Déconfinement le 11 mai : la grande supercherie de Macron

samedi 25 avril 2020.
 

Nous avons assisté à un exercice de communication de haute volée, à 20 h 02, le président de la République annonce ses décisions avec toute la solennité d’une allocution présidentielle.

Il peut se réjouir des chiffres d’audience, et que certains sondages à l’aide de questions complaisamment orientées, le disent convainquant auprès des Français. Pourtant, le discours d’hier ne répond à aucune question, et ne résout aucun problème.

Macron décide tout seul et sans donner ses arguments

Il annonce le 11 mai comme date de déconfinement, mais on ne saura pas pourquoi. Quels sont les critères qui ont permis de prendre cette décision  ? Où est l’avis du fameux conseil scientifique  ? Sur quoi se fonde-t-il  ? Quelles statistiques lui permettent d’estimer que le 11 mai les conditions du déconfinement seront remplies  ? Aucune de ces questions n’aura de réponse. Macron décide seul, et ne dira jamais pourquoi il a décidé ainsi. Car tel est son bon désir, en bon monarque républicain.

Mais cela est tout le contraire d’une délibération démocratique : une décision qui aboutit d’un débat argumenté public, où les éléments qui permettent la décision sont connus, débattus collégialement, expertisables de façon indépendante, soumis à l’appréciation collective.

Faute de quoi, nous faisons face à des décisions parfaitement arbitraires.

Qui décide, lui ou ses ministres  ?

L’exigence de clarté du discours du lundi soir est immédiatement contredite par ses ministres. Dès le lendemain, le ministre de l’Éducation nationale annonce que le 11 mai l’école ne sera pas obligatoire.

Le ministre de l’Intérieur quant à lui affirme que le 11 mai est un objectif, pas une certitude.

Donc après 30 minutes de parole macronienne, les choses ne sont pas suffisamment claires, au point qu’il faille ajouter une pénible explication de texte des ministres le lendemain matin sur l’audiovisuel… pour embrouiller davantage. Notons que les médias ne permettent pas non plus un débat démocratique, c’est-à-dire pluraliste. Sont invités les ministres, et des experts, mais jamais l’opposition, ou de façon très résiduelle. Les ministres ne s’expliqueront pas davantage sur leurs arguments pour telle ou telle décision.

Réouverture des écoles : la garderie nationale pour prioriser l’économie

La réouverture des écoles est particulièrement symptomatique de ce manque d’argumentation publique. Le premier discours du Président de la République annonçait la fermeture des écoles, avant le confinement général, parce que les enfants étaient facilement des porteurs sains. Ils risquaient de se transmettre le virus les uns aux autres, puis à leurs familles. Cela n’est-il donc plus valable  ? Pourquoi rouvrir les écoles, alors que les cafés et restaurants restent fermés  ? Estime-t-on que les classes surchargées et les élèves entassés respecteront davantage les gestes barrière que les adultes au café  ? Faire respecter les gestes barrière à des enfants, a fortiori tout petits, est rigoureusement impossible. Mais les crèches vont rouvrir. En revanche, les établissements d’enseignement supérieur, où le respect des gestes barrière et le port du masque est plus facile à mettre en œuvre, resteront fermés. Pourquoi  ? On ne le saura pas.

Se répand ainsi l’idée que cette décision a été prise simplement pour permettre aux parents de retourner travailler, et prioriser une nouvelle fois l’économie à la santé publique. Car sinon, pourquoi laisser fermés uniquement les établissements où les élèves sont majeurs, ou considérés comme tels, et qui n’ont pas besoin d’être gardés  ?

Finalement selon l’entourage d’Emmanuel Macron, cette annonce d’une réouverture progressive a été dictée par «  l’envie de lutter contre les inégalités sociales et d’aider à la reprise du travail  ». Il est vrai que l’enseignement dans les conditions du confinement pose de grandes difficultés à de nombreuses familles. IL accentue les inégalités sociales, entre les enfants dont les parents ont le temps et les capacités pour faire travailler leurs enfants, et ceux qui sont démunis face aux exercices scolaires qu’ils ont peine à expliquer.

