elle ne peut se préoccuper que des deuxièmes et troisièmes aspects de ce trépied et sembler délaisser la question de la production de richesses en France.

Notre pays a besoin d’une stratégie et d’un positionnement efficaces dans la mondialisation. Les Français ont besoin de savoir quel modèle de développement et de croissance nous proposons, et quelles réformes nous envisageons pour y parvenir.

Le rôle d’un parti est d’en débattre avec le pays bien avant les élections, d’associer largement à sa définition les citoyens, les forces sociales, les acteurs économiques, les intellectuels. Ce débat ouvert est une condition indispensable s’il veut recevoir un mandat clair des citoyens pour agir et pouvoir les impliquer, par la suite, dans le cours de son action au gouvernement.

La force d’un modèle de développement moderne repose sur l’articulation de l’économique, du social et de l’écologique, qui sont fondamentalement les trois piliers d’une même stratégie, si elle est cohérente. La dimension écologique est en effet aujourd’hui une composante centrale du modèle de production et de consommation, comme du modèle social.

Ce modèle doit donc être à la fois efficace, performant et juste, c’est-à-dire créateur de richesse et de nouveaux progrès sociaux. Il doit constituer, par là-même une alternative à la politique néo-conservatrice du pouvoir actuel et marquer un clivage fort dans la bataille politique contre la droite. Mais dans le même temps, il doit recueillir un consensus large dans la société. C’est une grave erreur de la droite de ne pas avoir compris qu’un modèle économique et social non accepté car fondé sur des efforts injustement répartis ne permet pas à la société d’accepter les réformes et d’avancer pour réaliser pleinement ses potentialités et réussir.

Car la capacité à organiser, non pas une fois pour toutes, mais en permanence les réformes, est devenue une dimension intrinsèque du développement des sociétés dans une économie ouverte où la création de richesse et la compétition sont fondées sur l’innovation et la concurrence internationale. Aucun modèle de croissance ne pourra reposer sur un état d’organisation figée de l’appareil productif et des systèmes sociaux.

La capacité à négocier en permanence les changements, comme on négocie en permanence les virages sur une route, est nécessaire pour faire face aux transformations incessantes de l’économie et de la société. C’est une dimension essentielle d’un modèle de société moderne, efficace et juste. Indépendamment même de la compétition internationale, les mutations internes aux sociétés imposent cette adaptation désormais constante des politiques publiques et des systèmes sociaux : l’allongement de la durée de la vie et l’augmentation des dépenses de santé, l’apparition de nouveaux modes de vie familiaux, de nouvelles formes d’habitat et d’urbanisation, les nouvelles aspirations concernant les rythmes de la vie professionnelle et personnelle, l’obligation de repenser nos modes de consommation d’énergie, de transport, tout cela nous y oblige.

Le choix n’est donc pas entre la réforme ou pas de réformes.

Il s’agit de choisir entre des réformes négociées et acceptées - car justes et cohérentes - qui permettent à la société d’avancer, et des réformes imposées, refusées - car non négociées et injustes - qui bloquent la société et l’affaiblissent.

2- Pour une stratégie économique offensive face à la croissance du marché mondial

La France a besoin d’une stratégie offensive dans la mondialisation. La population mondiale va passer de 6 à 9 milliards d’habitants. L’essentiel de la croissance démographique se produira dans les pays du Sud, en Asie et en Afrique. Pour un pays de 60 millions d’habitants qui dispose d’une avance technologique, d’une main d’oeuvre qualifiée et d’entreprises performantes, un tel développement du marché mondial offre d’immenses opportunités. Les besoins d’équipements individuels et collectifs sont considérables et déjà la croissance forte des pays émergents ouvre des débouchés nouveaux à nos entreprises.

La France a des atouts considérables et de l’avance dans de nombreux domaines. Encore fautil ne pas les perdre. Elle doit prendre d’urgence le tournant de l’économie de la connaissance, de l’innovation, de la recherche et de la formation. Elle doit orienter davantage son économie vers les marchés extérieurs en forte croissance, quand elle reste aujourd’hui très centrée sur le marché intérieur et le marché européen (dont l’importance sera toujours décisive, mais elle n’est plus suffisante).

La France ne peut se limiter à quelques secteurs où elle excelle. Nous devons monter en gamme dans de plus de domaines. Nous manquons de capital risque, de PME de taille suffisante pour profiter de la croissance mondiale. Nous devrons également combler notre retard universitaire. Aujourd’hui la France décroche, faute d’une spécialisation industrielle adéquate et d’une politique cohérente.

