Economie : « Les sociétés de gestion d’actifs prennent le pouvoir sur le logement, les hôpitaux, l’eau et les énergies renouvelables »

lundi 24 juillet 2023.
 

Qui possède notre monde ? Ces dernières années, un groupe d’acteurs financiers est apparu comme une réponse à cette question : les sociétés de gestion d’actifs [actions, obligations, liquidités, etc.].

Les gestionnaires d’actifs contrôlent des dizaines de milliers de milliards de dollars d’investissements dans des actifs à travers le monde. Les sociétés de gestion d’actifs les plus connues sont les « Big Three » (BlackRock, Vanguard et State Street Global Advisors), dont le modèle économique repose en grande partie sur des fonds indiciels dits « passifs » [ces fonds ont pour objectif de reproduire le rendement d’un indice donné], dont les investissements en actions font de ces sociétés les principaux actionnaires de milliers d’entreprises.

Mais les gestionnaires d’actifs ne détiennent pas seulement des instruments financiers tels que des actions et des obligations. Ils sont de plus en plus souvent les propriétaires directs des actifs « réels » qui conditionnent nos moyens de subsistance. Qu’il s’agisse de logements, d’hôpitaux, de réseaux d’eau ou de parcs éoliens, des sociétés de gestion d’actifs portant des noms tels que Blackstone, Brookfield et Macquarie s’emparent des éléments fondamentaux dont nous dépendons tous pour exister. Cette nouvelle « société de gestion d’actifs », dont l’objectif est d’extraire de gros profits aussi impitoyablement et rapidement que possible, n’augure rien de bon pour l’humanité.

C’est le sujet du nouveau livre de Brett Christophers, Our Lives in Their Portfolios : Why Asset Managers Own the World, publié par Verso Press, avril 2023. Brett Christophers éclaire un secteur notoirement opaque et démystifie les gestionnaires d’actifs, en examinant clairement et minutieusement ce qu’ils sont, les forces qui les poussent à extraire impitoyablement des profits et ce que tout cela signifie pour notre avenir collectif.

Brett Christophers est professeur au département de géographie sociale et économique de l’Université d’Uppsala, en Suède. Il est l’auteur ou le coauteur de cinq ouvrages, dont Rentier Capitalism : Who Owns the Economy, and Who Pays for It ?, Verso, 2020.

Dans cet entretien avec Truthout, Brett Christophers explique ce que font les gestionnaires d’actifs, comment ils sont programmés pour extirper agressivement des bénéfices, comment ils s’emparent de plus en plus d’« actifs réels » tels que le logement et l’infrastructure énergétique, et ce que nous pourrions faire à ce sujet.

Derek Seidman : Bien que les gestionnaires d’actifs disposent d’un pouvoir considérable dans notre société, beaucoup de gens ne savent pas ce qu’ils sont, comment ils opèrent et pourquoi ils sont si puissants. Pouvez-vous nous expliquer brièvement ce qu’il en est ?

Brett Christophers : En réalité, il s’agit d’une activité simple. Les gestionnaires d’actifs sont des sociétés qui investissent pour le compte de tiers. Ils recueillent l’argent des investisseurs finaux, qui comprennent à la fois des particuliers fortunés et des investisseurs institutionnels, tels que les fonds de retraite et les compagnies d’assurances. Les gestionnaires d’actifs effectuent leurs investissements et les investisseurs leur versent des honoraires pour ce service.

C’est essentiellement ce que font les gestionnaires d’actifs : ils investissent l’argent des autres et perçoivent des commissions pour cela. Ils peuvent investir dans de nombreux domaines différents, tels que les actifs financiers, comme les actions et les obligations, ou d’autres actifs – n’importe quoi, en fait.

Ils sont passés du statut d’acteurs marginaux de l’économie il y a quelques décennies à celui d’acteurs très importants aujourd’hui. La manière traditionnelle de mesurer leur taille ou leur importance est le montant des capitaux qu’ils gèrent. Dans les années 1970, ce montant s’élevait à moins de mille milliards de dollars au niveau mondial. Aujourd’hui, ce chiffre est de l’ordre de 100 000 milliards de dollars.

Ils sont donc passés de rien, essentiellement, à une taille extrêmement importante, en un laps de temps relativement court.

