Lors du G8 de juin 2007, Sarkozy... ivre ou " à côté de la plaque" ?

jeudi 8 juin 2023.
 

Quelques passages de la conférence de presse donnée par Nicolas Sarkozy à Heiligendam peuvent être visionnés et écoutés. Pour cela, vous pouvez cliquer sur l’adresse URL portée en source (haut de page, couleur rouge).

Quiconque regarde et écoute cela en tire la même conclusion que le présentateur du journal télévisé belge : lors de sa rencontre avec Boris Eltsine immédiatement avant la conférence de presse, "Nicolas Sarkozy n’a pas bu que de l’eau".

Ceci dit, nous vous présentons ci-dessous deux points de vue : l’un considérant que le président français était ivre d’alcool, l’autre qu’il était "spécial" mais peut-être seulement le grand ado "Sarko".

a) Voici un défenseur de la thèse d’une ivresse par absorption d’alcool, sur la base du reportage vidéo de la Radio Télévision Belge Francophone, rapidement relayée par des sites internet français :

" D’abord les faits : ivre de pouvoir et grisé par son statut présidentiel, Nicolas Sarkozy se présente à une conférence de presse à un sommet mondial clairement éméché et chancelant. Les télévisons et la presse écrite françaises ne font aucun état de cette information jusqu’à ce que le journal de la RTBF en Belgique mentionne le dérapage dans un ton badin. Disposant bien entendu des mêmes images, il convient de s’interroger sur le mutisme des medias français.

Suite à la déferlante Internet, Libération tentera de s’en expliquer « Libération avait choisi de ne pas évoquer cette vidéo ... un visionnage attentif de la séquence nous semblait montrer un Sarkozy essouflé, certes, hoquetant, certes, pas dans son assiette, en effet, mais pas manifestement ivre ». « Et si le Chef de l’Etat apparaissait très excité, il était toujours dans la maîtrise de ses dossiers, ne commettant pas d’erreurs de communication. En tout, il ne semblait pas ivre, comme pourrait le laisser voir ces images ». Sans se décontenancer, on peut encore lire dans Libération by Rotschild « Aucune image ne le montre un verre à la main ».

Quoi qu’il en soit les medias étaient tenus d’en parler. Ces faits ne se sont pas produits dans une fête de famille quelconque mais dans le cadre d’un sommet réunissant le comité directeur du capitalisme mondial.

La liberté de la presse est la pierre angulaire de la démocratie. Divers textes fondamentaux l’ont d’ailleurs érigé en loi d’airain. La Convention européenne des droits de l’homme stipule que « toute personne a droit à la liberté de la presse. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques... »

Sous le contrôle de grands groupes capitalistes, la fonction principale des medias n’est plus de faire œuvre de critique mais de dégager un consensus autour du pouvoir. Sa mission est revisitée par ses bailleurs de fonds.

A la lisière de l’incident diplomatique, le présentateur du Journal Télévisé de la Radio Télévision Belge Francophone, Eric Boever, a fini par présenter ses excuses « pour avoir écorné la sensibilité nationale française ». Ne serait-ce pas plutôt Nicolas Sarkozy qui aurait mis à mal l’honneur de la France ? On peut imaginer aisément les pressions que sa hiérarchie et ce journaliste ont dû subir pour se résigner à l’autocritique.

Ce genre d’épisode témoigne du danger de la collusion entre les medias et l’exécutif. Sarkozy ne fait que confirmer les craintes quant à la monopolisation et l’instrumentalisation des medias par l’oligarchie nationale.

Après la déplorable débauche de luxure au large de Malte, le Président Sarkozy donne cette fois une image honteuse de son rang. L’indulgence des medias voués à sa cause le dispense à nouveau d’en payer le coût politique. Sans cet appui inconditionnel, nous pouvons imaginer un tout autre destin à ce Napoléon de pacotille.

Avant de donner des leçons d’indépendance journalistique et de brandir sans répit le drapeau de la liberté d’expression dans des contrées lointaines, le journalisme français devrait faire son autocratique pour sa servilité envers le pouvoir.

