Une révolution citoyenne est en marche

mercredi 12 décembre 2018.
 

La communication alarmiste et menaçante du gouvernement pour dissuader de participer aux mobilisations des Gilets jaunes est à la hauteur de la crainte des tenants de l’ordre en place. Le soulèvement des Gilets Jaunes regroupe tous les prémisses d’une Révolution citoyenne. Le peuple est redevenu acteur de son histoire en se révoltant contre un ordre inégalitaire, injuste et méprisant.

Cette magnifique commémoration du 70e anniversaire de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 démontre au passage qu’il ne peut y avoir de liberté sans égalité, et que les droits politiques, économiques et sociaux sont indissociables.

Emmanuel Macron et le gouvernement ont peur, mais sont incapables d’apporter des réponses à la hauteur des enjeux. Croyaient-ils de nature à apaiser la colère leur mépris initial dépeignant la masse des français en pollueurs patentés du fait de leur refus de payer la surtaxe sur le carburant ? Alors que des millions d’entre eux n’ont pas d’autre choix que de prendre leur voiture au quotidien en raison de l’aggravation des inégalités territoriales provoquées par les politiques néolibérales. Alors que la majeure partie des recettes escomptées ne devaient pas aller à la transition énergétique mais au renflouement des caisses publiques asséchées par la priorité donnée aux plus riches qui, bien que polluant d’avantage, ont obtenu la suppression de l’ISF ou l’adoption Flat Tax, et aux institutions financières via le remboursement d’une dette en grande partie illégitime. Croient-ils désormais arrêter le peuple en marche grâce à quelques mesurettes ? Croient-ils que cibler dans une même répression violente des casseurs et une grande masse de citoyens défendant simplement leur dignité amènera des gens qui n’ont plus grand-chose à perdre à baisser la tête ?

Habitués à saucissonner la réalité en tranches technocratiques, ils sont inaptes à comprendre que la révolte est globale. Ce soulèvement intervient après des décennies de laminage des syndicats et de tentatives de divisions des citoyens. Mais la notion de solidarité et la conscience d’être collectivement spoliés au profit d’une ultra-minorité de riches ont survécu au sein du plus grand nombre. L’injustice fiscale et la dégradation des services publics – deux questions liées puisque ça n’est pas le principe de l’impôt qui est contesté mais bien sa répartition et son utilisation injustes – font partie des rares questions qui pouvaient dès le départ unifier les luttes. C’est chose faite. Les colères s’agrègent les unes aux autres. Le peuple en action gagne chaque jour en puissance en agrégeant les revendications des lycéens, des ambulanciers, des personnels soignants, des agriculteurs, et ainsi de suite. Tout en rappelant au passage que l’écologie sera sociale – écosocialiste – ou ne sera pas.

L’intensification de la répression promise par le gouvernement est un aveu d’impuissance face à un soulèvement incontrôlable fait de petits groupes répartis sur l’essentiel du territoire national. Il est aussi abject d’imputer à l’opposition politique une responsabilité dans les violences qu’il est stupide de l’abjurer de contrôler les Gilets jaunes, comme l’ont fait toute la semaine les droïdes de La République en Marche et quelques arbitres médiatiques autoproclamés de la bienséance, inaptes à comprendre une colère qui n’avait jamais atteint leur bulle. Personne ne peut contrôler un soulèvement populaire de ce type. Seules des annonces fortes du gouvernement, au moins en matière fiscale et salariale, sont susceptibles de calmer la colère.

La balle est donc dans le camp gouvernemental, qui fait face à un dilemme. Céder sur l’essentiel l’obligerait à ruser avec l’ordre néolibéral européen et global qu’il défend. Pour l’heure il ne semble pas en être question. Bruno Le Maire a déclaré que les engagements européens de la France à baisser les impôts – comprendre « des riches » – les dépenses publiques et les déficits sera maintenu. C’est pourquoi Edouard Philippe a par exemple annoncé que les 4 milliards non perçus du fait de l’abandon de la taxe sur le carburant seraient répercutés sur les budgets de collectivités territoriales, qui représentant pourtant près de la moitié de l’investissement public en France, et sont en charge de services publics essentiels dont les Gilets jaunes déplorent justement l’affaiblissement. Le gouvernement ne semble pas comprendre qu’il est illusoire de calmer à la fois la colère du peuple souverain et de rassurer la finance internationale. Quel symbole de ce point de vue que le choc des calendriers entre d’un côté le peuple français refusant d’être assigné à renflouer les finances par des tartuffes de l’écologie, de l’autre un président négociant au sommet du G20, l’un des temples d’un néolibéralisme international ayant, entre autres régressions, érigé l’évasion fiscale en sport mondial des riches. Sans même parler du renvoi cette semaine aux calendes grecques de toute ambition en matière de taxation des GAFA en Europe.

Notre rôle, en tant qu’insoumis, est de nous inscrire pleinement dans ce moment historique. Ne donnons aucune leçon doctrinale, mais échangeons, aidons en matière logistique et organisationnelle, participons à ce soulèvement en tant que citoyens à part entière. Et rappelons, quand nous faisons face à ceux qui essaient de détourner la colère au profit de leurs névroses xénophobes, que ce qui se joue sur les ronds-points et les barricades est aussi notre rapport au genre humain. La libération des contraintes de la mondialisation néolibérale, qui passera notamment par le renversement des traités européens, n’est pas une option. Elle est une condition du recouvrement complet de l a souveraineté populaire. Nul ne peut dire à ce stade si le soulèvement des Gilets jaunes aboutira à moyen terme à un tel objectif, qui supposerait comme préalable minimal des élections anticipées. Mais plus rien ne sera comme avant. Le peuple français a relevé la tête. Et il n’est pas seul. Les Gilets jaunes de Bassora en Irak, à ceux de Belgique ou d’Allemagne aux Gilets rouges de Tunisie, du Burkina Faso et d’ailleurs manifestant pour l’emploi, contre la vie chère, contre la corruption, pour la dignité etc., nous rappellent que la Révolution citoyenne s’inscrit dans une dimension internationale et que, par-delà les divisions que les oligarchies tentent d’ériger entre eux, les peuples du monde aspirent au Bonheur. 0Shares


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