Les punaises de lit : un fléau social

lundi 10 février 2020.
 

Si engloutis que je sois par la lutte contre le projet de réforme des retraites, je ne veux pas laisser passer le travail qu’accomplissent les insoumis sous la conduite de Mathilde Panot à propos d’un fléau social mal connu et souvent méprisé : les punaises de lit qui gâchent la vie de millions de gens dans notre pays. Pour ma part, j’avais commencé à parler du fléau des punaises de lit dans la dernière campagne présidentielle. À l’époque, les réactions fluctuaient entre le scepticisme et la moquerie. Depuis, c’est Mathilde Panot qui mène le dossier au groupe des insoumis à l’Assemblée nationale. Elle connait bien le sujet. Avant d’être élue, elle était militante associative dans un quartier populaire de l’Essonne où sévissait le fléau. C’est elle qui à l’époque m’avait sensibilisé au problème. Des gens riaient déjà dans les milieux politiques.

Maintenant, plus personne n’a envie de rire. Tout le monde s’est rendu compte de l’ampleur du problème. En un an seulement, entre 2017 et 2018, le nombre de désinsectisations recensées par la chambre syndicale de désinfection, désinsectisation et dératisation a augmenté de 100%. Des bâtiments publics comme des bibliothèques, des écoles ou même des salles de cinéma ont été infectés. Des situations inextricables ont été déclenchée faute d’avoir pris à temps des mesures contre la propagation du phénomène. À l’étranger, comme à New York aux USA, c’est par millions que se comptent les victimes de la contamination. Lutter est devenu un impératif. Encore faut-il faire admettre la nature du problème posé.

Notre premier objectif est de faire rentrer dans toutes les têtes que l’invasion de punaises de lit n’est pas un problème d’hygiène personnelle. C’est une question de santé publique. C’est le but de la campagne lancée en commun le 3 juillet dernier avec les associations Droit au Logement (DAL), Confédération Nationale du Logement (CNL), Consommation Logement Cadre de Vie (CLCV) le collectif marseillais La Cabucelle. Pour l’instant, les punaises ne sont pas considérées comme un sujet de santé publique par l’État parce que ces petites bêtes ne transmettent pas de maladies. Mais c’est en train d’être remis en cause par une étude d’un professeur de La Timone à Marseille qui a mis en évidence que la punaise pouvait transmettre une bactérie provoquant des attaques cardiaques. De toutes façons, c’est un problème lourd de trouble de la santé mentale. La présence chez soi de punaises de lit engendre des crises d’angoisse, un état d’hyper vigilance, des insomnies ou de la paranoïa.

Tout cela est renforcé par le modèle économique et social dans lequel évoluent les populations concernées. D’abord, l’extrême et soudaine prolifération des punaises est causée par le tourisme de masse qui semble être un des plus puissants diffuseurs du fléau. L’apparition des Airbnb, ces appartements où les touristes se succèdent sans que des professionnels ne passent nécessairement entre les séjours comme dans un hôtel. C’est aussi un résultat de la chute de la biodiversité. Les prédateurs des punaises de lit sont de moins en moins nombreux et donc leur expansion n’est plus régulée.

Cette crise sanitaire a aussi des racines sociales. Une désinsectisation coûte entre 250 et 1000 euros. Sans compter les frais de lavage voir d’éventuels rachats de meubles à faire ensuite. Pour les familles pauvres, c’est tout simplement impossible. Le plus souvent, elles essaient de traiter elle-même le problème. D’abord cela donne de mauvais résultats et favorise donc la contagion. Ensuite, elles utilisent souvent des produits chimiques sans protection, ce qui est dangereux pour la santé. Enfin, on constate aussi de nombreux cas d’abandon dans la rue de meubles infectés.

Le 25 novembre 2019, Mathilde Panot a présenté à Marseille une proposition de résolution qui demande la mise en place d’un plan global de l’État pour lutter et éradiquer les punaises de lit. Ce plan comporte d’abord la revendication d’une reconnaissance comme problème de santé publique. Cela doit permettre une meilleure surveillance du sujet par les services de santé, ou encore des indemnisations pour les victimes. La vice-présidente du groupe des insoumis a déjà écrit plusieurs fois à la ministre de la Santé dans ce sens. Avec pour seule réponse pour l’instant que celle-ci a commandé un rapport.

Mais notre action n’est quand même pas sans effet puisque depuis, les députés LREM ont créé un groupe de travail spécifique sur le sujet. Le but est bien sûr d’empêcher notre identification avec la résolution d’un problème aussi présent dans le pays. Pourquoi pas, s’ils reprennent nos propositions ! Voici donc les autres. Il faut bannir des méthodes utilisées contre les punaises les produits chimiques. Non seulement ils sont dangereux pour l’homme mais ils ont déjà rendu 90% des punaises résistantes à leurs effets. L’État doit donc développer des interventions à la chaleur sèche, qui est une autre méthode très efficace contre les punaises. Par ailleurs, nous demandons l’encadrement des prix des interventions de désinsectisation et la création de services publics municipaux qui pourraient intervenir gratuitement quand il y a besoin. De cela il ressort qu’il n’est pas possible de régler le problème sans commencer par prendre en compte ses dimensions économiques et sociales. La santé publique reste une question sociale et politique dans tous ses aspects. Et le fléau des punaises de lit n’y échappe pas.


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