Cyclones extrêmes : Irma, l’ouragan le plus puissant jamais enregistré dans l’Atlantique

lundi 11 septembre 2017.
 

Les météorologues s’accordent sur le caractère inédit de ce cyclone extrême, en partie dû à la température élevée de l’océan Atlantique.

Irma, qui a frappé mercredi 6 septembre les îles de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, s’affirme comme l’ouragan le plus puissant jamais enregistré dans les Antilles. De mémoire de météorologues, seuls l’ont surpassé des typhons extrêmes dans le Pacifique, comme Haiyan qui avait dévasté les Philippines en 2013.

Irma s’accompagne de rafales de vent dépassant 300 km/h et de vagues d’une douzaine de mètres de haut qui ont déferlé sur les côtes de ces deux îles, ainsi que sur celles d’Anguilla et de Barbuda. L’ouragan s’est ensuite dirigé à 24 km/h vers les îles Vierges britanniques, et menace la pointe est de Porto Rico et peut-être le nord d’Haïti, puis Cuba et les Bahamas, voire la Floride, mais de façon moins prévisible dans la nuit de samedi à dimanche.

« Irma appartient à la famille des cyclones dits “cap-verdiens” : il s’est formé au large des côtes africaines, avant de se charger en énergie en passant au-dessus de l’Atlantique où la température de l’eau est à 29 °C en ce moment », explique Alix Roumagnac, directeur de la société Predict, filiale d’Airbus et de Météo France, spécialisée dans la prévision des risques.

« Il s’agit vraiment d’un phénomène météorologique majeur : Irma a été classée en catégorie 5 – la plus élevée sur l’échelle de Saffir-Simpson –, avant même d’atteindre les Petites Antilles, précise pour sa part Frédéric Nathan, prévisionniste pour Météo France. C’est la première fois que nous observons cela. En général, les tempêtes prennent de la puissance en approchant des côtes américaines ou bien finissent en simples dépressions. »

Des eaux chaudes qui favorisent les tempêtes à répétition

En cause, les températures de l’océan « supérieures aux normales de saison » et des conditions météo propices aux tempêtes à répétition, avec des conditions de vent homogènes favorables à la formation de gros cumulonimbus. « Il est de plus en plus fréquent d’avoir une eau à 29 °C, rapporte Frédéric Nathan. Cela correspond aux températures records autour du globe relevées en particulier en 2016 et 2017. » Et cela confirme, assure-t-il, ce que disent les scientifiques depuis plusieurs années : le changement climatique va susciter une hausse progressive des ouragans puissants. « Il y a à peu près 80 phénomènes cycloniques par an dans le monde ; sur ce total, le nombre d’ouragans et de typhons de catégorie 4 ou 5 va augmenter », précise-t-il. Une autre tempête, prénommée José, devrait traverser l’Atlantique à son tour et approcher « samedi ou dimanche de l’arc des Antilles », annonce le prévisionniste. « Mais peut-être passera-t-elle plus au nord, en pleine mer ? », espère-t-il.

En attendant, les îles du nord des Antilles ont essuyé des conditions météo terribles et subi des dégâts considérables très tôt mercredi matin. « Nous avons relevé des rafales à 244 km/h à Saint-Barthélemy, à 4 h 07 précisément, témoigne Philippe Bleuze, qui dirige le centre météorologique de la Guadeloupe. Puis nous n’avons plus reçu de données, faute de transmission ou bien parce que nos appareils sont tombés en panne. Mais il nous paraît plausible que les vents ont atteint plus de 300 km/h. » Le passage de l’ouragan a entraîné des pluies diluviennes pendant deux heures, mais le pire était à venir avec les paquets de mer qui ont déferlé sur les côtes.

« Il y a eu des vagues monstrueuses formant une submersion marine majeure, rapporte le météorologue. Elles sont venues s’ajouter à l’eau poussée par les vents vers les côtes où elle s’accumule en fonction de l’inclinaison des fonds marins. On a calculé que cette surcote s’est élevée à 3 m devant Marigot, la capitale de la partie française de Saint-Martin, sur laquelle est venue la houle qui a inondé ce territoire plat. »

« Aucune communication pour le moment »

Barbuda a connu le même sort. « La station météo y a enregistré des rafales à 360 km/h mercredi matin », relate Alix Roumagnac. Elle aussi s’est ensuite tue faute d’électricité, à moins que la bouée de mesure n’ait coulé. « Nous sommes en contact avec la direction de la protection à Haïti pour l’aider à anticiper l’événement qui devrait se produire ce soir, comme nous l’avons été précédemment avec les autorités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, expose-t-il. Il semble que des habitants aient refusé d’évacuer. Pourtant, on s’attendait à des vagues de 12 m. »

Peu avant le déferlement, Alix Roumagnac soulignait son inquiétude au sujet du positionnement de l’œil du cyclone, pile au-dessus de ces deux petits territoires. Celui-ci « atteint un diamètre très important d’une quarantaine de kilomètres, de quoi générer un calme trompeur, mais ensuite le deuxième front du cyclone déferle d’un coup : les vents peuvent alors brutalement passer de presque rien à 300 km/h, c’est extrêmement dangereux », prévenait-il alors. De fait, pendant une heure et demie, l’île de Saint-Barthélemy s’est retrouvée au cœur de la force centrifuge de la tempête, comme prise dans un vide, avant que Saint-Martin ne connaisse le même sort.

L’ouragan a en revanche épargné l’île française de la Guadeloupe, plus dans le sud des Antilles, où l’alerte rouge cyclone a été levée mercredi matin. Le territoire est passé en vigilance orange « fortes pluies et orages » et une « mer dangereuse ». « De notre point de vue, l’événement météorologique est terminé pour les îles françaises, explique Philippe Bleuze. Depuis 10 heures ce matin, les rafales sont revenues à des pointes de 100 km/h. Il reste maintenant à organiser les secours. Mais nous n’avons aucune communication pour le moment et nous ne connaissons pas le bilan de la tempête. »

Martine Valo

VALO Martine


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