Résolution politique adoptée par le Collectif National d’Ensemble

lundi 12 février 2018.
 

Macron progresse sur son offensive contre les conquis sociaux :

L’adoption des ordonnances constitue une défaite politique. Macron veut surcharger l’agenda social et politique pour prendre de court et empêcher les réactions populaires de se construire (loi enseignement supérieur, réforme assurance-chômage, statut des entreprises, etc). De ce fait, il regagne en popularité d’abord dans la base électorale de droite : il est bien à droite.

Mais Macron a-t-il une base politique stable et durable ?

Il a su construire un espace politique national « central » large associant les sociaux-libéraux de gauche (exécutif Hollande et direction PS, et aussi pour partie venant d’EELV) et de droite (Juppé, Bayrou, centres) ; cet espace « et de droite et de gauche » tarit la place traditionnelle des vieux partis de gouvernement. Il apparait comme un président « sérieux » sur la scène mondiale et veut jouer un rôle neuf en Europe face aux politiques agressives de Trump et Poutine, à la domination progressive de la Chine et, dans une moindre mesure, avec l’affaiblissement politique actuel de l’Allemagne. Il met en avant ou renouvelle des thématiques puisées dans certaines aspirations modernes : écologie, droits universels, libéralisme politique, numérique, « réussir dans la vie », « aimer la concurrence et les challenge ».

Mais sa base électorale est étroite dès le départ. Sa conception du pouvoir est très verticale, car son équation politique constitutive suppose un chef incontesté dans le panier de crabes des appétits du pouvoir (tradition 5ème république très poussée). Il veut des « partenaires sociaux » obéissants et non pas autonomes (y compris contre la CFDT). Il ne peut avoir le soutien des classes populaires car il veut être le président de ceux qui réussissent (milliardaires). Il veut faire aimer le capitalisme.

Macron peut être déstabilisé dans son offensive à condition que :

- le mouvement social et syndical, les mouvements écologistes, les mouvements démocratiques de défense des droits (migrants…), s’unissent sur des objectifs clairs et porteurs d’une vision émancipatrice.

- son offensive idéologique soit contestée par une contre-attaque sur le terrain et l’activité d’une gauche de lutte pluraliste et visible, sur des objectifs alternatifs. Ceci est nécessaire pour faire des pas en avant vers une convergence des forces sociales et politiques contre Macron. France Insoumise est aujourd’hui une des principales forces en termes de contre-attaque politique.

- une bataille idéologique et culturelle soit menée dans le champ intellectuel contre le macronisme.

Pour cela, Ensemble poursuit la recherche de l’unité la plus large possible des forces politiques de la gauche anti-austérité, des syndicats, des associations dans les mobilisations contre Macron. Nous discuterons de ces objectifs quand nous rencontrerons les forces politiques de la gauche alternative.

Le mouvement syndical est traversé par une crise stratégique et historique de longue portée.

Cette crise s’articule avec les aspirations de la société, de la jeunesse, notamment la demande de démocratie, d’horizontalité, de liberté d’initiatives (cf : Nuit Debout), de féminisation.

Mais plusieurs débats ou enjeux décisifs traversent aussi le syndicalisme et d’autres mouvements : rapport au salariat et à la population dans sa diversité, la question unitaire, le rapport aux forces politiques, la visée émancipatrice.

Un mouvement comme Ensemble doit s’intéresser à ces questions, participer aux débats par ses militant-es (adhérent-es des syndicats, des mouvements associatifs, acteurs-trices des luttes), élaborer un point de vue, tout en respectant l’indépendance de toutes les organisations.

Ensemble cible son activité sur quelques campagnes à proposer ou aider à court terme, qui peuvent contribuer à mettre Macron en échec et bousculer le paysage politique :

a) La campagne pour mettre en échec la réforme de l’assurance-chômage : le projet Macron vise à mettre en cause le droit inconditionnel fondé sur la cotisation, à contrôler la gestion de l’indemnisation chômage dans le cadre de sa politique de fluidité (flexibilité) de l’emploi, et affaiblir les garanties du salariat dans une soi-disant universalité de l’indemnisation chômage. Ces enjeux se situent dans la logique de « libéralisation » de la société engagée depuis des années entre les ordonnances travail et la réforme des retraites. La mobilisation sera difficile, compte tenu de l’isolement des chômeurs et de leurs organisations vis à vis d’une grande partie du salariat. Mais aussi parce qu’elle doit prendre un aspect de contre-projets et d’offensive politique pour des droits rattachés à la Sécurité sociale (protection sociale).Ensemble a sur ces questions et sur celles du travail une réflexion interne qui nous permet une campagne politique sur ce sujet. Nous essayons à la fois de mobiliser les organisations politiques pour une prise de position et action communes, et de prendre part à un rassemblement large avec les organisations de chômeurs et le réseau Pour nos droits sociaux.

b) Une campagne unitaire pour l’accueil des migrants et relever les défis que cela pose au regard du monde dans lequel nous vivons. Un large mouvement de solidarité se développe sur de nombreux territoires, notamment autours de l’accueil des mineurs étrangers (Lyon, Nantes…) sur les universités (Clermont-Ferrand…), dans les zones frontalières (Hautes Alpes, Alpes Maritimes, Calais…). La politique mise en œuvre par Emmanuel Macron et Gérard Collomb parait particulièrement inhumaine et suscite des remous même au sein de la majorité « En Marche ». L’examen du projet de loi Collomb sur l’immigration sera un moment important de mobilisation contre cette politique.

