Des goûts et des odeurs... Repoussante initiative de la mairie d’Argenteuil

vendredi 31 août 2007.
Source : l’Humanité
 

Exclusion. La municipalité a acheté, en juillet, un répulsif pour chasser les SDF du centre-ville. Une initiative qui suscite un rejet unanime de la classe politique.

L’« affaire » a éclaté vendredi. Une fuite locale, aussitôt confirmée par la municipalité d’Argenteuil (Val-d’Oise). La ville du député maire Georges Mothron (UMP) a acheté, cet été, du Malodore, un répulsif odorant, pour déloger les SDF installés en centre-ville. « Nous avons été alertés par des employés de la voirie qui s’inquiétaient de voir arriver des produits qu’ils n’utilisaient pas auparavant », raconte Jean-Jacques Lecomte, responsable CGT des agents territoriaux d’Argenteuil. « Les collègues ont refusé d’employer le répulsif quand ils ont compris son utilité. » Et d’ajouter : « Au-delà de l’éventuelle toxicité du produit, c’est le principe même qui est révoltant. »

Inhumanité et mépris

Des paroles qui trouvent écho chez les partis d’opposition. « Avant, la municipalité se contentait d’envoyer des policiers pour déloger les sans-domicile. Avec ce répulsif, on franchit un stade supplémentaire », commente Mouloud Bousselat, conseiller municipal PCF, quand son secrétaire départemental, Bernard Calabuig, dénonce « un degré intolérable d’inhumanité et de mépris des droits des individus ». Même tonalité, ou presque, chez la ministre du Logement et de la Ville, Christine Boutin, qui « dénonce avec la plus grande fermeté de tels procédés. Le principe même de l’utilisation de produits de ce type constitue en effet une atteinte à la dignité de la personne humaine parfaitement inacceptable », précise un communiqué publié hier.

Militant Verts à Argenteuil, Valentin Teixeira ne semble pas surpris par l’initiative. « C’est une nouvelle illustration de la politique sociale de la ville. Au début du mois d’août, Georges Mothron avait signé un arrêté antimendicité, que nous avons contesté devant le préfet. » Cosignée par le PCF et le MRC, cette requête en annulation doit faire, aujourd’hui, l’objet d’une nouvelle formulation complétée par les éléments nouveaux à disposition. « Nous espérons que le préfet demande au juge l’annulation de l’arrêté », poursuit le militant Verts.

Premier adjoint au maire, Philippe Metezeau souhaite remettre en perspective le débat. S’il confirme la commande, par la municipalité, de Malodore, il récuse tout ordre donné aux employés d’utiliser ce produit. « Au mois de juillet, une réunion entre acteurs politiques locaux et riverains avait listé plusieurs solutions, dont l’emploi d’un répulsif, comme le font déjà d’autres communes », rapporte Philippe Metezeau. Et de s’interroger : « Comment empêcher ces personnes de stationner dans la mesure où elles refusent les diverses solutions proposées ? » Car cette polémique naissante sur l’utilisation ou non de Maladore occulte l’aspect social de la situation.

À Argenteuil, c’est un fait, plusieurs SDF sont, en effet, installés en centre-ville, notamment près de l’issue de secours du centre commercial Côté Seine. Les versions divergent ensuite quant à leur prise en charge. « Depuis un an, nos services sont régulièrement en contact avec ces personnes. Il leur a été proposé des solutions d’hébergement d’urgence qu’ils ont refusées », témoigne l’adjoint, qui « comprend » l’exaspération grandissante des riverains. Une version catégoriquement contestée. « Il existait un centre pour les sans-logis que la municipalité a fermé à son arrivée en 2001 », affirme, au contraire, Jean-Jacques Lecomte. « Nous l’avons effectivement fermé, mais pour en ouvrir un nouveau, accessible été comme hiver », rétorque Philippe Metezeau, dans une improbable partie de ping-pong qui ne fait que commencer.

Adrien Viguié (lu dans l’Huma)


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