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Jean-Luc Mélenchon, président du groupe parlementaire de la France insoumise (LFI) est en déplacement depuis ce dimanche 18 juillet 2021 et jusqu’à mercredi au Burkina Faso, sur les traces de Thomas Sankara. Un dirigeant visionnaire et révolutionnairement écologiste, féministe et marxiste, un fervent opposant à la dette et à l’impérialisme, et un farouche défenseur de la souveraineté populaire. Une figure pour le panthéon de l’insoumission.
Le Che Guevara africain. Thomas Sankara est bien plus que celui qui a été le président du Conseil national révolutionnaire (CNR) du Burkina Faso de 1983 à 1987. Il a été un dirigeant révolutionnaire sous tous les aspects. Son action raisonne particulièrement fort en 2021.
Production locale, circuits courts, protectionnisme solidaire, lutte contre la déforestation… L’action de Thomas Sankara en matière d’écologie dès le début des années 80 reste encore aujourd’hui avec peu d’égal. Le président du Conseil national révolutionnaire du Burkina a été le premier sur le continent à créer un ministère de l’environnement et à multiplier les campagnes de lutte contre le déboisement, les feux de brousse et la chasse illégale. En avril 1985, il lance ainsi les « trois luttes » : fin des coupes de bois abusives et campagne de sensibilisation concernant l’utilisation du gaz, fin des feux de brousse et fin de la divagation des animaux.
Celui qui a lancé le le premier programme africain de lutte contre la désertification et la déforestation, est allé d’actions symboliques, comme la coutume de planter un arbre à chaque grande occasion, à une politique en profondeur pour développer l’agriculture locale. Thomas Sankara a en effet été l’un des premiers à mettre en place une politique de protectionnisme solidaire et écologiste en interdisant les importations de fruits et de légume pour protéger la production locale et les circuits courts.
Sankara a réussi grâce à sa politique à assurer la souveraineté alimentaire de son pays. Le rapporteur spécial pour le droit à l’alimentation pour les Nations unies déclare à son sujet en 1986 : « Il a vaincu la faim : il a fait que le Burkina, en quatre ans, est devenu alimentairement autosuffisant ». Son objectif de deux repas et de dix litres d’eau par jour et par personne est en effet atteint en 1986, en seulement quatre ans.
Moins connu, le volet féministe de la politique de Thomas Sankara a aussi été révolutionnaire pour l’époque. Il a ainsi mis fin à la dot et au lévirat, ce type de mariage forcé où le frère d’un défunt épouse la veuve de son frère, le considérant comme une marchandisation des femmes, aux mariages forcés dans leur ensemble en instaurant un âge légal, a interdit l’excision, et a tenté de lutter contre la prostitution et la polygamie.
Sankara a également pris une mesure symbolique forte : instaurer une journée où les hommes vont au marché, pour sensibiliser sur les tâches ménagères. Enfin, toujours dans la lignée de sa politique de protectionnisme solidaire et écologiste, en obligeant les fonctionnaires à porter l’habit traditionnel (Faso dan fani), l’action de Sankara a conduit de nombreuses femmes à obtenir leur propre revenu en tissant ce vêtement directement chez elles.
Plus célèbre, le combat de Thomas Sankara contre le remboursement de la dette. Le chef d’État révolutionnaire s’est insurgé à de multiples reprises contre les plans d’austérité et l’impérialisme du Fonds monétaire international (FMI) imposés au nom du remboursement de la dette. Son discours le plus célèbre sur le sujet, est sûrement celui prononcé le 29 juillet 1987 à Addis-Abeba à l’occasion d’un sommet de l’Organisation de l’unité africaine : « la dette ne peut pas être remboursée parce que si nous ne payons pas, nos bailleurs de fond ne mourront pas. Soyons-en sûrs. Par contre, si nous payons, c’est nous qui allons mourir. Soyons en sûrs également ».
Redonner le pouvoir au peuple, tel est le but des Comités de défense de la révolution (CDR) ouverts à toutes et tous, que crée Thomas Sankara à son arrivée au pouvoir. Coordonnés par le Conseil national de la révolution, ces groupes ont pour objectif de réduire la malnutrition, la soif (à travers la construction massive de puits et de retenues d’eau), la diffusion de maladies (grâce aux politiques de « vaccinations commandos », notamment des enfants) et l’analphabétisme.
Celui qui avait été banni de la capitale pour avoir déclaré en direct à la télévision « malheur à ceux qui bâillonnent le peuple », est resté un fidèle défenseur de la souveraineté populaire une fois au pouvoir. Avec des déclarations qui ont des forts échos en 2021 : « ceux qui ne se préoccupent du peuple qu’avant chaque acte électoral, n’ont pas un système réellement démocratique. […] On ne peut concevoir la démocratie sans que le pouvoir, sous toutes ses formes, soit remis entre les mains du peuple ; le pouvoir économique, militaire, politique, le pouvoir social et culturel ».
Enfin l’action de Thomas Sankara, et l’image qu’il a laissé, est celle de l’homme intègre. Avec des mesures symboliques comme l’interdiction pour les membres de son gouvernement de voyager en classe affaire, la vente des voitures de luxe et l’obligation de rouler en Renault 5 ou encore la réduction du salaire des ministres et des hauts fonctionnaires. Une action s’inscrivant dans une logique marxiste : « on ne pense ni aux mêmes choses ni de la même façon selon que l’on vit dans une chaumière ou dans un palais ».
Le déplacement d’une délégation de députés insoumis, composée de Jean-Luc Mélenchon, Mathilde Panot et Bastien Lachaud, au Burkina sur les traces de Thomas Sankara est donc un symbole fort. À l’occasion d’un discours au mémorial Thomas Sankara sur le lieu de son assassinat, Jean-Luc Mélenchon a rendu un vibrant hommage à celui qu’il considère comme une figure à inscrire au panthéon de l’insoumission.
Le leader des insoumis a rappelé que Sankara était un précurseur de l’écologie politique, de la lutte contre le patriarcat, et a insisté sur son action pour la souveraineté alimentaire ainsi que sur leur vision commune de la francophonie. Jean-Luc Mélenchon a également insisté sur la force de sa rencontre avec Le Balai Citoyen, le mouvement burkinabé qui a été l’outil de la révolution citoyenne de 2014 dans le pays. Le leader des insoumis a souligné les similitudes très fortes qui existent entre ce mouvement et La France insoumise, notamment leur organisation en groupes d’actions très proche de ceux des insoumis.
Thomas Sankara et la révolution citoyenne burkinabè, des modèles d’insoumission.
Par Pierre Joigneaux.
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