Depuis près de quatre ans, la balance commerciale de la France a renoué avec les déficits. L’analyse des données du commerce extérieur est sans appel. Après avoir dépassé la barre des 20 milliards d’euros en 2005, des 26 milliards en 2006, le déficit extérieur annuel français risque de tutoyer celle de 32 milliards en 2007 et 35 milliards en 2008. Depuis quatre ans, le déficit du commerce extérieur français coûte chaque année à la France plusieurs dixièmes de point de croissance : 0,4 point l’an dernier, 0,6 point l’année précédente et encore 0,7 point en 2004.

L’ampleur des déficits est telle que les facteurs conjoncturels (cours euro/dollar/yuan, prix du baril de pétrole) ne peuvent suffire à l’expliquer, d’autant que d’autres pays de la zone euro réalisent des performances exceptionnelles. Comme souvent, le niveau de l’euro et la facture énergétique font office de « boucs émissaires » pour expliquer la faiblesse des performances commerciales de la France. La réalité, c’est que :

- Le cours de l’euro n’explique pas tout, même si le débat sur la politique monétaire européenne est légitime face à des compétiteurs qui mènent des politiques monétaires agressives. Cependant les échanges de la France avec l’Union européenne (zone où l’euro domine) sont déficitaires (- 1,3 milliard d’euros en juillet 2007). Contrairement aux idées reçues, la France dégage un excédent avec les douze nouveaux Etats membres. Le problème commercial de la France se situe du côté des échanges avec l’Allemagne, pays avec lequel les échanges accusent un déficit conséquent (1,6 milliard d’euros en juillet), quasiment égal à celui noté avec la Chine.

- La multiplication par 5 de la facture énergétique constatée depuis 2000 ne peut être utilisée comme prétexte pour masquer la dégradation structurelle de notre commerce extérieur (dont le choc est en partie amorti par le cours de l’euro). Hors énergie, nous aurions aussi un déficit au premier semestre de plus de deux milliards d’euros et cela pour la première fois depuis des années, comme l’a reconnu Hervé Novelli, secrétaire d’Etat aux entreprises et au commerce extérieur.

Ce fait est donc imputable au déficit de compétitivité de la France qui ne cesse de perdre des parts de marché. Au cours des trois derniers mois, nos exportations (+0,4%) ont progressé dix fois moins vite que les exportations mondiales (4%) et six fois moins vite que les importations (2,8%).

La France souffre donc d’un problème de positionnement industriel et géographique. La balance commerciale est durablement dégradée, car ses secteurs historiquement excédentaires sont en crise : l’industrie automobile au sens large (avec les équipementiers) et l’agroalimentaire

Enfin, son tissu de PME/PMI exportatrices et surtout de moyennes entreprises n’est pas de nature à lui permettre de répondre à la demande mondiale. Les PME françaises, même si ce problème n’est pas limité à la France, peinent à passer du stade de petite entreprise à celui de moyenne entreprise. Selon les études du CEPII, la faiblesse du tissu de moyennes entreprises susceptibles d’exporter serait l’une des raisons de la dégradation du commerce extérieur français. A titre d’exemple, sur une base 100 au moment de la création d’une entreprise, l’emploi est après 4 ans à l’indice 115 en France et à l’indice 215 aux États-Unis.

Les socialistes devront donner la priorité au soutien à l‘investissement et à la mise en valeur du capital productif. Nous sommes du coté du risque contre la rente. Notre politique économique, notre système bancaire, nos marchés financiers, doivent davantage appuyer la création d’activités industrielles, d’emploi, d’innovations. La politique fiscale doit changer pour orienter l’utilisation du profit des entreprises vers l’investissement dans le développement de l’entreprise, la recherche, les salaires.

Le système financier et bancaire doit être encourager la création et le développement du capital risque en appui des PME. Exploiter le potentiel français et vendre nos savoirs faire

La France dispose d’atouts spécifiques qu’elle exploite insuffisamment. De nombreuses pistes doivent être explorées.

La France est notamment pionnière dans nombre de métiers dits « de pointe » pour lesquels la demande devient mondiale. Elle doit apprendre à vendre son savoir à l’étranger dans les métiers liés au développement durable et notamment :

Les activités liées à la mobilité durable. Plutôt que de miser sur un hypothétique retour à l’âge d’or du « véhicule moyen de gamme diesel » la France doit s’orienter vers ce qu’elle sait faire en matière de transports propres, de TGV, de tramways ... ainsi que de véhicules individuels utilisant l’hydrogène et la pile à combustible. Ces secteurs porteurs s’articulent bien avec nos savoir faire reconnus en matière énergétique.

