Bélugas de l’Arctique et bouleversements climatiques, que de défis à l’horizon (WWF Canada)

samedi 13 août 2022.
 

par Brandon Laforest, spécialiste principal – Espèces et écosystèmes, programme Arctique, WWF-Canada

Chaque année, environ 57 000 bélugas entreprennent la migration vers leur lieu d’estivage, dans l’ouest de la baie d’Hudson au Canada, où se retrouve la plus grande population de bélugas dans le monde en saison estivale. Les bélugas s’y rendent pour se nourrir, donner naissance à leurs petits qui passeront ainsi les premiers mois de leur vie dans les eaux peu profondes, plus tempérées et riches en nutriments des estuaires des rivières Churchill, Nelson et Seal. Une fois la belle saison terminée, ils reprendront la route en direction du bassin Foxe et du détroit d’Hudson, où ils passeront l’hiver dans les chenaux d’eau libre et les polynies.

À l’heure actuelle, aucune mesure n’est en place pour assurer la protection des habitats d’estivage et d’hivernage des populations de bélugas de l’ouest de la baie d’Hudson, que le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) a pourtant inscrit sur la liste des espèces dont le statut est préoccupant. En outre, cette population fait actuellement l’objet d’une nouvelle évaluation au terme de laquelle elle pourrait fort bien se retrouver sur la liste des espèces en péril de la Loi sur les espèces en péril.

À l’instar de bien d’autres espèces dont la vie est indissociable de la banquise, le béluga subit les contrecoups du recul des glaces causé par le réchauffement planétaire. On sait bien que le volume de trafic maritime passant par le port de Churchill risque d’augmenter au rythme du recul des glaces dans la baie d’Hudson, ce qui ne fera qu’accroître le potentiel de déversement d’hydrocarbures dans la région. Or un tel scénario serait dévastateur pour les habitats côtiers où les bélugas viennent se réfugier chaque année.

Les chercheurs ont également constaté un changement de régime en cours dans la structure de la communauté écologique – ou l’écosystème – de la baie d’Hudson. De fait, les baisses bien documentées des populations de poissons dépendants des glaces dans la baie d’Hudson – morue arctique, par exemple – et les hausses concomitantes d’espèces évoluant traditionnellement en eaux plus libres des régions subarctiques ou nordiques plus tempérées – le capelan et le lançon – sont lourdes de conséquences potentielles sur la chaîne alimentaire marine à la base de l’écosystème de la baie d’Hudson.

Les Inuits et les scientifiques qui étudient cette région ont également constaté une présence accrue des épaulards, à mesure que se réchauffe la baie d’Hudson. Des recherches menées conjointement par les scientifiques et les communautés côtières ont permis de documenter la hausse exponentielle d’épaulards observés dans la région, alors que cette espèce n’était pas connue à ces latitudes avant le milieu des années 1990. Il a également été établi que le béluga – lorsqu’il se trouve dans la baie d’Hudson – devient la principale proie des épaulards. Voilà une menace supplémentaire qu’entraîne le réchauffement climatique sur la population de bélugas de la baie d’Hudson.


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