Le gaz méthane qui remonte le long du sous-sol norvégien est une bombe à retardement écologique

jeudi 21 décembre 2023.
 

CHANGEMENT CLIMATIQUE - C’est un monstre, insidieux, invisible, qui se cache sous terre. Il pourrait bien être libéré à cause du réchauffement climatique. Son nom ? Le méthane, un gaz à effet de serre beaucoup (beaucoup) plus puissant que le CO2. Et une énorme quantité de ce gaz, aujourd’hui prisonnier sous le permafrost, ce sol gelé composé de roches, sable et glace, se déplace rapidement vers la surface.

Dans une étude publiée le 13 décembre dans la revue Frontiers, une équipe de scientifique a ainsi analysé la répartition de méthane sous l’archipel norvégien du Svalbard. C’est là qu’ils ont fait une découverte pour le moins effrayante. Sur 41 puits, les chercheurs ont observé une migration du gaz vers l’atmosphère. Et les mauvaises nouvelles continuent.

Le pergélisol, barrière en péril Jusqu’à présent, la plupart des recherches menées n’ont fait qu’effleurer la surface de la quantité de méthane se trouvant sous le pergélisol. Cette nouvelle étude creuse plus en profondeur. Actuellement, le permafrost (ou pergélisol) fonctionne comme un « capuchon cryogénique » présente l’étude, c’est-à-dire une chappe renfermant le dangereux gaz.

Sans que son fonctionnement précis n’ait encore été démontré, le mélange qui constitue le sol gelé permet donc de maintenir sous terre le méthane. Mais tous les endroits où se trouve le permafrost ne sont pas aussi imperméables. C’est ainsi qu’en altitude, la couche de protection est plus fine, sans doute parce que l’eau souterraine est moins présente.

Les scientifiques en sont certains, la fonte du permafrost va conduire à une libération massive de méthane. L’idée d’une fuite généralisée a été renforcée dans cette nouvelle étude, grâce à l’examen de nouvelles données provenant de puits de forage destinés à explorer des gisements de combustibles fossiles (comme le pétrole), mais ce n’est pas tout.

« Migration généralisée »

Les auteurs de cette nouvelle étude concluent en effet que « les systèmes de fluides souterrains du Svalbard sont dans un état de déséquilibre et qu’une migration généralisée d’hydrocarbures est probablement en cours à l’heure actuelle. » Traduit en langage commun, le permafrost fond, le gaz remonte vers la surface, et une libération massive de méthane est désormais très probable.

Thomas Birchall, docteur en géologie au Centre universitaire de Svalbard estime de son côté que les fuites de méthane sous le pergélisol sont faibles. À l’heure actuelle, il n’y a pas d’estimation précise pour connaître la quantité de méthane qui s’échappe quotidiennement du permafrost. Tout ce que l’on sait, c’est que sous ces sols gelés ne se trouvent pas moins de 1 700 milliards de tonnes de méthane.

Un chiffre qui a de quoi effrayer. Car si le méthane reste bien moins longtemps dans l’atmosphère que le CO2 (une dizaine d’années contre une centaine d’années pour le dioxyde de carbone), il est 84 fois plus puissant les premières années ou il se libère dans l’atmosphère.

À court et moyen terme, le potentiel destructeur est donc énorme car ce phénomène s’inscrit dans un cercle vicieux. Si le permafrost fond, il va libérer du méthane. Ce gaz a effet de serre va contribuer au réchauffement climatique, qui va accélérer la fonte du permafrost, qui va libérer encore plus de méthane…

Adonis Leroyer


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