La France dispose également d’un formidable potentiel de recherche et d’industrie dans tous les domaines ayant trait à l’eau, aux services environnementaux, à la propreté. Elle est néanmoins de plus en plus soumise à une concurrence venant de pays ayant pris, plus tôt que nous, le virage du développement durable. Pour autant notre capacité reste forte en ces matières mais il n’est plus temps d’attendre pour y investir massivement.

Des biens et des services centrés sur la satisfaction des besoins humains essentiels Robert Boyer a également souligné, la capacité de la France à penser, produire et distribuer des biens et des services centrés sur la satisfaction des besoins humains essentiels.

Son premier atout, c’est sa position géographique et la qualité de son espace. Pays carrefour et fortement attractif la France doit assumer ce rôle et en tirer tous les avantages en termes de création d’activités et d’emploi. Par exemple, cessons de penser que l’industrie des loisirs est « seconde » voire secondaire. Ainsi la France est la première destination mondiale, avec 78 millions de touristes étrangers en 2006. Le secteur du tourisme emploi en conséquence 2 millions de personnes et dégage un chiffre d’affaire qui atteint 6,5% du PIB français. Les apparences sont trompeuses : les performances de la France en termes de tourisme sont médiocres. La France, première destination mondiale, ne bénéficie pas suffisamment de cette situation en termes de recettes du tourisme international. Selon les statistiques de l’OMT, les dépenses des touristes représentent 42 milliards de dollars, contre 48 à l’Espagne et 82 aux Etats-Unis. Les touristes qui visitent les Etats-Unis y dépensent donc trois fois plus que ceux qui visitent la France. La France doit donc investir dans ses infrastructures de tourisme et de loisirs pour diversifier sa gamme et donc accroître sensiblement son potentiel.

Son deuxième atout, c’est la santé et tout ce qui tourne autour de la vie. La France dispose d’un des meilleurs systèmes de santé d’une recherche en biotechnologies et d’une industrie pharmaceutique de tout premier rang. Or ces domaines d’activité sont amener à connaître (et connaissent déjà) des taux de croissance supérieurs à la moyenne en raison du vieillissement et de la « bonne vieille loi d’Engel » qui conduit à un accroissement de la part des dépenses consacré à la santé. Notre pays doit considérablement intensifier ses efforts budgétaires et structurels dans ces domaines pour exploiter réellement son potentiel. Ces secteurs recouvrent des activités marchandes et non marchandes qui constituent un vivier d’emplois. On constate déjà un déficit d’offre des services à la personne. Il est donc nécessaire non seulement de solvabiliser la demande mais de renforcer l’offre, en s’appuyant notamment sur le secteur de l’économie sociale33. Nous ne développerons l’offre que si la formation initiale et continue est revue en profondeur pour convaincre les Français de se former pour exercer ces métiers d’avenir, non délocalisables. Il est essentiel de s’y prendre dès maintenant. De la même façon nous devons redoubler d’efforts sur la logique des pôles de compétitivité liés à ces secteurs d’activité.

Quatre directions essentielles pour le renouveau

Ainsi la France n’apparaît pas dépourvue de ressources pour trouver sa place dans le monde réel du 21ème siècle. Mais elle doit néanmoins rompre avec les politiques mises en oeuvre au cours des toutes dernières années dans quatre directions essentielles :

- Ne pas faire preuve de « nostalgie industrielle » en croyant toujours que demain doit être comme hier. C’est au contraire en acceptant de s’appuyer sur ses points forts du passé en les réorientant parfois radicalement que notre pays saura se re-développer. Les exemples des transports ou de la chimie sont ici particulièrement significatifs.

- La recherche doit (re)devenir la priorité nationale car la France n’a jamais réussi sans un socle scientifique exceptionnel qui en fait la force.

- L’éducation et l’enseignement supérieur doivent trouver au sein des dépenses publiques et privées une part bien supérieure à la part actuelle et une réforme radicale des grandes écoles et des universités doit permettre de combiner enfin l’excellence et la densité.

- Enfin, il faut que notre développement s’appuie sur toutes les énergies aussi bien territoriales que sociales. De ce point de vue, deux exigences s’imposent. Une décentralisation radicale des politiques économiques et industrielles en faveur des régions pour créer enfin en France les bases d’une croissance industrielle endogène à l’instar de nos principaux voisins, une modification toute aussi radicale de la gouvernance des entreprises qui permettent à chaque salarié d’apporter sa créativité aux performances de l’entreprise.

Toutes ces politiques signifient que nous jouons pleinement le développement et l’ouverture des échanges et que nous rejetons toute approche fondée sur le protectionnisme, qui nous enfermerait dans un retard dangereux.