Mais la ficelle est grossière, parce que cette annonce va à l’encontre de tout ce qu’on nous a expliqué sur la propagation du virus. S’agit-il de suivre la pente proposée par Jean Quatremer, disant qu’une telle récession ne valait pas le coup pour si peu de morts  ? On peut le penser

Tester les personnes symptomatiques : supercherie

Sur les tests, le Président de la République s’est voulu rassurant en affirmant que nous serons en capacité de tester au 11 mai toutes les personnes symptomatiques. Une telle annonce laisse pantois. Tout le monde dit et répète que le plus dangereux dans la propagation du virus, est que nombre de personnes sont malades sans le savoir, et contaminent les autres. Pourtant, il annonce tester seulement les personnes qui présentent des symptômes. Quel est l’intérêt  ? C’est déjà mieux que rien, certes. Mais le débat public court sur une application chargée de transmettre l’information aux personnes ayant été en contact possible avec des personnes contaminées, au mépris de toutes les libertés publiques. Pourtant, il annonce en même temps que de toute façon on ne pourra pas les tester. Quelle utilité de retracer, très imparfaitement, les chaînes de transmission possible, si on ne peut pas savoir qui est véritablement porteur, pour pouvoir les confiner  ? Aucune, si ce n’est faire accepter une régression probablement irréversible sur les libertés publiques, le secret médical, le respect de la vie privée et des données personnelles.

Encore une fois, Macron confirme sans le dire que la stratégie employée est adaptée à la pénurie, et à l’incapacité de la France à produire ce dont elle a besoin dans ce modèle libéral. Il aura beau jeu de plaider l’exercice d’autocritique, en admettant que des erreurs aient été commises, mais c’est de la poudre aux yeux pour les crédules. Il continue dans le même temps son numéro d’embrouillage public, en disant une chose et son contraire, alors que le pays a besoin de consignes claires.

Planification des moyens de production  ? Rien

Pourtant la France pourrait être prête si l’État retrouve son rôle de planificateur de l’économie pour répondre à des objectifs d’intérêt général. Pourtant rien sur ce point si ce n’est des mots. Rien non plus sur les réquisitions des moyens de production des protections personnelles, à commencer par les masques. Rien sur les nationalisations d’entreprises fabriquant des bouteilles d’oxygène médical dont nous avons tant besoin.

Rien même sur les estimations de quantités de masques disponibles au 11 mai, ou leur caractère obligatoire. Car il est incapable de prévoir, de planifier, d’organiser, et se fonde uniquement sur des importations. Il ne peut garantir qu’il y aura des masques pour tout le monde le jour du déconfinement annoncé.

Faire semblant de planifier et de se préoccuper des inégalités sociales Aussi, pour masquer la priorité donnée à l’économie, Macron fait de belles phrases et affiche une préoccupation sociale. Il fait la charité aux plus pauvres, pour qu’on dise ensuite que quand même il est bien généreux, tout en ayant obstinément refusé de mettre à contribution les plus riches. Ainsi l’ISF n’a pas été rétablie, fût-ce à titre provisoire  ! Les entreprises ont été priées bien poliment de bien vouloir ne pas trop donner de dividendes à leurs actionnaires, ce qu’elles n’ont pas toutes fait.

Si Macron se préoccupait vraiment des inégalités sociales, il organiserait de ce pas le partage des richesses. Mais bien évidemment, ce ne sont que des mots, il ne fera rien de tout cela. On croirait revivre les grands discours de Sarkozy après la crise de 2008, prétendant mettre au pas la finance. Évidemment rien de tout cela n’est arrivé. Sa seule préoccupation sociale est un exercice de triangulation : une technique politique consistant à reprendre les mots de l’adversaire pour le neutraliser. Ainsi, on l’entend parler de planification, de jours heureux et de transition écologique : fadaises pour endormir  ! Il a surtout peur que la mobilisation sociale reprenne de plus belle, et ne montre trop évidemment que la situation actuelle des hôpitaux n’est que le résultat de sa politique.

Face au grand enfumage, la 6e République

Ainsi, Macron au lieu de prévoir, embrouille tout le monde. Au lieu de donner des arguments clairs, il répand un nuage de fumée, pour qu’on ne parle que de la fumée qu’il fait, et non des solutions.

Tout ceci est contraire aux exigences minimales d’un débat démocratique digne de ce nom. Les institutions de la Ve République sont incapables de gérer cette crise. Il faut d’urgence passer à de nouvelles institutions, et une 6e République, refondées par le peuple avec une assemblée Constituante.


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