Quel est le rôle des « fonds » dans la gestion d’actifs ?

Si vous êtes un gestionnaire d’actifs et que vous collectez des capitaux auprès de vos clients, vous avez besoin d’un véhicule [fonds destiné à réaliser des investissements avec une structure juridique ad hoc] qui vous permette de regrouper ces capitaux et de les investir. Le fonds d’investissement est le principal véhicule utilisé à cette fin. Ces fonds se présentent sous différentes formes et tailles – fonds de placement privés, fonds indiciels, fonds communs de placement – mais ils sont tous des créatures du secteur de la gestion d’actifs.

Lorsque vous lisez que, par exemple, BlackRock a acheté tel ou tel actif, c’est une manière abrégée de dire qu’un fonds d’investissement géré par BlackRock a acheté l’actif. Cela signifie en fait que les véritables propriétaires de l’actif ne sont pas les gestionnaires d’actifs, mais les différentes entités – et il peut y en avoir des centaines – qui ont engagé de l’argent dans ce fonds d’investissement. BlackRock peut investir une petite partie de son propre capital dans ses fonds – généralement autour de 2% – mais la majeure partie du capital du fonds provient de fonds de retraite, de compagnies d’assurances et de particuliers fortunés.

Le fonds est au cœur même du secteur, car c’est le moyen par lequel les gestionnaires d’actifs font ce qu’ils font. C’est pourquoi les gestionnaires d’actifs sont souvent appelés « gestionnaires de fonds ».

Les gestionnaires d’actifs tels que BlackRock et Vanguard font l’objet d’un grand intérêt. Ils détiennent des participations importantes dans des milliers d’entreprises. Mais vous plaidez pour que l’on concentre l’attention sur les gestionnaires d’actifs qui contrôlent directement des « actifs réels » tels que les logements, les services publics et les hôpitaux. Pourquoi avez-vous pensé qu’il était important de faire cette distinction dans votre analyse ?

Les gestionnaires d’actifs traditionnels investissent principalement dans des titres financiers cotés en bourse, tels que les actions de sociétés comme Apple et Google, et les obligations émises par ces sociétés et par les gouvernements. En règle générale, ils le font par l’intermédiaire de « fonds indiciels » qui reproduisent les performances des principaux indices de marché, comme le S&P 500 [indice mesurant la performance des 500 plus grandes capitalisations boursières états-uniennes].

Ce n’est pas pour rien que ces gestionnaires d’actifs traditionnels sont au centre de l’attention. C’est là que se fait l’essentiel de l’investissement en termes de volume. Si vous consultez le registre des actionnaires de n’importe quelle grande firme états-unienne cotée en bourse, vous verrez les BlackRocks et les Vanguards.

Je change d’angle d’approche pour plusieurs raisons. Tout d’abord, les gestionnaires d’actifs conventionnels comme BlackRock et Vanguard ont déjà fait l’objet de beaucoup d’analyses en tant que propriétaires de sociétés capitalistes contemporaines. Mais je soutiens également que leur importance est exagérée. Certains prétendent que, parce que ces sociétés possèdent 7 ou 8% de toutes les grandes entreprises, elles contrôlent en quelque sorte l’économie mondiale. Je ne pense pas que ces entreprises aient ce genre de contrôle, ni même qu’elles le souhaitent. Ce n’est pas leur modèle d’affaires.

Je soutiens qu’il existe un tout autre domaine de la gestion d’actifs qui est, à tous points de vue, beaucoup plus directement lié à la vie quotidienne des gens que les activités des BlackRocks et des Vanguards : la propriété et le contrôle par les gestionnaires d’actifs des « actifs réels » dont nous dépendons fondamentalement, comme le logement et les infrastructures – réseaux électriques, systèmes de parcmètres, autoroutes à péage, hôpitaux, écoles, terres agricoles, et ainsi de suite.

Dans la mesure où les gestionnaires d’actifs possèdent les logements et les infrastructures dont nous dépendons, et déterminent le coût de la vie dans ces logements et de l’utilisation de ces infrastructures, ils déterminent également les conditions dans lesquelles ces actifs existent, et ils ont un impact considérable sur notre vie quotidienne, dont on ne parle pas beaucoup.

