Forum Social Européen d’Athènes : le "non" français au coeur des débats

samedi 13 mai 2006.
 

Le débat du vendredi après-midi porte également sur l’avenir institutionnel de l’Europe. Il s’agit cette fois de débattre avant tout des conséquences du « non » français.

On retrouve en effet à la tribune les principales forces du « non » de gauche dans notre pays : le communiste Patrice Cohen Séat remplace au pied levé Marie-George Buffet, il y a aussi la verte Francine Bavay et le dirigeant de la LCR Daniel Bensaïd, Bernard Cassen, le président d’honneur d’Attac, mais aussi un syndicaliste chrétien de Belgique (pro-oui), un député de Rifondazione Comunista qui a pris la place de Fausto Bertinotti, retenu à Rome en raison de ses nouvelles responsabilités de président de l’Assemblée Nationale italienne, Alecos Alavanos, député grec président de Synaspismos, Paolo Beni, président de ARCI, une association italienne d’éducation populaire forte d’un million de membres.

Première surprise : alors que les équilibres géographiques sont souvent surveillés de près, personne ne s’est ému de la présence de Français en aussi grand nombre. Cela témoigne de l’autorité politique acquise par les Français dans le mouvement altermondialiste européen. Depuis le 29 mai, mais aussi depuis le mouvement du CPE, les Français sont vus comme un point d’appui par celles et ceux qui veulent une autre Europe. Les Français sont donc écoutés avec beaucoup d’attention et leurs propos suscitent en général une très grande attente. Il faudra veiller à ne pas la décevoir !

Deuxième surprise : la crise européenne est abordée d’une manière très politique qui n’est pas habituelle dans les FSE. On a rarement connu une telle osmose entre les dirigeants politiques et les représentants du mouvement social présents à la tribune. Ces derniers placent d’ailleurs leurs interventions sur un terrain directement politique en se prononçant sur le futur des institutions européennes. Du côté des partis de gauche présents, les grecs comme les italiens insistent sur la difficulté que créée pour toute la gauche le ralliement du PSE (le parti des sociaux-démocrates européens) au processus actuel de construction européenne. Le représentant italien estime que l’existence d’une grande coalition SPD-CDU en Allemagne est le principal obstacle que rencontre la gauche européenne au sein du Parlement de Bruxelles. Ce sont en effet deux Allemands qui président le principal groupe de droite, le PPE, et le principal groupe de gauche, le PSE. Or ceux-ci, désormais unis par un accord de gouvernement et un programme commun, sont souvent d’accord. Ils défendent par exemple ensemble la poursuite du processus de ratification de la Constitution européenne ou l’adoption de la directive Bolkestein. De son côté, le dirigeant grec insiste particulièrement sur le fait qu’un changement profond en Europe pose la question d’une large convergence politique impliquant nécessairement des communistes et des socialistes. Là aussi, on peut penser que le front regroupé pour le « non » de gauche français constitue une source d’inspiration au-delà de nos frontières.

Dernière surprise : le débat sur la réponse au « non » français est relativement concret. Là aussi, c’est assez inhabituel dans des FSE qui sont parfois friands de grandes déclarations générales sans conséquences pratiques ! L’acuité de la crise européenne oblige chacun à se déterminer sur des scénarios précis. Même les forces qui n’ont jamais gouverné adoptent une attitude moins proclamatoire. Peut-être l’exemple italien les fait-il réfléchir ? Deux anciens syndicalistes, dont un est communiste, occupent des postes de premier plan comme présidents des Assemblées. En Bolivie, c’est un syndicaliste paysan qui est élu président de la République. Tous ces exemples paraissent très proches à certains participants des forums sociaux car ceux-ci ont parfois connu personnellement ces militants, avec qui ils ont pu partager des canapés de fortune ! La question de l’exercice du pouvoir se pose donc à eux d’une manière nouvelle. Lorsqu’on se prépare à une telle situation, il faut être capable de propositions précises et applicables. C’est pourquoi les propositions de Jean-Luc Mélenchon sur le calendrier de sortie de crise ( voir notre éditorial) ont été les plus commentés, confirmant l’impression ressentie dans le séminaire du matin sur la convergence qui se fait progressivement jour autour de la perspective d’un nouveau processus constituant.


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