Ode au peuple

vendredi 14 avril 2023.
 

La vieillesse s’emparant de plus en plus de moi, mais ayant gardé un goût immodéré pour les facéties, façon de la conjurer, je me suis livré à un petit exercice littéraire. Je me suis permis, ô sacrilège, de démarquer soigneusement le célèbre monologue de Don Diègue, dans le Cid de Corneille. Évidemment, dans un sens plus conforme à mon parcours.

Ce faisant, sauf à deux endroits, je n’ai pas trahi la prosodie du texte. Ce ne sont que des alexandrins. Mais deux vers comportent treize pieds. Il y a parfois quelques accommodements d’auteurs que j’appelle pompeusement licences.

Disons que ce texte est un pastiche, sans aucun mauvais esprit.

Ô sages ! Ô gracieux espoirs ! Ô vieillesse amie !

Je n’ai tant bien vécu que pour ma vidamie.

Et me suis-je blanchi dans mes travaux ouvriers

Que pour voir en un jour flétrir tant de lauriers ?

Mon bras, qu’avec respect bien des sages admirent,

Mon bras, qui tant de fois a voulu assagir,

A tant de fois pris parti pour les sans emploi

N’a jamais trahi les siens, ni rien fait pour soi.

Ô doux souvenir de ma superbe passée !

Œuvre de jours ni oubliés, ni effacés !

Nouvelle dignité, séant à mon bonheur !

Principe élevé d’où surgit tout mon honneur !

Faut-il de votre éclat voir triompher ce conte,

Et vivre sans vengeance, ou mourir dans la honte ?

Peuple, sois de mon ego le bon gouverneur !

Ce haut rang n’admet point un homme sans honneur ;

Et ton jaloux orgueil, par ce pinacle insigne,

Malgré l’adversité, m’en a su rendre digne.

Et toi, de tes exploits glorieux instrument,

Tu as su en faire un magnifique ornement,

De fer, jadis tant craint, et qui, pour sa défense,

M’avait servi de parade, et non pas d’offense,

Va, porte haut désormais l’honneur des humains.

Prends, pour me combler, les rênes enfin bien en mains.


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