Vous utilisez parfois des termes comme « extractif » et « colonisateur » pour décrire la relation entre les gestionnaires d’actifs et les actifs réels qu’ils contrôlent. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Si tous les propriétaires privés essaient de faire des bénéfices, les gestionnaires d’actifs ont tendance à être particulièrement impitoyables et déterminés à extraire des profits des actifs qu’ils contrôlent.

Il y a des raisons structurelles à cela. L’une d’entre elles est l’importance des salaires versés par ces sociétés. Selon un article du Financial Times, le salaire moyen chez Blackstone est actuellement d’environ 2 millions de dollars. Si vous êtes Blackstone, il n’est pas possible de payer ce genre de salaires à moins d’être assez impitoyable sur l’extraction des profits des actifs que vous possédez. Vous ne pouvez pas être un propriétaire qui accorde des réductions de loyer aux locataires tout en versant 2 millions de dollars à votre personnel.

De même, les fonds d’investissement gérés par les gestionnaires d’actifs réels facturent des frais très élevés par rapport aux fonds indiciels gérés par des sociétés telles que BlackRock. La norme dans le secteur est de facturer aux investisseurs une commission de gestion de 2% par an et une commission de performance de 20%. Vous ne pouvez facturer ces frais élevés que si vous promettez aux investisseurs des rendements très élevés. Vous ne pouvez obtenir ces rendements élevés que si vous êtes très impitoyable et si vous ne pensez qu’à extraire des profits. En tant que gestionnaire d’actifs, vous êtes donc contraint, de par la nature de votre activité, d’être impitoyable.

Un autre facteur important est l’horizon à court terme de la gestion d’actifs réels. Les gestionnaires d’actifs prétendent être des gardiens engagés et prudents du logement et de l’infrastructure. Mais en réalité, leurs investissements dans les actifs réels sont principalement canalisés à travers des fonds « à capital fixe » [basés sur un nombre fixe d’actions] qui ont une durée de vie fixe – disons 10 ans. Cela signifie – et c’est l’une des choses les plus importantes à comprendre sur l’ensemble du secteur de la gestion d’actifs – que lorsque les gestionnaires d’actifs achètent des logements et des infrastructures, ils le font presque toujours avec l’intention de les vendre dans les sept ou huit ans, voire dans les deux ou trois ans s’ils peuvent faire un gros profit.

En d’autres termes, dès qu’un gestionnaire d’actifs investit dans un logement ou une infrastructure, il pense avant tout à maximiser le prix de vente le plus rapidement possible. S’il s’agit de logements, cela signifie augmenter les loyers aussi vite et aussi haut que possible. Cela signifie qu’il faut minimiser les coûts opérationnels – en investissant de l’argent et en étant un bon propriétaire – en s’en tenant à des solutions de facilité pour l’entretien des actifs.

Pouvez-vous nous en dire plus sur la manière dont le besoin humain fondamental qu’est le logement est tombé sous la coupe des gestionnaires d’actifs, et sur les implications de cette situation ?

Au début des années 1990, les gestionnaires d’actifs ont commencé à investir de manière significative dans les marchés mondiaux du logement, mais cette tendance s’est accélérée après la crise financière de 2008. Tout d’un coup, on s’est retrouvé avec d’énormes stocks de « logements en faillite » en raison des saisies massives, en particulier aux Etats-Unis. A son grand dam, le gouvernement états-unien a permis aux grands gestionnaires d’actifs de s’emparer de grandes quantités de logements à des conditions très favorables.

Depuis lors, les investissements des gestionnaires d’actifs dans le logement n’ont fait qu’augmenter. Il n’est pas surprenant que les loyers aient crû de façon très régulière aux Etats-Unis et dans le monde. Dans de nombreux endroits, il n’y a pas assez de nouveaux logements construits, donc les loyers augmentent, et c’est un secteur dans lequel les gestionnaires d’actifs veulent investir. Les gouvernements n’ont pas empêché les gestionnaires d’actifs d’acheter de nombreux logements. En fait, ils les ont activement encouragés.

Les conséquences de tout cela sont très négatives. D’une part, l’augmentation rapide des loyers dans les logements qui sont passés sous le contrôle des gestionnaires d’actifs et, d’autre part, des résultats délétères dans des aspects de la location autres que le loyer, comme les expulsions. Si l’on examine les taux d’expulsion dans une région métropolitaine donnée et que l’on compare les logements locatifs appartenant à des gestionnaires d’actifs à ceux appartenant à d’autres types de propriétaires, on constate que les taux d’expulsion ont tendance à être nettement plus élevés lorsque les propriétaires sont des gestionnaires d’actifs.