c) Les réformes de l’éducation mises en œuvre que ce soit à l’université ou au lycée (baccalauréat) sont l’aboutissement d’une « grande transformation » du service public. L’imposition de la sélection à l’université et la transformation du baccalauréat en atténuant son caractère de diplôme national vont bouleverser les conditions d’accès à l’éducation d’une grande majorité des jeunes. Un travail d’explication à grande échelle est nécessaire et doit être initiée que ce soit par les associations et syndicats étudiants, et les forces politiques de gauche opposées au projet.

d) Le soutien aux mobilisations écologistes. L’abandon du projet de construction de l’aéroport de Notre Dame des Landes est une victoire de la résistance citoyenne contre l’arbitraire et les magouilles, permise par la mobilisation la plus importante qu’ait connue la région, avec un énorme soutien partout en France. La manifestation du 10 février sur la ZAD doit être la plus massive possible : pour fêter la victoire bien sûr, mais aussi pour signifier au gouvernement que nous refuserons toute intervention violente.

e) Les mobilisations féministes se développent aujourd’hui dans un contexte nouveau. La question de la lutte contre les violences faites aux femmes est devenue une question majeure depuis le déclenchement du mouvement « me too », qui se développe à l’échelle internationale, dans toutes les sphères de la société, après de grandes mobilisations féministes – notamment pour le droit à l’avortement – en Espagne, Pologne, en Amérique Latine, ou encore aux Etats-Unis contre les provocations de Trump, mais également des mobilisations pour l’égalité des salaires. C’est un point d’appui formidable pour combattre les rapports de domination qui gangrènent la société.

f) Comme il a été décidé lors de l’Assemblée générale de décembre 2017, Ensemble ! prend part à la campagne pour la Paix et le désarmement : mobilisations pour la ratification par le Parlement de la résolution adoptée par l’Assemblée générale de l’ONU pour le désarmement nucléaire, discussion de la loi de Programmation militaire 2019-2025, exigence de la sortie de l’OTAN, Marches pour la Paix et initiatives diverses (I Can, Mouvement de la Paix, MAN). Cette activité comporte notre soutien politique et la participation à l’animation de cette campagne ; elle est prise en charge autant qu’il est possible, en fonction des situations locales, et ces activités sont coordonnées et popularisées. Un travail d’élaboration est poursuivi, en vue de publications.

Une priorité immédiate : faire front contre Macron et ouvrir de nouveaux chemins d’émancipation

Développer un front social et politique de mobilisations contre Macron suppose de lier deux nécessités :

D’une part agir le plus possible pour rechercher la convergence, chacun dans sa spécificité, des forces syndicales, associatives et de la gauche politique anti-austérité sur la base du refus des politiques mises en œuvre par le pouvoir en place. Pour être en mesure de répondre aux attentes populaires et empêcher l’aggravation des conditions de vie et de travail, il faut que les forces qui sont en mesure de former une alternative se mettent « Tous Ensemble » : à l’Assemblée, en soutien et en écho des mobilisations sociales pour débattre d’une issue politique, dans la mise sur pieds d’assemblées citoyennes dans les localités. A partir d’initiatives locales en premier lieu, quand des « campagnes » d’action communes peuvent être mises en œuvre sur une question politique d’actualité, où autour de mobilisation sociales de terrain dans les communes et régions, il s’agira de créer, avec les forces sociales et les mouvances citoyennes, des espaces d’action et de débats conciliant la volonté d’agir au quotidien, de développer des réseaux de solidarités, de repartir à la conquête d’une majorité d’idées dans la population pour faire reculer les solutions de replis individualistes promues par la politique de Macron pour faire passer un ultra-libéralisme autoritaire.

D’autre part, promouvoir pour l’action commune un pluralisme politique des gauches opposées à Macron.

Pour convaincre de la possibilité d’une alternative de gauche, nous devons être capables de rassembler les forces politiques de la gauche alternative, les associations, les syndicats dans un large front contre la politique de Macron.

Ensemble discutera de son orientation pour les échéances électorales futures dans les prochains mois.

Ceci est une réponse pour agir et affaiblir Macron sur le cœur même de son projet. Mais ce n’est pas une réponse pour la « recomposition » politique ou la promotion d’une force politique nouvelle.

En effet, Ensemble est traversé de projets différents sur ce sujet. Ces projets demandent des expérimentations différentes, notamment avec la participation à la construction de FI, dans le cadre d’une intervention collective indépendante, d’une partie d’Ensemble.

Des camarades participent par ailleurs à d’autres cadres comme Passerelles, à des expériences locales de regroupement rassemblant forces sociales, politiques, et citoyennes, ou de simples cadres de débats comme Front commun, les Assises d’EELV.

Dans notre action, nous essayons, de manière indépendante ou dans des cadres collectifs à donner du sens à l’action, en liant les luttes actuelles à un imaginaire d’émancipation collective : le « déjà-là » des expériences de socialisation (sécurité sociale universelle, services publics), la portée subversive du « commun » comme pratique et comme critique en acte des rapports sociaux, l’auto-organisation-autogestion, l’appropriation d’usage dans les SCOP, sur des territoires (ZAD) ou autres institutions inventées sur d’autres manières de produire, la visée d’une société de rapports humains coopératifs, contre le productivisme, le tout marchand, les violences, les dominations. Pour alimenter ces perspectives et y contribuer, « Ensemble ! » engage une série de débats programmatiques dans les mois qui viennent (Europe, politique de défense, transformation sociale et rupture démocratique).

Résolution politique adoptée par le Collectif National d’Ensemble le 3 février 2018


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