Mais l’Europe doit conserver ses instruments de défense commerciale et utiliser les mesures anti-dumping et les clauses de sauvegarde chaque fois que nécessaire, pour se protéger face aux abus, et non pas les affaiblir comme le propose le Commissaire au Commerce. Elle doit défendre ardemment ses droits de propriété intellectuelle (dans le respect des exceptions légitimes pour l’accès aux médicaments dans les pays en développement).

Mais elle ne doit pas chercher à faire reposer sa stratégie de développement économique sur des formes de protectionnisme. - L’Etat social prévoyant

Ces politiques doivent s’accompagner non pas d’un affaiblissement des systèmes sociaux, mais d’une nouvelle orientation de l’Etat social.

Il faut bâtir un « Etat social prévoyant »34, ou anticipatif, plus dynamique que curatif face aux nouvelles insécurités générées par les changements de l’économie. Un Etat social qui sécurise les parcours professionnels, propose une véritable formation tout au long de la vie, soutienne réellement l’entrée des jeunes dans la vie active. Un Etat qui développe les services et les aides permettant de concilier vie professionnelle et familiale (garde d’enfants, congé parental).

Un Etat qui s’appuie sur les partenaires sociaux pour créer par la négociation les conditions d’une société de travail pour tous, d’un marché du travail réactif, avec un équilibre entre les besoins de mobilité et d’adaptabilité des entreprises et les droits à la protection, à la sécurité et à la formation des travailleurs, dans le respect du CDI. Comme l’ont fait les pays scandinaves avec la flexsécurité , c’est-à-dire le contraire d’une politique de précarisation du travail.35

A cet égard, la démolition des 35 heures, lesquels sont présentées par le pouvoir comme la prétendue clé d’explication de la faible croissance française et du manque de créations d’emploi est une piètre excuse pour l’échec d’une politique et un prétexte commode à la remise en cause de droits sociaux. Au plan économique, l’explication des difficultés de la France par les 35 heures vaut autant que celle selon laquelle tout serait de la faute à l’euro. Dans les deux cas, il s’agit d’esquives. Elles buttent d’ailleurs, l’une et l’autre, sur le même constat que la croissance et les créations d’emploi ont été bien plus fortes dans les années 1997-2002, de mise en oeuvre active de ces politiques que depuis lors, malgré les remises en cause continues des 35 heures et le non respect des critères du pacte de stabilité. Le contournement des 35 heures et des disciplines de l’euro n’aura créé aucune croissance. Cette supercherie politique est surtout une absurdité économique et sociale sauf à considérer que désormais en France, la seule voie vers la société du travail et la progression des salaires devrait être de passer des 35 aux 40 heures hebdomadaires, puis peut être aux 45 heures, de la « revente » de ses RTT monétisées - ce qui ne dépend d’ailleurs que du seul employeur - à celle de sa cinquième semaine de congés et pourquoi pas de la quatrième et ainsi de suite.

Il faut établir un bilan des succès et des ratés de la mise en place des 35 heures, selon les types d’entreprises, leur taille, en fonction des accords négociés et des situations différentes du public - en particulier de l’hôpital - et du privé. Il faut en faire une évaluation honnête pour négocier avec les partenaires sociaux les adaptations nécessaires. Mais un tel examen de la politique de durée du travail doit prendre place dans le cadre d’une politique globale de l’emploi, de la croissance et des salaires. Il doit également prendre en compte les gains de productivité, la pénibilité des emplois, les différents âges de la vie. Les 35 heures, s’inscrivaient fondamentalement dans une politique économique de relance de la croissance et d’objectif de plein emploi. Lier politique de croissance, création d’emploi et progrès social est le sens même du mouvement historique dans les sociétés développées, rendu possible par les gains de productivité.

Au début du XXI eme siècle, chaque salarié travaille heureusement beaucoup moins d’heures par an dans tous les pays industrialisés qu’au début du siècle précédent... et il produit pourtant infiniment plus. Le véritable progrès pourrait être à rechercher à l’avenir dans une interpénétration plus forte entre les différents temps de la vie : la formation, le travail, le loisir et non comme aujourd’hui leur succession au cours du cycle de vie. 36 Pour les socialistes une société du travail est une société de progrès et non de régression sociale. L’ « Etat social prévoyant » dessine dans ses termes même l’antithèse de la politique sarkozyste dont la signature est moins d’Etat, moins de social, moins de prévoyance. La France vit, avec Sarkozy et depuis cinq ans, une situation de régression sociale, sans politique de croissance, ni politique d’emploi.

