2011 Année chaude Le climat et les hommes

vendredi 6 janvier 2012.
 

Météo France vient d’annoncer que l’année 2011 a été la plus chaude "depuis qu’on fait des relevés météo" avec une température supérieure à la moyenne de 1,5°, ce qui est considérable.

Le printemps 2011 " a été "exceptionnellement chaud" avec des températures dépassant en moyenne de 4 degrés les normales saisonnières en avril, et de 2,4 degrés en mai.

L’automne 2011 a également connu des moyennes élevées, en particulier en novembre (trois degrés au dessus de la moyenne des mois de novembre).

Tous les mois de 2011 ont bénéficié d’une chaleur supérieure à la normale (sauf juillet).

Cette année chaude s’est accompagnée d’un fort déficit pluviométrique, avec des précipitations environ 20% inférieures en moyenne à l’échelle du pays (parfois 40% dans le Sud-Ouest, le plus touché).

Ce réchauffement climatique se constate-t-il aussi au niveau international ? OUI. Les treize années les plus chaudes de la planète sont toutes concentrées sur les quinze dernières années, depuis 1997, relevait l’Organisation météorologique mondiale ; 2011 conforte ce constat.

Ne sous-estimons pas l’importance de ces statistiques. La Terre a toujours connu des phases de refroidissement et d’autres de réchauffement mais :

- il n’a jamais été aussi rapide

- il touchait des populations nettement moins nombreuses qu’aujourd’hui

- il a toujours entraîné des conséquences importantes sur les sociétés concernées sans sous-estimer le rôle essentiel des processus internes aux sociétés.

Le 20 novembre 2009, Stéphane Foucart concluait un article dans Le Monde par cette affirmation« Les changements qui s’annoncent mettent en place un monde auquel Homo sapiens, apparu voilà 200 000 ans, n’aura jamais été confronté. » En lisant cette phrase lourde de sens, je n’ai pu m’empêcher de remémorer l’importance de changements climatiques moins importants qui ont lourdement influé sur les humains. Si le changement doit être plus important, le capitalisme n’y survivra pas mais mieux vaudrait le remplacer avant par une société plus apte à maîtriser son avenir.

1) Le réchauffement climatique des années 10000 avant notre ère

En un millier d’années, la fonte des glaciers élève le niveau des mers d’environ 300 mètres et repousse parfois les rivages océaniques de 100 kilomètres. Heureusement, la population mondiale n’atteint que 2 ou 3 millions d’individus, soit moins que de nombreuses villes actuelles placées en bord d’océan ( Tokyo 36 millions, New-York 19 millions, Bombay 19 millions, shangaï 15 millions, Calcutta 15 millions, Dacca 13,5 millions, Buenos Aires 13 millions, Los Angeles 12,5 millions, Rio de Janeiro 12 millions, Osaka 11,5 millions, Manille 11 millions, Istamboul 10 millions...).

Le mode vie ainsi que le monde conceptuel, religieux et idéologique des populations européennes se voit complètement bouleversé. Il reposait de façon importante sur les grands animaux dont la chasse apportait la nourriture ; ceux-ci disparaissent (mammouths...) ou remontent loin vers le Nord (Rennes). « La raréfaction puis la disparition de la grande faune ont sûrement causé un profond désarroi chez ces hommes, auxquels le monde des ancêtres, des esprits et les animaux tant vénérés échappait à tout jamais » ( Jean Airvaux, préhistorien). Les grottes sont abandonnées au profit d’abris sous roche de surface. Le gibier devenant de plus en plus petit, il va falloir inventer de nouvelles armes (l’arc en particulier).

Les zones glaciaires deviennent tempérées comme l’Europe et voient se former des tribus de chasseurs cueilleurs en lieu et place des petits clans familiaux. Peu à peu, les anciennes zones tempérées se désertifient entraînant une surpopulation au long des fleuves.

L’apparition du néolithique (agriculture, sédentarisation, élevage, multiplication de villages, premières formes de cités et d’Etats) ne peut être séparée de ce contexte.

2) Réchauffement climatique et formation de la Mer Noire

Le réchauffement climatique entraîne la fonte du grand glacier qui couvrait l’Amérique du Nord et la formation d’un immense lac froid que les spécialistes appellent le grand lac Agassiz séparé de l’océan par une digue de glace. Vers 6200 avant notre ère cette digue rompt et l’eau du lac se déverse dans l’Atlantique nord. Les courants marins sont stoppés momentanément et l’Europe connaît un refroidissement important de quelques décennies. Les eaux de l’océan s’élèvent d’un mètre et demi. La Méditerranée gonfle d’autant, franchit les Dardanelles et le Bosphore pour se déverser dans les régions qui forment aujourd’hui la Mer Noire. Des populations ainsi obligées de fuir se répandent vers l’Europe contribuant à y apporter leur agriculture et leurs langues.

3) Réchauffement climatique et désertification ont joué sur la formation des civilisations égyptienne puis mésopotamienne...

Vers 4200 avant notre ère, le Sahara commence à se désertifier. Les populations se réfugient particulièrement à l’Est dans la vallée du Nil.

Le même processus se retrouve plus tard au Moyen Orient avec un regroupement humain dense dans les vallées de l’Euphrate et du Tigre. De même pour l’Iran et le Pakistan actuels.

Il est interessant de noter que les grandes civilisations des 4ème, 3ème et 2ème millénaires avant notre ère surgissent dans les régions où l’accroissement des forces productives (essentiellement nombre d’habitants) sont trop importantes pour l’ancien mode de vie tribal.

4) Climat et fin de l’empire romain

Les historiens socialistes ont déjà souvent débattu des causes de l’affaiblissement puis de la disparition de l’empire romain. Ce n’est pas mon sujet ici.

Par contre, une étude publiée par le magazine Science est à verser au dossier. D’après l’analyse des anneaux de croissance de 9000 échantillons d’ arbres, des dendrochronologues ont retracé les changements climatiques majeurs.

Pour eux, les étés chauds et humides des 200 années avant notre ère et des 200 années après ont contribué à la formation de l’empire romain alors que de mauvaises conditions météorologiques pour l’agriculture au 3ème siècle de notre ère correspondent à la période d’affaiblissement de cette civilisation.

Même cause et même phase de progrès aux 12ème et 13ème siècles puis conditions climatiques et calamités du 14ème.

5) 8 juin 1783 Le volcan Laki Eyjafjöll entre en éruption. Contribution du climat au déclenchement de la Révolution française

6) Changements climatiques et révolutions en Chine

Tout texte sur le thème "Changements climatiques et révolutions sociales" ne peut ignorer la Chine. Sur 3000 ans, tout dérèglement climatique important a entraîné une révolution populaire tellement profonde qu’elle était inarrêtable. Toutes les grandes dynasties ont fini lors d’années de sécheresse, d’inondations...

Notre site a déjà mis en ligne un article sur l’une de ces révolutions paysannes :

8 janvier 881 : La révolte paysanne chinoise de Houang Tchao pénètre dans Chang’an (capitale impériale et plus grande ville du monde)

Conclusion

Je reprends ici celle de la revue Science sur les changements climatiques. Ces résultats "pourraient remettre en question l’hésitation actuelle, politique et fiscale" pour ralentir le changement climatique accéléré du XXIe siècle.

Notre lecteur peut également ouvrir notre rubrique changement climatique en cliquant sur le lien ci-dessous :

http://www.gauchemip.org/spip.php?r...

Gaz à effet de serre : La course à l’abîme (éditorial national du PG)

La banquise arctique bat des records de fonte

Climat : « Nous n’avons jamais observé des températures aussi intenses »

Jacques Serieys


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