Le retour du « non » de gauche

mardi 6 juin 2006.
Source : POLITIS
 

Un appel signé par des formations politiques, dont le PCF, et des personnalités opposées au projet de Constitution européenne relance la perspective d¹un rassemblement antilibéral porté par des candidatures communes. De quoi modifier le rapport de force à gauche.

Est-ce l¹impossible qui prend forme ? Un nouvel appel « pour un rassemblement antilibéral de gauche et des candidatures communes » en 2007 fait renaître l¹espoir d¹un prolongement politique à la victoire du « non » au référendum sur le traité constitutionnel européen. Lancé à la veille des assises nationales des collectifs du 29 mai, ce texte a été bien accueilli par les 355 délégués venus adopter une Charte antilibérale appelée à constituer le « socle commun », selon l¹expression de Claude Debons, d¹un possible programme électoral de ce rassemblement. Diffusé à grande vitesse par courriels sur les listes de diffusion de multiples réseaux politiques et sociaux, cet appel a été lancé par une cinquantaine de personnalités et, fait nouveau, cinq organisations politiques, dont le PCF.

Fin novembre, un premier « appel pour des candidatures unitaires en 2007 et 2008 » avait déjà lancé le débat. Suscitant ici et là des réunions et regroupements, le nombre de ses signataires n¹a pas cessé d¹augmenter - ils étaient plus de 5 400 la semaine dernière -, dissuadant la LCR et, dans une moindre mesure, le PCF de se lancer prématurément dans une campagne présidentielle autonome (Politis, n° 892). L¹appel propose la « création d¹un collectif national d¹initiative » et de collectifs locaux, constitués sur le modèle des collectifs unitaires à l¹origine de la dynamique de la campagne du « non » de gauche au traité constitutionnel. Mais sans les absorber. Les assises ont opté pour une complémentarité de la démarche des « collectifs du 29 mai » et des « collectifs d¹initiative » à finalité électorale. Yves Salesse a évoqué à ce propos la nécessité de mener « un travail de conviction plutôt que d¹éviction », ce qui serait le cas si les syndicats (Solidaires) et certaines associations (Attac), membres des collectifs du 29 mai, étaient forcés à les quitter à la suite de leur transformation en regroupement électoral.

Ce nouvel appel ne se contente plus seulement d¹appeler à des candidatures unitaires sur un contenu défini par l¹antilibéralisme. Il y ajoute un objectif : « Une majorité et un gouvernement qui appliquent une politique au service du peuple » ; la volonté de se battre « pour gagner », ce qui suppose de « bouleverser le rapport de force à gauche » afin que le choix d¹une « rupture avec le cadre libéral » y soit « majoritaire ». Il explicite aussi la démarche jusque-là elliptique de ces candidatures, tant sur les moyens de mener la campagne que sur les contours des « collectifs d¹initiative » en vue « d¹échapper à la dérive présidentialiste encouragée par les institutions ». Surtout, il clarifie la question d¹un second tour éventuel à la présidentielle en prenant position pour un désistement - « Nous nous mobiliserons pour battre la droite et l¹extrême droite » -, et affirme tout aussi clairement le refus de participer « à un gouvernement qui serait dominé par le social-libéralisme ».

L¹autre nouveauté de cet appel réside dans la nature de ses signataires et l¹arc des forces politiques qu¹ils représentent. Six organisations, le Collectif pour l¹écodéveloppement et cinq formations politiques l¹ont signé, bien qu¹aucune d¹entre elles ne puisse prétendre être à l¹initiative du texte : les Alternatifs, Convergence citoyenne, la Gauche républicaine, le Mouvement pour une alternative républicaine et sociale (Mars) et le PCF. L¹engagement de ce dernier constitue en soi un événement. La signature du PCF, débattue au sein du comité exécutif national, le 9 mai, où elle a été approuvée à une très large majorité (38 pour, 6 contre et une abstention) est un feu vert à destination des militants communistes « invités à s¹investir dans cette démarche en participant aux collectifs ».

Une cinquantaine de personnalités, connues pour avoir mené la campagne du « non », figurent parmi les premiers signataires. Outre des responsables des organisations politiques déjà citées, on y trouve le chercheur altermondialiste Raoul Marc Jennar, les économistes Jean-Paul Hébert et Michel Husson, le politologue Réné Mouriaux, le philosophe Michel Onfray, le président de la Fondation Copernic, Yves Salesse, le médecin et éditeur Patrick Silberstein, ou les sociologues Pierre Cours-Salies et Jean-Pierre Terrail. Mais aussi des syndicalistes comme José Bové ou Christophe Aguiton, des militants associatifs engagés dans les combats antiraciste, féministe ou en faveur des chômeurs. L¹éventail politique comprend encore l¹adjointe au maire de Paris, Clémentine Autain, trois Verts - Francine Bavay, Michel Bourgain, Benoist Magnat -, et des proches de Jean-Luc Mélenchon, membres de Pour la République sociale (PRS). Dans un communiqué, son vice-président, René Revol, par ailleurs membre du PS, Charlotte Girard et David Gipoulou expliquent vouloir « aider à l¹union de la gauche des ruptures », union qui « prendra place dans le cadre d¹une large union des gauches sans exclusive », conformément à la stratégie arrêtée lors de la convention nationale de PRS, début avril. Enfin, quatre membres minoritaires du bureau politique de la LCR, Alain Faradji, Céline Malaisé, Christian Picquet et Francis Sitel, ont paraphé l¹appel.

Michel Soudais


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