L’Etat social prévoyant est un Etat qui prépare l’avenir en investissant massivement dans l’éducation et l’Université. Le projet socialiste a proposé un plan de rattrapage fondé sur une augmentation de 10 % par an pendant une législature au moins du budget de la recherche et de l’Université, qui reprenait et amplifiait l’effort engagé avec le plan Université 2000. La France manque d’une politique universitaire ambitieuse dans tous les domaines : mise en synergie des universités, des grandes écoles et des centres de recherche, statuts et mobilité des carrières des enseignants-chercheurs, équipements ambitieux, bibliothèques, encadrement et conditions de la vie étudiante, bourses, etc.

Elle doit en particulier créer de grands campus, mettant en contact permanent les étudiants, les élèves et les chercheurs de plusieurs universités, grandes écoles et centres de recherches regroupés dans un même espace pour favoriser les échanges, la créativité scientifique, l’innovation, les débouchés vers les entreprises. Elle doit encourager et aider ses étudiants et chercheurs qui le souhaitent à créer des PME innovantes.

Enfin, un Etat social prévoyant doit également s’appuyer davantage sur les Régions comme espace de citoyenneté et de solidarité, et comme acteur du développement économique dans la mondialisation. Il doit notamment renforcer leur capacité à soutenir les pôles de compétitivité qui créent et optimisent les liens entre la recherche et les entreprises.

Une politique économique dynamique

Lorsque la droite mène la même politique que Guizot en donnant 15 milliards aux plus riches en espérant que cela profite par « déversement » aux autres, elle mène la politique économique la plus injuste et la plus inefficace que nous ayons connu depuis bien longtemps.

Nos choix vont à l’inverse.

Pour redonner à la France la croissance durable que les socialistes proposent, nous prônons une stratégie de croissance équilibrée autour de 4 axes :

- Un partage équilibré de la valeur ajoutée qui doit résulter d’un dialogue social initié au sein d’une conférence des revenus et prolongé dans les branches et les entreprises. Il n’est ni juste, ni utile, ni efficace que la part des dividendes dans la valeur ajoutée s’accroisse comme c’est le cas depuis 5 ans.

- Une fiscalité moderne qui soit fondée sur l’ensemble de la richesse produite et distribuée et retrouve une vraie progressivité alliée à une équité entre territoires.

- Une réforme globale des rapports entre l’Etat et les entreprises qui revisite toutes les exonérations empilées au fil du temps dans le triple but de favoriser les entreprises dynamiques, privilégier le risque sur la rente, donner aux produits français la meilleure compétitivité possible.

- Réorienter la dépense publique sans tabou vers la satisfaction des besoins essentiels et la préparation de l’avenir en limitant strictement les déficits éventuels, hors politique contracyclique, à des dépenses d’investissement produisant des effets bénéfiques pour l’ensemble de la société.

IV - Une économie de marché écologique et sociale

Faire évoluer notre conception de la croissance

Pour les socialistes, la croissance est une priorité. Elle est pour nous, associée à la capacité de créer des emplois, de satisfaire les besoins individuels et collectifs, de financer les systèmes sociaux de solidarité, d’investir plus encore dans l’avenir, l’éducation, la recherche, la santé. Bref de répondre aux besoins et de créer les conditions d’une vie décente pour tous.

Les dégâts physiques et sanitaires, provoqués par le modèle de croissance actuel entièrement tourné vers l’accroissement du PIB, indépendamment de son contenu qualitatif, nous amènent donc à devoir redéfinir la notion même de croissance. De quelle croissance parlons-nous ? S’il s’agit de rechercher la satisfaction des besoins humains, ne s’agit-il pas plutôt de développement ? Et dans ce cas, comment envisager un développement qui ne soit pas soucieux de préserver l’environnement et sa capacité de régénération, socle sans lequel le développement ne saurait s’envisager pour les générations à venir ? Aucun système vivant ne perdure sans engendrer les moyens de sa survie.

La croissance économique pour elle-même apparaît aujourd’hui comme insoutenable du fait des dérèglements qu’elle provoque et des menaces qu’elle fait courir à l’humanité. Ne pas changer de modèle de croissance, c’est, de manière de plus en plus certaine, exposer l’humanité, du fait des dérèglements énergétiques et climatiques, à des coûts insurmontables et au risque de la décroissance. De la décroissance insoutenable devrait-on énoncer, du fait de son cortège de dommages irréversibles (mortalité, maladies, famines, migrations brusques, etc.) et de crises (guerres, raréfaction des ressources, etc.). Pour les socialistes, la recherche de la satisfaction des besoins humains, et la lutte contre les dommages du modèle de croissance industriel, passent par le développement durable, c’est à dire préoccupé, en permanence, de sa compatibilité avec la capacité de charge de la planète.

