Quelle critique des médias ?

lundi 8 octobre 2018.
 

L’analyse critique de la nature et du fonctionnement des médias est d’une importance majeure pour comprendre la vie politique, idéologique et culturelle d’un pays. C’est aussi un enjeu démocratique car les médias peuvent contribuer à faire vivre ou à tuer la démocratie.

L’association Acrimed (Action Critique des Médias) a publié le 22 février 2018, suite à son assemblée générale du 3 février, un texte intitulé : « Quels critiques des médias ? ».

Il nous faut tenir le plus grand compte de l’avis de cette association qui capitalise maintenant 23 années d’expérience d’action critique des médias.

Nous publions ici un petit extrait de ce texte. Le texte complet est consultable en cliquant sur le lien suivant :

https://www.acrimed.org/Quelle-crit...

[…]… Quelle critique ?

Une critique radicale. Notre critique est une critique radicale parce qu’elle s’efforce de prendre les choses à la racine ou aux racines. Et les racines, quand il s’agit des médias, ce sont notamment leurs formes d’appropriation, les déterminations sociales des journalistes, leurs rapports aux pouvoirs économique et politique. Notre critique se défend des raccourcis et se défie des survols. Des raccourcis qui, par exemple, attribuent à des manipulations intentionnelles toutes les malfaçons et dérives médiatiques. Des survols qui sont souvent ceux de la critique médiatique des médias.

Cette critique se borne généralement à relever des manquements à la « déontologie » : elle décrit des pratiques journalistiques et déplore des fautes professionnelles, mais sans mettre en évidence les contraintes qui les expliquent ; elle dénonce des « pressions », économiques et politiques, mais sans s’attarder sur ce qui les rend possibles et efficaces ; elle pourfend les censures visibles, mais néglige les censures invisibles ; elle concède des « dérapages » propagandistes, mais s’accommode de la pensée de marché ; elle prescrit des corrections à la marge, mais sans mettre en cause l’ordre médiatique existant. Cette critique est insuffisante, surtout quand elle se présente comme autosuffisante.

Notre critique s’efforce d’expliquer et d’évaluer.

A. Une critique explicative, une critique normative

(1) Notre critique est explicative. C’est une critique des formes d’appropriation des médias, des logiques économiques et sociales qui les gouvernent, de la marchandisation de l’information et de la culture qui en découle : tout ne s’explique pas par elles, mais rien ne s’explique sans elles. Pour ne pas verser dans un économisme à courte vue, notre critique s’étend aux conditions sociales et politiques d’exercice des métiers du journalisme : aux rapports de compétition et de domination qui règnent dans les médias, ainsi qu’aux formes de subordination des médias aux gouvernants et à l’organisation des pouvoirs publics.

La critique que nous proposons s’efforce de rendre visible ce qui ne l’est pas ou pas totalement. Mais elle n’attribue pas à l’action de quelques acteurs les malfaçons de l’information et les distorsions de l’espace public. Eux-mêmes ne sont, à bien des égards, que des symptômes.

Faut-il le préciser ? Les journalistes ne sont pas « tous pourris ». Rouages d’une machinerie qu’ils ne contrôlent pas, même quand ils se croient indépendants, la plupart d’entre eux sont des exécutants, comme dans nombre de professions, surtout au niveau subalterne. Ils ne sont pas responsables des raisons sociales de leur dépendance. C’est pourquoi notre critique s’efforce de différencier les propriétaires et les tenanciers des médias d’une part et, de l’autre, les soutiers de l’information qui désinforment, quand ils le font, sans toujours le vouloir : tout simplement parce qu’ils ont intériorisé des contraintes marchandes (l’audience, la diffusion, le formatage) comme des qualités professionnelles. Cette même critique invite à distinguer les exécutants dociles et complaisants, heureux de n’être que des rouages, et les rouages indociles ou récalcitrants qui tantôt se résignent à faire ce qu’on leur demande « parce qu’il faut bien vivre », tantôt tentent et parfois réussissent à introduire quelques grains de sable dans la machine.

Une critique explicative n’est pas condamnée à être doctrinaire. Notre critique ne jure pas en permanence par Marx et par Bourdieu. Elle tire le meilleur parti possible de l’analyse économique des médias (quand elle n’est pas libéralo-capitaliste), de la sociologie des journalismes (quand elle porte sur des positions sociales et des relations et non sur de simples descriptions). À ce titre, nous devons faire flèche et faire feu des meilleurs bois parmi les critiques des médias qui existent en dehors de nous et en tirer parti, pour préciser et renouveler notre critique, pour ne pas être condamnés au ressassement de vérités premières.

Certes, dans la mesure où elles changent peu (mais elles changent…), les mêmes causes produisent les mêmes effets : notre critique est inévitablement répétitive, mais elle ne devrait pas être routinière. Les meilleurs bois nous incitent à actualiser sans cesse ses contenus et ses formes [1].

(2) Notre critique est normative. Notre critique n’est pas seulement explicative, mais elle évalue les transformations des médias, les évolutions du journalisme et de ses pratiques, les qualités et les défauts de or s informations.

Une critique normative n’est pas condamnée à être idéaliste. Notre critique n’oppose pas un journalisme idéal dont nous inventerions les normes au journalisme réellement existant. Ce journalisme prétendument idéal aurait toutes les chances d’être strictement partisan et élitaire. Notre critique, au contraire, prend pour normes les idéaux, voire les mythes, auxquels se réfère le journalisme réellement existant et les met à l’épreuve de la réalité. Vous dites « indépendance des journalistes », « pluralisme des opinions », « diversité et exactitude (voire objectivité) des informations » ? Vérifions !

Dans tous les cas, cette critique n’est pas prioritairement destinée aux journalistes ou, plus généralement, aux professionnels des médias. Elle s’adresse à la fois aux acteurs et aux usagers de l’information et de la culture. Elle s’efforce de contribuer à une éducation aux médias, dont les enjeux démocratiques ne sont pas exclusivement pédagogiques et à une contestation des médias qui ne se limite pas à leur examen académique. […].

Lire le texte complet en cliquant sur le lien précédent.

https://www.acrimed.org/Quelle-crit...

Hervé Debonrivage


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