De 1988 à 1991, l’Algérie a connu une poussée sociale et démocratique réprimée par le pouvoir politico-militaire avec annulation des élections de 1991 pour empêcher une victoire de la gauche aux élections législatives. La grande mobilisation sur Alger au jour préalablement prévu pour voter est annulée par le Front des Forces Socialistes de crainte d’un bain de sang perpétré par l’armée (effectivement préparée à cela).
L’impasse politique de la gauche laisse place à partir de 1991 1992 à une poussée islamiste aidée par le nouveau pouvoir (remodelage électoral...). Cependant, l’armée et les milieux d’affaire liés à elle, craignent à nouveau de perdre leur pouvoir et leurs avantages. S’ensuit une nouvelle annulation du processus électoral puis une guerre civile confuse et atroce dont, personnellement, j’ai du mal à distinguer tous les tenants et aboutissants. La confirmation de l’instrumentalisation de Zitouni par l’armée constitue un élément de clarification mais seulement un élément.
1) L’Algérie du mouvement progressiste de 1988 au coup d’état militaire de 1992
En octobre 1988, l’Algérie connaît un grand mouvement social et démocratique qui ébranle le pouvoir en place, c’est à dire particulièrement les chefs militaires liés aux puissances d’argent. Deux forces se développent alors rapidement, d’une part la gauche dont le FFS, d’autre part les islamistes (victoires aux municipales).
Des élections législatives sont programmées pour juin 1991. Plusieurs sondages donnent la gauche victorieuse ( Front des Forces Socialistes et gauche du FLN). Le Front islamique du salut (FIS) appelle au boycott, sachant qu’il va subir une grosse défaite. Il occupe les rues d’Alger pour montrer sa réalité de masse ; l’armée n’intervient à aucun moment pour dégager les rues où s’amoncellent les poubelles mais le mouvement s’affaiblit.
Le Département du Renseignement et de la Sécurité (DRS) ( service militaire algérien de renseignements) dont le rôle politique date de la guerre d’indépendance, intervient alors avec le relais de chefs de l’armée pour pousser le gouvernement Hamrouche (en fonction de septembre 1989 à juin 1991) à la démission et annuler les élections législatives.
Le Front des Forces Socialistes appelle à une grande marche sur Alger au jour initialement prévu pour les législatives, le 6 juin 1991. L’armée quadrille alors la capitale, ses unités sont psychologiquement surchauffées par les officiers pour préparer un bain de sang. Le FFS décide d’annuler sa marche.
Le nouveau gouvernement installé par le DRS et l’armée, dirigé par Sid Ahmed Ghozali s’attelle à la première responsabilité dont il a été chargé par ses donneurs d’ordre : modifier la loi électorale pour minoriser la gauche et avantager le FIS. Le 26 décembre 1991, le premier tour des législatives donne effectivement une victoire au FIS. La base populaire de la gauche algérienne a largement boudé cette élection ( abstention de 41% des inscrits), montée pour en finir avec la poussée progressiste issue du mouvement de 1988.
Le second tour est prévu pour le 16 janvier 1992. Dès le 11 janvier, l’armée place des blindés aux endroits stratégiques, dépose les autorités civiles, met en place un Haut Comité d’Etat de 5 personnes, engage une répression massive contre toute opposition. Le FFS et le FLN condamnent le coup d’état et le HCE ; cependant, le mouvement de défense du processus électoral se constitue essentiellement à partir de mosquées en soutien des islamistes du FIS ainsi validés.
L’Algérie entre alors dans une période de violence, de régression sociale et démocratique.
Les actions violentes du GIA (islamistes engagés dans la seule voie terroriste) de Djamel Zitouni permettent à l’armée de justifier sa main-mise totale sur le pouvoir.
2) Djamel Zitouni et le GIA
A la tête des « phalanges de la mort » (Katibet El Mout), Djamel Zitouni perpétue plusieurs enlèvements, attaques et assassinats en 1993 et 1994. En août 1994, il est nommé ministre des Moudjahidine (combattants) dans le "gouvernement du califat" formé par le GIA puis émir national du GIA.
Parmi ses attaques aussi sanguinaires que réactionnaires, notons :
l’attaque d’un centre scolaire important à Bir Khadem où il somme les enseignantes de porter le hidjab sous peine de mort et de ne plus enseigner la langue française
le détournement du vol d’Air France Alger-Paris le 24 décembre 1994
le 3 mai 1995, il menace tout épouse d’islamiste abandonnant le combat armée menaçant de mort « la mère, la sœur et l’épouse des renégats »
durant l’été 1995, il organise une vague d’attentats à Paris (8 morts et 200 blessés)
ses menaces publiques contre tout parent Algérien scolarisant ses filles, contre toute femme occupant un emploi.
en novembre 1995, il fait assassiner une centaine d’islamistes favorables, accusés de croire au « bourbier de la démocratie impie ».
Fin mars 1996, il fait assassiner sept moines trappistes français dans leur monastère de Tibéhirine.
Il signe un ouvrage de 62 pages, « Des origines des salafistes et des devoirs des Moudjahidine » qui compte parmi les plus réactionnaires produits durant le 20ème siècle. Les connaisseurs estiment que l’ouvrage a été écrit par des religieux car Zitouni savait à peine lire et écrire.
Il bénéficie de toute évidence de moyens logistiques supérieurs à ceux d’un groupe de maquisards poursuivis par l’armée. Ainsi, il envoie plusieurs fax par jour à la rédaction d’un journal anglais arabophone.
Il est tué le 16 juillet 1996 par d’autres islamistes.
3) Djamel Zitouni était totalement manipulé par les services secrets militaires (DRS)
Plusieurs hauts responsables de l’armée algérienne et du DRS, réfugiés en Europe, ont précisé comment les services secrets ont recruté, protégé, mis en avant, instrumentalisé Djamel Zitouni. C’est le cas en particulier :
du colonel Mohamed Samraoui, auteur de Chronique des années de sang (Denoël, 2003)
du capitaine Hocine Ouguenoune, ancien du DRS (Département Renseignement Sécurité, ex-Sécurité militaire)
Abdelkader Tigha, ancien cadre du Département du renseignement et de sécurité, présent dans la zone de Blida au moment où il a recruté Zitouni
du capitaine Ahmed Chouchane, instructeur des forces spéciales de l’armée algérienne lors du coup d’Etat de 1992 auquel des généraux ont demandé de devenir l’adjoint de Zitouni
4) Documentaire Vidéo choc : les services secrets algériens, vrais cerveaux des attentats de Paris en 1995
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Hyacinthe
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