Une telle voie de « croissance écologique et sociale », vers un développement humain au service de la satisfaction des besoins du plus grand nombre, suppose un changement profond de modèle de développement. Il s’agit en effet de s’engager dans la transition vers un autre système énergétique, vers une autre mesure de la richesse, vers la lutte contre le réchauffement climatique. Assurer à tous des conditions de vie décentes et durables, telle est la vision qu’ont les socialistes de la croissance.

Malgré un Grenelle toujours utile au diagnostic partagé, la droite parle du développement durable sans le mettre en oeuvre. Cela supposerait pour elle des révisions déchirantes, telle que la remise en cause du productivisme, le partage des risques environnementaux ou la responsabilisation des producteurs pollueurs. La gauche est plus à même de faire de l’environnement une dimension centrale de son projet.

Faire émerger une culture de la responsabilité individuelle et collective

L’émergence d’une culture de la responsabilité, seule susceptible d’éviter la décroissance, suppose une nouvelle grille de lecture de l’organisation et du fonctionnement des sociétés, fondée sur la réhabilitation de la responsabilité individuelle et collective et l’existence de politiques publiques fortes, tant au niveau national qu’européen et international.

Les déclinaisons de cette nouvelle grille de lecture et d’action s’organisent autour de 4 pôles :

- l’impératif écologique,

- l’urgence économique et sociale,

- l’exigence démocratique,

- la mondialisation solidaire

1- L’impératif écologique : le contrat écologique

L’urgence première, c’est la lutte contre la dégradation de la planète par la reprise d’une politique offensive de préservation de l’environnement. L’air, la terre, l’eau, sont aujourd’hui menacés en quantité comme en qualité, et cette menace accroît chaque jour l’inégalité d’accès à ces "biens publics" : la condition première de la lutte contre les inégalités est de les préserver.

La lutte contre les changements climatiques.

Nous devons limiter à +2° C la hausse moyenne de la température terrestre, seuil au-delà duquel le réchauffement deviendra dangereux pour l’humanité. Cela reste possible sous réserve d’engager dans les dix ans à venir les changements nécessaires pour mettre fin aux émissions de CO2.

Lutter contre les émissions de gaz à effet de serre nous oblige à engager l’adaptation de nos modes de production et de consommation, et doit mobiliser tous les niveaux de décision :

- international : réussir le processus de Bali pour amplifier Kyoto,

- européen : accroître les compétences de l’Union -environnement, transports notamment- et recherche dans les énergies renouvelables,

- national : intervenir dans les domaines de l’efficacité énergétique, des transports, du logement, de l’aménagement du territoire..., sur tout les gisements d’économie d’énergie et d’émission de gaz à effet de serre,

- local : les collectivités territoriales doivent être dotées des moyens financiers et normatifs leur permettant de relayer les politiques nationales.

La sauvegarde de la biodiversité.

Depuis cinquante ans, l’impact de l’homme sur la biosphère est massif. Il se traduit par une perturbation des grands cycles (eau, carbone, azote...), un dysfonctionnement des écosystèmes (effet de serre, érosion des espèces) et la compromission des capacités évolutives de la biodiversité.

Lutter contre la perte de la biodiversité nécessite une action internationale, européenne et nationale (financement d’espaces protégés dans les zones exceptionnelles, telle la forêt équatoriale, interdiction du commerce de certains produits, etc.)

L’eau, une ressource rare et précieuse.

La question de la ressource en eau se pose partout dans le monde : dans les pays en voie de développement en termes quantitatifs et qualitatifs : entretien des puits, capacité d’épuration, gestion domestique et agricole de l’eau sont autant de défis vitaux ; mais elle se pose aussi dans les pays industrialisés en terme de pollution diffuse, d’origine agricole, sociétale (résidus médicamenteux...), industrielle, qui remet en cause la qualité des eaux de rivière et des nappes phréatiques, et des gaspillages multiples.

Outre l’action internationale (plan mondial de l’eau), l’action doit porter au plan national sur :

- l’application du principe pollueur-payeur pour toutes les pollutions, y compris diffuses ;

- l’instauration d’une tarification sociale de l’eau, comportant un droit incompressible d’accès à l’eau, une tarification progressive et des tarifs différenciés suivant les usages ;

2. L’urgence économique et sociale : l’éco développement

La deuxième préoccupation doit être d’engager de façon irréversible l’adaptation de notre économie aux conséquences de la dégradation de la planète, dans le respect de nos valeurs d’égalité sociale.

Parce que le modèle économique moderne fonctionne depuis la révolution industrielle grâce à l’existence de ressource fossiles abondantes et peu chères, et que celles-ci sont en voie de raréfaction, il faut promouvoir un autre modèle de développement qui substitue le capital humain (R&D, innovation, services...) aux ressources fossiles dans le processus de création de richesses.

