Rachel Kéké, femme de chambre, entre à l’Assemblée et balaie Roxana Maracineanu

jeudi 23 juin 2022.
 

Elle se définit comme une « guerrière » et veut « faire du bruit » au palais Bourbon. Porte-parole de l’emblématique grève des femmes de chambre de l’Ibis Batignolles, Rachel Kéké entend bien pousser les portes de l’Assemblée pour y porter la voix des travailleurs « essentiels. »

Ce 19 juin, Roxana Maracineanu n’a pas profité du report des électeurs LR, dont le candidat Vincent Jeanbrun était arrivé 3e avec 18,32 % des suffrages exprimés au 1er tour.

Dimanche 12 juin, Rachel Kéké a eu la préférence des électeurs dans la 7ème circonscription du Val-de-Marne, face à l’ex-ministre des Sports Roxana Maracineanu (LREM), avec 37,22% des voix contre 23,77%. La plus emblématique des figures issues des luttes syndicales

Agée de 47 ans et forte d’un parcours rempli d’épreuves qui détonnent dans le monde politique, la Franco-Ivoirienne est sans doute la plus emblématique des figures issues des luttes syndicales et associatives que la coalition de gauche (Nupes) a mis en avant dans ces élections.

« Ils voient que ma lutte est sincère et que je suis vraie » souligne la candidate qui précise : « la majorité des gens qui habitent ces quartiers populaires sont ceux qui assurent les métiers essentiels et ce que nous sommes, c’est la réalité. »

« C’est ce que j’appelle une leader de masse », dit d’elle le député LFI Eric Coquerel. « Elle a quelque chose qui magnétise, elle est forte, elle a les mots justes, elle n’a pas besoin de lire » lors de ses prises de parole, explique-t-il.

« front républicain contre l’extrême gauche »

Invitée sur France Info lundi matin, Roxana Maracineanu (LREM), arrivée en 2e position dimanche dernier, a appelé « toutes les personnes qui n’ont pas voté pour Rachel Kéké » à la rejoindre dans son « front républicain contre l’extrême gauche ». Des propos qui ont déclenché une vive polémique à gauche et que Rachel explique : « Elle a conscience qu’elle a du lourd en face d’elle et c’est la peur qui la fait réagir de la sorte. »

Entre 2019 et 2021, cette militante CGT s’est mobilisée durant 22 mois pour améliorer les salaires et les conditions de travail des femmes de ménage face au « mépris » de la direction.

« C’est une vraie combattante, quand on l’a rencontrée dans le cadre de cette grève elle s’est très vite affirmée comme représentante de ses collègues », explique Claude Lévy, représentant de la CGT-HPE (Hôtels de prestige et économiques), ne tarissant pas d’éloges sur cette « autodidacte de la lutte. »

Cet hôtel devant lequel Rachel Kéké a commencé à se tailler une réputation syndicale et politique, elle a continué d’y travailler pendant le début de sa campagne avant de prendre un congé pour se consacrer pleinement aux législatives.

Mère de cinq enfants, Rachel Kéké est née en 1974 dans la commune d’Abobo, au nord d’Abidjan en Côte d’Ivoire, d’une mère vendeuse de vêtements et d’un père conducteur d’autobus.

A 12 ans, au décès de sa mère, c’est elle qui se retrouve en charge de ses frères et soeurs. Elle arrive en France en 2000 et commence à travailler comme coiffeuse avant d’entrer dans l’hôtellerie.

Dans l’Hexagone son parcours est mouvementé : elle déménage souvent, alternant entre les squats ou les appartements d’amis en banlieue parisienne, avant de se fixer grâce au DAL (Droit au logement). Un pays qu’elle « adore »

Naturalisée française en 2015 - un pays qu’elle « adore » et pour lequel avait combattu son grand-père pendant la Seconde Guerre mondiale - elle habite maintenant les Sorbiers, une cité de Chevilly-Larue (Val-de-Marne) d’où elle a lancé sa campagne pour les législatives.

Les candidats sous les couleurs de l’alliance de la gauche (Nupes) sont arrivés en tête dans huit des onze circonscriptions du Val-de-Marne au premier tour des élections législatives. Un résultat qui laisse Luis Ferreira, militant insoumis, confiant pour ce deuxième tour : « Les candidats mélenchonistes ont tous fait un raz de marée dans le Val-de-Marne, il n’y a pas de raison qu’elle échoue. Ici, elle a la côte ! »

Celle qui se définit comme « féministe » et « défenseuse des gilets jaunes » a paré d’éventuelles attaques sur son manque de formation. « Si tu me parles avec le français de Sciences Po, je vais te répondre en banlieusard ! », a-t-elle mis en garde.

« Elle a tout à apprendre d’un point de vue de la politique politicienne », détaille Hadi Issahnane, conseiller municipal LFI de Chevilly-Larue, mais « elle peut enseigner plein de choses de la vie réelle à plein de politiques. »

« On n’est pas loin d’une icône, au sens littéral de notre combat politique. Elle incarne cela de manière naturelle. »


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message