Emrah KAYNAK ( repris sur le site Bellaciao)

b) Voici maintenant un défenseur de la thèse d’une ivresse de ses propres paroles : le grand quotidien suisse "Le Temps"

" Sarko à la conf de presse... vous avez dit bizarre ? "

Le temps Heiligendamm, jeudi 7 juin, 17h30...

Oui, Nicolas Sarkozy avait bien l’air bizarre pour sa toute première conférence de presse donnée lors d’un G8.

Je vous parle en connaissance de cause. J’étais au troisième rang, juste devant la caméra dont les images du président français circulent aujourd’hui abondamment sur l’internet. Ceux qui avaient pu, comme moi, atteindre le centre de briefing d’Heiligendamm étaient pour la plupart dans la salle. Presque un exploit : les protestataires anti-G8 ayant bloqué le train à vapeur reliant le centre de presse à la salle de briefing, distants d’une dizaine de kilomètres, les rescapés avaient été convoyés dans l’après-midi en bateau.... ou en hélicoptère. Beaucoup de journalistes français, coincés et furieux, durent d’ailleurs se contenter de regarder ce jour-là leur président sur écran.

Résumons : l’intervention de Nicolas Sarkozy était la seule à cette heure. Pas de tension particulière ni d’agitation sécuritaire donc, dans ce centre de briefing monté de toute pièce à l’extérieur du Grand Hôtel Kempinski, pour que les grands de ce monde ne soient pas importunés par les reporters. Le reste s’est passé comme ça : Sarko est arrivé en retard, pressé. Eméché ? Cela ne m’est pas venu à l’esprit. Il ne titubait pas. Il semblait plutôt étonné d’être propulsé là, au milieu des journalistes, tous leur carnet de notes en main. Je l’ai senti plutôt angoissé par un grand vide. Pris de vertige. Un peu comme un trapéziste qui voit soudain le sol défiler sous lui. Il n’était pas serein (mais lui arrive-t-il de l’être ?). Plus grave : il ne semblait pas non plus très bien préparé par ses conseillers à son premier punching-ball diplomatico-médiatique.

Le malaise venait du ton. Je l’ai dit dès la fin de la conférence à mon collègue Yves Petignat, aussi sur place pour couvrir le G8. L’hôte de l’Elysée était euphorique. Il planait. Au point de nous prévenir qu’il avait « gardé son calme » devant Poutine. Au point de demander, devant ses conseillers un tantinet éberlués, si « la diplomatie française peut lui accorder un peu de marge de manoeuvre »... Ce Nicolas Sarkozy paraissait éberlué, bluffé, étonné lui même d’être enfin là, dans ce « saint des saints » de la puissance mondiale. « Dans ce G8, on n’a pas une seconde, on court de réunion en réunion », a-t-il poursuivi. Regards déconcertés des confrères. Ce président-là ressemblait à un grand ado un peu perdu, sortant de sa pochette surprise ses propositions pour sauver le monde : moratoire de six mois sur le Kosovo, annonce d’une prochaine visite au Royaume uni pour convaincre Gordon Brown de soutenir son « traité simplifié »...

Je l’ai, pour tout dire, vraiment trouvé à côté de la plaque. Pas alcoolisé. Plutôt survitaminé. Comme dopé. Quelque chose sonnait faux dans ses mots. Il n’était pas ce soir là le chef de l’Etat français. Il était « Sarko » : cet énergique politicien qui vous veut du bien, vous sourit mécaniquement, est bourré de tics et ramène tout à lui : la victoire arrachée à Bush sur le climat, l’arrêt des souffrances au Darfour... Je l’ai suivi en campagne électorale, avec le correspondant du Temps à Paris Sylvain Besson. Il est comme ça. Il lui faut du pathos, de l’adhésion, une bonne dose de « Je », de « moi ».

Amphétamines, alcool, déprime ? Laissons de coté les rumeurs qui vagabondent sur l’internet. Ce qui m’a sidéré, en cette fin d’après-midi au G8, c’est que Nicolas Sarkozy ne parlait pas de l’état du monde. Il nous parlait de lui, de sa « franchise », de son « agenda », de son « calme ». D’abord ivre d’être là. Saoulé par ses propres paroles

Richard Werly


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