Algérie : des journalistes condamnés à de lourdes peines de prison

mercredi 9 septembre 2020.
 

La campagne de harcèlement des médias est de plus en plus offensive. Deux journalistes reconnus ont récemment été condamnés à de lourdes peines de prison pour avoir simplement exprimé leurs opinions ou couvert des manifestations.

Depuis février 2019, le mouvement de protestation du Hirak appelle à un changement politique radical en Algérie. Dans ce contexte, au moins huit journalistes ont été emprisonnés sur la base d’accusations fausses simplement pour avoir couvert les manifestations du mouvement ou pour leurs publications sur les réseaux sociaux. Plusieurs sites Internet d’information connus pour leur position critique à l’égard du gouvernement ont même vu leur accès aux réseaux algériens bloqués.

Les autorités algériennes sont prêtes à tout pour réduire au silence les voix critiques.

Harcèlement judiciaire de journalistes

Ces derniers temps, de nombreux journalistes ont été sanctionnés simplement pour avoir fait leur travail. Le 10 août 2020, le tribunal de première instance de Sidi M’hamed, à Alger, a condamné le journaliste de renom Khaled Drareni à trois ans de prison pour avoir couvert une manifestation du mouvement de protestation du Hirak, ainsi que pour ses interventions dans des médias étrangers. Il a été déclaré coupable en même temps que Samir Benlarbi et Slimane Hamitouche, deux figures importantes du Hirak, tous deux condamnés à deux ans de prison avec sursis. Khaled Drareni, Samir Benlarbi et Slimane Hamitouche ont fait appel de leur condamnation, et un procès en appel doit s’ouvrir le 8 septembre 2020.

Le 24 août 2020, un tribunal de première instance de la ville de Constantine a condamné Abdelkrim Zeghileche, directeur de la radio indépendante Radio Sarbacan, à deux ans d’emprisonnement en raison de deux de ses publications sur Facebook. D’après l’un de ses avocats, l’une des publications qui qualifiait le président algérien Abdelmadjid Tebboune d’« imposteur placé au pouvoir par l’armée » est à l’origine des poursuites pour « atteinte à la personne du président de la République ». Depuis son arrestation, le 23 juin 2020, Abdelkrim Zeghileche est détenu à la prison de Koudiat, à Constantine. D’autres journalistes ont également été pris pour cible par les autorités pour avoir fait leur travail. C’est le cas de Mustapha Bendjama, rédacteur en chef du journal Le Provincial, Ali Djamel Toubal, correspondant du journal Ennahar ou encore Merzoug Touati, journaliste du site L’avant Garde Algérie.

Blocage de certains médias

En plus du harcèlement dont sont victimes des journalistes, plusieurs sites Internet d’information sont devenus inaccessibles en Algérie, et les autorités ont admis avoir bloqué l’accès à au moins deux de ces sites. Le 15 avril 2020, le ministre de la Communication Ammar Belhimer a reconnu que les autorités avaient bloqué, sans avertissement préalable, deux médias en ligne indépendants, Maghreb Emergent et RadioMPost, dans l’attente de « poursuites judiciaires complémentaires » contre leur directeur éditorial Ihsane El Kadi, pour diffamation et offense à l’égard du président Abdelmadjid Tebboune. Les sites Tout sur l’Algérie (TSA) et Interlignes sont presque toujours inaccessibles en Algérie depuis 2019, et le site L’Avant-Garde Algérie l’est complètement depuis le 23 août 2020.

En plus de harceler les journalistes, les autorités continuent de réprimer les manifestants. D’après le Comité national pour la libération des détenus (NLD), au 25 août 2020, au moins quarante-deux personnes étaient détenues en raison de leur participation en ligne et hors ligne aux manifestations du Hirak. Nous appelons les autorités à mettre fin au harcèlement judiciaire systématique des journalistes et à veiller à ce qu’ils ne soient pas victimes d’actes d’intimidation ou de menaces d’arrestation. Enfin, les autorités doivent immédiatement lever le blocage imposé à certains sites d’information.


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