Vous insistez sur la façon dont les gestionnaires d’actifs se sont emparés d’une grande partie de nos infrastructures. Vous affirmez de manière surprenante que « la transition des combustibles fossiles vers les énergies renouvelables représente également une transition vers une société de gestion d’actifs ». Pouvez-vous développer cette affirmation ?

Une chose dont on ne parle presque jamais à propos de la transition énergétique, c’est ce qu’elle signifie en termes de propriété. L’infrastructure énergétique basée sur les combustibles fossiles dans le monde est répartie à parts à peu près égales entre le secteur public et le secteur privé. Les entités publiques sont les principaux propriétaires des actifs liés aux combustibles fossiles. En revanche, si l’on considère les actifs liés aux énergies propres, telles que les énergies renouvelables, l’Etat est largement absent. Il s’agit pour l’essentiel d’une affaire du secteur privé.

Ainsi, à mesure que nous passons de l’énergie brune à l’« énergie verte », nous nous dirigeons vers un type d’infrastructure qui est principalement détenu par le secteur privé, et nous nous éloignons du type d’infrastructure qui est principalement public. Cela ne devrait pas être surprenant. La propriété privée est devenue l’option par défaut de la gouvernance néolibérale au cours des 30 ou 40 dernières années, lorsque la transition vers l’énergie verte a commencé à se produire.

Partout dans le monde, grâce à diverses formes d’incitations, les gouvernements s’appuient sur le secteur privé pour construire des actifs énergétiques verts. Or, dans le secteur privé, où se trouve la majeure partie des capitaux à investir ? Ils sont détenus par les gestionnaires d’actifs. Il n’est donc pas surprenant qu’une grande partie des investissements dans les énergies dites propres soit réalisée par des gestionnaires d’actifs, car ce sont eux qui disposent de la plus grande masse de capitaux pour réaliser ces investissements.

Par exemple, Brookfield Asset Management (Canada), dont je parle, est l’un des plus grands propriétaires d’actifs d’énergie propre au monde, tous types confondus, et pas seulement parmi les groupes de gestion d’actifs. Si vous vous rendez dans les régions sauvages de Suède, où je vis, et que vous voyez un parc éolien, il y a de fortes chances que BlackRock en soit le propriétaire.

Ainsi, alors que nous passons des combustibles fossiles aux énergies propres, nous passons également de plus en plus à ce que j’appelle la « société des gestionnaires d’actifs ». Et je pense qu’il faut s’en méfier. Lorsque des gestionnaires d’actifs sont propriétaires d’infrastructures, les résultats ne sont généralement pas favorables pour la société.

De plus, en comptant sur le secteur privé en général et sur les gestionnaires d’actifs en particulier pour conduire la transition énergétique, nous comptons de facto sur un subventionnement continu de ces investissements par les pouvoirs publics. Les gestionnaires d’actifs sont des institutions peu enclines à prendre des risques. Lorsqu’il s’agit d’énergie propre, ils s’attendent à ce que les gouvernements réduisent le risque de ces investissements par des subventions, exactement comme l’a fait, par exemple, le gouvernement états-unien avec la loi sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act). En liant les sociétés au subventionnement à long terme de l’énergie propre détenue par des gestionnaires d’actifs, le secteur public prend une grande partie du risque sans aucune contrepartie.

La société de gestion d’actifs alternatifs la plus connue aujourd’hui est peut-être le groupe Blackstone, dont vous parlez dans votre livre. En quoi Blackstone incarne-t-il les principales caractéristiques de la société de gestion d’actifs ?

Blackstone est devenu le paratonnerre d’une critique plus large des gestionnaires d’actifs et du capital-investissement. L’une des raisons pourrait être les personnages impliqués. Stephen Schwarzman, qui a cofondé Blackstone en 1985 et en est le PDG depuis lors, est un personnage haut en couleur. Il a soutenu ouvertement Donald Trump, ce qui a attiré beaucoup d’attention sur lui. Chaque fois que des hommes politiques états-unien ont fait allusion à un contrôle du secteur de la gestion d’actifs, il a réagi de manière très agressive.