La transition technologique ainsi engagée ouvrira de nouvelles perspectives de croissance potentiellement riches en emploi, et proposera un modèle alternatif de croissance viable aux pays émergents.

Ceci implique, en premier lieu :

- la mise en place d’indicateurs économiques globaux intégrant ces critères : le PIB est un instrument de mesure de la croissance monétarisée, et non un instrument de mesure du développement et du bien-être ; aussi, il convient d’instituer un nouveau thermomètre de type IDD (indicateur de développement durable), intégrant les éléments de croissance traditionnel et les éléments de l’indicateur du développement humain (IDH).

- la vérification de la conformité de chaque mesure économique ou sociale envisagée au regard de ces indicateurs, la surveillance de l’utilisation de l’ensemble des instruments disponibles là où l’efficacité de chacun est la plus pertinente (réglementation, régulation, incitation, fiscalité, mécanismes de marché...) ;

- l’évaluation des politiques publiques en terme de développement durable,

- l’élaboration de propositions de mesures nouvelles conformes aux exigences du développement durable.

Ceci veut dire, ensuite, un accroissement majeur de l’effort de recherche dans tous les domaines et l’introduction du développement durable dans la société de la connaissance :

Cela implique enfin la mise en oeuvre de politiques publiques, parce qu il serait illusoire d’escompter du seul marché des progrès significatifs en matière de protection de l’environnement. L’intervention de la puissance publique doit comporter des politiques :

- de prévention, pour l’anticipation de la globalité des effets d’une action,

- de régulation, afin de poser, dans le cadre du marché, les règles nécessaires au maintien des équilibres naturels et humains,

- d’impulsion, par l’introduction du développement durable dans le secteur public,

- d’évaluation et de réparation -application des principes de précaution et pollueur payeur-, fiscalité.

3. L’exigence démocratique : l’éco citoyenneté

La troisième orientation, c’est l’exigence démocratique. L’éco-citoyenneté est le fondement de la prise de conscience individuelle et collective de l’étroite interdépendance entre égalité des citoyens et préservation de toutes les composantes de l’environnement. Elle constitue, de plus, le moyen le plus efficace pour lutter contre l’individualisme et le consumérisme qui submergent la société "marchandisée".

Elle se définit par la prise en charge de la démarche globale du développement durable aux niveaux territorialement pertinents, condition même de l’adhésion des citoyens.

Sa mise en oeuvre passe par l’introduction de processus démocratiques dans toutes les prises de décisions qui conditionnent la vie quotidienne des gens. L’éco-citoyenneté doit se décliner dans tous les domaines.

Au niveau national :

- par l’inscription de l’éducation à l’environnement dans les programmes scolaires,

- la soumission obligatoire des questions d’environnement aux comités d’entreprise,

- le soutien au secteur associatif,

- la mise en oeuvre d’un contrat d’information aux questions de développement durable avec les médias

- la communication au Parlement des rapports d’évaluation des politiques publiques en terme de développement durable.

Au niveau local, par

- la présentation obligatoire d’objectifs locaux de développement durable aux citoyens,

- l’association des citoyens aux décisions, notamment dans l’élaboration des programmes de développement durable : PLU, agendas 21, plans climat etc.

- la démocratie participative : affectation de budgets aux initiatives citoyennes.

4. La mondialisation solidaire.

La quatrième dimension de cette approche globale, c’est la volonté d’agir au niveau international.

Ceci implique de mettre en oeuvre :

- des « fonds structurels mondiaux », financés par des éco-taxes (kérosène, flux financiers spéculatifs...), pour faire face aux besoins dans les domaines de la lutte contre l’effet de serre -et donc des énergies renouvelables-, de la protection de la biodiversité... ;

- un plan mondial de l’eau ;

- la création d’une organisation mondiale de l’environnement, chargée de la mise en oeuvre et de l’approfondissement du protocole de Kyoto, de la protection de la biodiversité, de la prévention des catastrophes naturelles, et plus généralement de la gestion de toutes les causes environnementales qui dépassent les limites des Etats (droit des mers, droit de l’espace...)

- l’intégration dans les politiques du FMI, de la Banque Mondiale et de l’OMC, de critères sociaux et environnementaux et le respect d’une hiérarchie internationale des normes.


Contributions, auditions, remerciements

Dans la préparation de ce rapport, le rapporteur a notamment utilisé les contributions de membres de la Commission sur « les socialistes et le marché » constituée au sein du Parti socialiste, celles des sections de la Fédération des Français vivant à l’Etranger (FFE) et les auditions d’économistes organisées par cette Commission et par les Forums thématiques de la rénovation. Il a également exploité des travaux du Groupe socialiste au Parlement européen, des rencontres avec les responsables d’autres partis socialistes d’Europe et des universitaires de ces pays à l’occasion de missions organisées par le Parti socialiste38. Qu’ils en soient tous remerciés. Le rapport, évidemment, n’engage que son auteur.

