Le capitalisme porte en lui la prédation écologique

mercredi 5 septembre 2018.
 

Le philosophe Henri Peña-Ruiz vient de publier Karl Marx, penseur de l’écologie, aux éditions du Seuil. « Dans les pays capitalistes (…) les luttes sociales et l’intervention écologique sont restées séparées, tragiquement disjointes alors qu’à l’évidence c’est une même façon de produire et de répartir qui est la cause unique des deux détresses, sociale et écologique. ». Le retour à Marx permet-il non seulement de comprendre les causes de la prédation écologique, mais d’amorcer une réponse à la hauteur de l’enjeu dramatique du bouleversement climatique et de la disparition des espèces ? Tout l’intérêt de son étude, largement appuyée sur des extraits de Marx et d’Engels, tient à ce qu’il montre que l’écologie n’occupe pas une place anecdotique dans la pensée marxiste, et que sa prise en compte permet de restituer ce qu’il y a de commun entre le combat social et le combat écologique.

« Les leçons épicuriennes dessinent un triptyque essentiel dans la pensée du jeune Marx. Matérialisme, naturalisme, humanisme. » Loin d’opposer la nature à l’homme entre un naturalisme régressif et un humanisme arrogant, Henri Peña-Ruiz montre combien le matérialisme dialectique permet d’articuler la nature et l’humanité par le biais du processus de culture. Comme Marx le remarque dans ses Manuscrits de 1844, « la société est l’achèvement de l’unité essentielle de l’homme avec la nature (…) ». Henri Peña-Ruiz refuse de faire de l’humanité en général la cause de la crise écologique. Le problème n’est pas tant l’anthropocène, mais le capital.

En effet, l’analyse marxiste montre combien le capitalisme porte en lui la prédation écologique. Prenons deux exemples : l’externalisation des coûts analysée dans Le Capital de 1867 montre que la collectivité est sommée de supporter les coûts écologiques du profit privé ; son analyse de l’appauvrissement des sols dans l’agriculture productiviste anglaise du XIX° épuise « en même temps les deux sources d’où jaillit toute richesse : la terre et le travailleur ».

Le Chapitre 5 invite à une refondation écosocialiste : ni le capitalisme vert, ni l’errement productiviste du stalinisme ne sont des solutions, il faut abolir le capitalisme qui prend plus à la terre qu’il ne lui restitue. Henri Penã-Ruiz signale une analyse très pertinente des rythmes distincts de la finance privée et de la nature, relevés par Marx à propos de la sylviculture. Comme le dit L’avenir en commun, face à l’urgence climatique : sortir du productivisme grâce à la règle verte.

Benoît Schneckenburger


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