Il y a aussi la taille de Blackstone. De toutes les sociétés de gestion d’actifs, Blackstone est le plus grand propriétaire de logements au monde. Blackstone est devenu le plus grand propriétaire de logements pour une famille aux Etats-Unis après avoir créé Invitation Homes.

Mais si Blackstone est une société de gestion d’actifs très importante, elle ne fait rien de fondamentalement différent des autres gestionnaires d’actifs. Ils adoptent tous le même type de modèle. Blackstone parvient à lever plus de capitaux auprès des investisseurs, mais elle ne fait pas fondamentalement les choses différemment.

La société de gestion d’actifs représente-t-elle, à vos yeux, une forme fondamentalement nouvelle de capitalisme ?

Je ne pense pas que le rôle plus important des gestionnaires d’actifs dans le capitalisme contemporain représente une nouvelle forme de capitalisme. Cependant, je pense que l’importance des gestionnaires d’actifs est la principale manifestation de la dimension rentière du capitalisme d’aujourd’hui.

Il y a toujours eu un aspect du capitalisme qui consiste à prendre le contrôle monopolistique de ressources ou d’actifs clés et à gagner des rentes grâce à ce contrôle. Au cours des dernières décennies, nous sommes entrés dans une période du capitalisme où cet aspect rentier est particulièrement important et où les rentiers ont accumulé beaucoup plus de pouvoir et de profit qu’auparavant. La politique néolibérale a mis en place les conditions d’un renouveau de la rente, et les gestionnaires d’actifs sont l’incarnation première de cette dimension rentière du capitalisme.

Vous présentez un argumentaire convaincant sur le pouvoir et l’emprise des gestionnaires d’actifs sur nos vies et sur la manière dont ils sont structurellement organisés pour surexploiter les travailleurs et travailleuses ainsi que les locataires. Que faut-il donc faire pour contester leur pouvoir ?

Je ne pense pas que les gestionnaires d’actifs soient très vulnérables à l’heure actuelle. Leur force vient en partie du fait qu’ils sont largement invisibles pour beaucoup de gens. Et ils ont réussi à tromper la vigilance de nombreux décideurs politiques. Ils ont réussi à persuader les gouvernements qu’ils sont de bons gardiens des actifs qu’ils contrôlent et qu’ils aident les retraités ordinaires à obtenir de bons rendements sur leur épargne-retraite.

S’ils ont un point faible, c’est peut-être que de nombreuses recherches montrent que les types de gestionnaires d’actifs que j’étudie dans mon livre ne produisent pas des rendements particulièrement élevés. Une fois déduits les frais qu’ils facturent, de nombreuses études montrent qu’ils n’offrent pas des rendements beaucoup plus élevés en moyenne qu’un fonds indiciel de base. En fait, les cas d’échec catastrophique sont plus fréquents.

Peut-on faire quelque chose ? Bien sûr. La plus évidente est de les empêcher de posséder certains types d’actifs. Rien n’empêcherait les gouvernements de dire que certains types d’actifs ne doivent tout simplement pas être détenus par certains types d’acteurs, tels que les gestionnaires d’actifs. Vous pourriez l’interdire, et ce serait probablement très populaire.

On pourrait aussi rendre les actifs réels moins attrayants pour les investisseurs. Par exemple, Blackstone a commencé à acheter beaucoup de logements à Berlin en 2017, mais le gouvernement local de Berlin a alors introduit une nouvelle réglementation qui limiterait la capacité des propriétaires à augmenter les loyers et même à devoir baisser certains loyers. Blackstone a immédiatement déclaré : « Dès lors, nous n’investissons plus dans les logements à Berlin. » On peut faire des choses comme ça. Malheureusement, environ un an plus tard, la loi berlinoise sur les loyers a été annulée, mais le fait que Blackstone ait dit qu’elle n’investirait plus montre qu’il est possible d’adopter des mesures pour rendre ces actifs peu attrayants.

Entretien avec Brett Christophers conduit par Derek Seidman

Entretien publié sur le site Truthout, le 5 juillet 2023 ; traduction rédaction A l’Encontre le 6 juillet 2023 :

http://alencontre.org/economie/econ...


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