Le point de vue de la gauche Noire sur les élections américaines compte (TeleSur)

mercredi 2 septembre 2020.
 

Netfa Freeman est un organisateur de la Pan-African Community Action (Action communautaire panafricaine) et du comité de coordination de la Black Alliance for Peace (Alliance noire pour la paix). Il est également animateur pour une émission radiophonique populaire, Voices with Vision, basée à Washington, D.C., et un partisan actif des Révolutions cubaine et bolivarienne. Dans une entrevue en ligne exclusive pour teleSur, à partir de Washington, D.C., Freeman affirmait que le principal message qu’il souhaitait adresser aux lecteurs était le suivant : « La démarche de la gauche Noire est la lutte pour le pouvoir. » En réponse à une question sur les illusions au sujet du Parti démocratique comme alternative aux Trump/républicains, il a déclaré :

« La seule façon pour la classe ouvrière noire des États-Unis d’obtenir justice par des élections présidentielles est de mener une lutte incessante pour construire un formidable parti alternatif aux partis capitalistes, impérialistes républicains et démocrates. »

Il fait bien sûr référence à un parti politique qui comprend toutes les races.

Tout contre le système bipartite. Tout…

Le discours du « moindre mal » est dominateur et pernicieusement omniprésent dans la politique étasunienne. Cela mène inévitablement à une guerre idéologique odieuse et continue, qui ne se limite pas aux cycles électoraux présidentiels. Freeman poursuit :

« Aux États-Unis, les Noirs doivent rejeter une fois pour toutes la fausse notion d’un moindre mal entre les candidats de ces deux partis. Ils adhèrent tous les deux à des politiques génocidaires contre les personnes d’origine africaine, tant à l’échelle nationale qu’internationale. Contrairement à Trump, le bilan des politiques contre les Noirs que Joe Biden (à titre de sénateur du Congrès depuis 1972) a appuyées remonte à 1975, en tant que partisan raciste de la ségrégation et coauteur en 1994 d’un projet de loi sur le “crime” qui a contribué à la prolifération de l’incarcération massive des Noirs et des populations métissées. Alors que Biden était vice-président sous Obama, la valeur du matériel militaire transféré aux services de police nationaux a augmenté de 2 400 %, lequel a été utilisé principalement contre les communautés noires et métissées. »

Le « moindre de deux maux » ? Soyons francs…

Lorsqu’on lui a demandé de préciser davantage la pression du « moindre de deux maux », sa réponse a été une mise en accusation cinglante du système politique américain :

« Je dis toujours qu’une condition préalable non avouée pour être président des États-Unis est de pouvoir bombarder des bébés dans un autre pays et prétendre qu’il n’y a pas de prisonniers politiques aux États-Unis, alors que plusieurs d’entre eux croupissent en prison depuis les années 1970. »

Sa référence aux « bombardements de bébés » inclut-elle la guerre qu’Obama a lancée en 2015 contre le Yémen ? Ou était-ce seulement la pointe de l’iceberg qui a été révélée lorsqu’une bombe fabriquée aux États-Unis a tué 40 enfants yéménites ? Qui peut oublier les scènes horribles de la guerre bipartisane des États-Unis contre le Vietnam, lorsque le monde a vu des femmes et des bébés étendus dans des fossés après avoir été massacrés à Mai Lai par des Marines ?

Les médias grand public et les deux partis corporatifs ne mentionnent jamais plus de 50 prisonniers politiques aux États-Unis. La majorité d’entre eux sont Noirs et Autochtones. Certains ont été associés au Black Panther Party, à des mouvements autochtones et à d’autres mouvements révolutionnaires dans les années 1960 et 1970 et, plus récemment, aux manifestations qui ont suivi le meurtre par la police du jeune Noir Mike Brown à Ferguson, au Missouri (2014) et à l’impasse de Standing Rock (2016) par les peuples autochtones et leurs alliés. S’il y a un peuple au monde qui peut comprendre pleinement le refus de la gauche étasunienne de faire abstraction de ces prisonniers politiques, qui croupissent et qui résistent encore dans la jungle cruelle et violente du système carcéral des États-Unis, c’est bien le peuple cubain. Toute la nation cubaine, avec d’autres pays comme le Venezuela, a refusé d’accepter comme inévitable l’abandon des Cinq Cubains.

Depuis le lynchage moderne de George Floyd en mai, l’une des perspectives les plus importantes découlant de la rébellion actuelle est la suivante : aux États-Unis, la lutte contre l’État raciste ne peut être séparée de ses guerres impérialistes à l’étranger, comme Freeman l’a illustré très clairement plus haut. La population la plus persécutée et opprimée des États-Unis, celle des Noirs, est actuellement à l’avant-garde et insiste par altruisme pour affirmer qu’il ne peut y avoir de paix aux États-Unis sans la paix pour les autres peuples du monde qui sont victimes de l’agression étasunienne.

Malcolm X et les élections présidentielles de 2020

N’est-ce pas Martin Luther King Jr, dans les discours qu’il a prononcés juste avant son assassinat, qui a lié la situation intérieure à la guerre des États‑Unis contre le Vietnam ? La guerre, le militarisme, le racisme et les préoccupations de MLK concernant la pauvreté généralisée à tous les niveaux sont soigneusement censurés du débat actuel alimenté par la révolte en cours. Cyniquement, l’élite des États-Unis ne retient que le discours « I Have a Dream » de MLK, blanchissant ainsi commodément son héritage et apaisant la conscience des libéraux en leur fournissant une expression à la mode pour la récupération.

De la même façon, Malcolm X est cité évasivement par les libéraux comme si sa pensée et son action étaient une idée romantique d’une époque révolue. Cependant, son héritage se perpétue dans l’esprit et le cœur de millions d’Américains de toutes origines. Malcolm X a caractérisé les élections de 2020 il y a longtemps :

« Les conservateurs blancs ne sont pas des amis du Noir, mais au moins ils n’essaient pas de le cacher. Ils sont comme des loups ; ils montrent leurs dents dans un grondement qui garde le Noir conscient de sa position parmi eux. Mais les libéraux blancs sont des renards ; ils montrent aussi leurs dents au Noir, mais en faisant semblant de sourire. Les libéraux blancs sont plus dangereux que les conservateurs ; ils leurrent le Noir, et pendant que le Noir fuit le loup qui grogne, il plonge dans les mâchoires ouvertes du renard “souriant”. L’un est un loup, l’autre est un renard. Quoi qu’il en soit, ils vous dévoreront tous les deux. »

Fidel Castro savait qui rencontrer lors de sa visite à New York en 1960 : il a rencontré Malcolm X.

Laissons toutefois le dernier mot à un expert « neutre » de la politique des États-Unis, la journaliste australienne non Noire, mais bien connue Caitlin Johnstone, dont les articles sont publiés dans la prestigieuse revue de gauche, Consortium News, aux États-Unis.

« Si ces manifestations prennent fin, ce ne sera pas parce que des tyrans du Parti républicain comme Donald Trump auront réussi à convaincre l’armée des États-Unis de les réduire au silence. Ce sera parce que les manipulateurs libéraux ont réussi à récupérer et à freiner son élan. »

Vrai ?

Arnold August

24 juillet, 2020

Publié dans teleSur en espagnol


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