Alors que de nombreux membres des services de sécurité intérieure figurent dans des dossiers de terrorisme d’extrême droite, les autorités françaises agissent a minima. En Allemagne, au contraire, les dérives sont attaquées de front.
« Chez nous, on a une bonne partie d’anciens militaires », se vantait Logan N., condamné en 2021 à neuf ans de prison pour association de malfaiteurs terroriste en lien avec l’extrême droite dans des messages privés que Politis s’est procurés : « Nous, c’est pareil », lui répondait son interlocuteur, membre du groupuscule Jeune Nation.
Lorsque Logan lui expose son programme d’actions violentes, il est formel : « Des militaires de l’armée régulière vont se joindre à nous » car « dans l’armée, des régiments entiers sont remplis de NS ». Comprendre « nationaux-socialistes », autrement appelés des néonazis.
Dès 2015, ces jeunes militants sont pleinement conscients de l’impact de leurs idées chez les militaires. Ça se passe bien avant que Mediapart ne révèle en 2021 la présence de nombreux soldats ouvertement néonazis. Avant, aussi, que la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) ne s’inquiète, dans une note interne de 2017, qu’une cinquantaine de profils suivis pour leurs liens avec l’extrême droite violente soient policiers, gendarmes ou militaires.
Une infiltration qu’on retrouve dans les dossiers terroristes d’extrême droite ces dernières années : quasiment tous comportent des profils issus des services de sécurité. S’ils sont principalement militaires, la police n’y échappe pas. Récemment, un policier du Var a été suspendu à la suite de son implication dans le groupe « FR Deter », chaîne Telegram où s’échangent des messages à caractère raciste et des appels à l’action violente. Le parquet de Paris a ouvert une enquête pour apologie du terrorisme, menaces de mort et incitation à la haine.
Mais la relation de ces mouvances avec les forces de sécurité intérieure reste ambivalente. L’ancien militaire Daniel R., artificier du groupuscule Action des forces opérationnelles (AFO), qui prônait « une guerre de terreur », a reconnu lors de sa garde à vue que « l’ennemi devenait un peu tout le monde, dont les représentants de l’ordre et de la loi, ce qui est logique, puisque nous devenions hors la loi ». La police, elle « m’emmerde plus qu’elle ne m’aide », écrivait Logan N. à l’une de ses anciennes collègues.
Pour autant, le milieu policier, à l’instar du militaire, suscite les espoirs de recrutement des groupes d’extrême droite pour deux raisons fondamentales : son savoir-faire opérationnel et l’accès facilité aux armes. Lors de son audition devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, le 3 avril dernier, le ministre délégué des Outre-mer, Jean-François Carenco, reconnaissait « la présence d’un nombre significatif d’individus connus au titre de leur proximité avec l’ultradroite parmi les forces armées et de sécurité ».
Il admettait dans le même temps : « L’infiltration d’institutions sensibles entraîne des vulnérabilités susceptibles de mettre en péril des opérations ou d’attenter directement à la sûreté de l’État. » Impossible cependant de connaître l’ampleur du phénomène.
Nadia Sweeny
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