Membres de la Commission :

Guillaume BALAS, Laurent BAUMEL, Pervenche BERÈS, Karine BERGER, Jean-Louis BIANCO, Malek BOUTIH, Nicole BRICQ, Jean-Pierre CAFFET, Pascal CHERKI, Francis CHOUAT, Seybah DAGOMA, Stéphane DELPEYRAT, Aurélie FILIPPETTI, Charles FITERMAN, Gaëtan GORCE, Liêm HOANG-NGOC, Pierre-Yves LE BORGN’, Maylise LEBRANCHU, Pascale LE NÉOUANNIC, Marianne LOUIS, François MARC, Béatrice MARRE, Didier MIGAUD, Arnaud MONTEBOURG, Pierre MOSCOVICI, Pierre-Alain MUET, Sibeth N’DIAYE, Mehdi OURAOUI, Bernard PIGNEROL, Stéphane POCRAIN, Bernard SOULAGE, Catherine TRAUTMANN, Henri WEBER

Contributions et auteurs :

- Diagnostic sur la mondialisation et les mutations du capitalisme, Guillaume BACHELAY

- Les socialistes et le marché, Henri WEBER

- A propos du marché, Charles FITERMAN

- Mondialisation et Marché, Capitalisme et Socialisme, Nicole BRICQ

- Pour une nouvelle spécialisation productive de la France, Bernard SOULAGE

- Besoins et Marché : changer de paradigme, Bernard SOULAGE

- Environnement et marché, Béatrice MARRE

- Le Socialisme et le Marché, Pierre-Alain MUET

- Les véritables freins à la croissance, « la déconstruction du discours néo-libéral », Liêm HOANG-NGOC

- L’hégémonie marchande, Guillaume BALAS

- Les fonds d’investissements, Seybah DAGOMA

- Les politiques publiques face au nouveau capitalisme, Pascal CHERKI

- Champs d’action pour l’Union Européenne, Pierre Yves LE BORGN’

- Les grands sujets économiques et financiers européens : débats et perspectives &

- Quel avenir pour l’Union européenne ? Pervenche BERÈS

- Gratuité et services publics, Corinne BORD et le GSE ENA-INET

- Civiliser le marché, Mehdi OURAOUI, Luis VASSY, Arnaud BOYER

- Fédération du Cher

- Fédération du Rhône

- Fédération des Yvelines

La plupart des contributions et des notes d’auditions sont disponibles sur le site :www.partisocialiste. fr

- Sections des Français de l’étranger :

- Réflexions sur la politique économique et sociale de la RFA, Gilbert CASASSUS, section de MUNICH

- Le système danois, section du DANEMARK

- Réflexions sur la stratégie suédoise de croissance, section de SUEDE

- Les stratégies de croissance, d’inclusion sociale et de protection commerciale en Italie, section de ROME

- Libre échange, juste échange : Qu’est-ce qu’une politique de gauche de la concurrence dans le cadre européen ?

. Rodolphe DUTERNE et Gaël MAYER, section de BRUXELLES . Serge LE GAL, section de BRUXELLES

- Sur la gestion participative de l’eau, Fabrice ROMANS, section du LUXEMBOURG

- Stratégies québécoises et grandes orientations canadiennes de l’économie sociale, sections de MONTREAL et OTTAWA

- Stratégies de croissance, d’inclusion sociale et de protection commerciale :

. de la Chine et de l’Inde, Frédéric LAPLANCHE, René ARCADI et Frédéric SAUTÈDE, sections de TAÏWAN et HONG-KONG

. des Etats-Unis, Corinne NAASSIGUIN, section de NEW-YORK

. de l’Amérique Latine, Jacques GINESTA DU MORTIER, section d’URUGUAY

- « Changer la mondialisation : pour une politique socialiste » rapport du Secrétariat national à la mondialisation

- « Pour une Europe de l’excellence » document de position du groupe socialiste du Parlement européen

Auditions de la Commission « les socialistes et le marché » :

Stefan COLLIGNON (23/10/07)

Guillaume GAULIER (23/10/07)

Xavier TIMBAUD (13/11/07)

Bernard LAPONCHE (13/11/07)

Hakim EL KAROUI (20/11/07)

Auditions des Forums thématiques de la rénovation (organisés par Henri Weber et Alain Bergounioux) :

Philippe AGHION

Elie COHEN

Daniel COHEN

Marcel GAUCHET

Justine LACROIX


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