La France insoumise s’organise pour rafler la mise

mercredi 30 août 2017.
 

Article du quotidien Libération

Fort de l’audience acquise par les députés de son mouvement, Jean-Luc Mélenchon veut créer un parti avec une structure solide pour s’affirmer comme la principale force d’opposition. Voire plus.

La fin de l’année politique a été longue pour Jean-Luc Mélenchon et les siens. Après une année électorale pleine de suspense et de rebondissements, le chef des insoumis comptait les heures avant son départ en vacances. Ce week-end, c’est déjà le retour : le mouvement se retrouve à Marseille pour sa rentrée. Au programme, des conférences, des débats et de la musique. Jean-Luc Mélenchon, prendra la parole dimanche, en fin de matinée, afin de fixer les objectifs. Et ils sont nombreux.

La France insoumise - qui fait énormément de bruit au Palais-Bourbon avec seulement 17 députés grâce à son organisation et sa force sur les réseaux sociaux - souhaite occuper toute la place de l’opposition sous le regard timide des autres partis, notamment à gauche, qui se cherchent depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron.

Le tribun à la chevelure grise, lui, est en première ligne. Jean-Luc Mélenchon a déjà fixé un premier grand rendez-vous en septembre, « le mois qui doit être celui du grand refus populaire de la régression macroniste ». Il sera présent le 12 septembre pour manifester auprès des organisations syndicales afin de s’opposer à la réforme de la loi travail. Mais il a également convoqué les siens à un rassemblement populaire le samedi 23 septembre, à Paris, pour « continuer le combat » après la présentation des ordonnances en Conseil des ministres. Les têtes du mouvement ne comptent pas s’arrêter en chemin. Elles prévoient d’autres opérations sur le bitume et sur l’autre terrain de jeu préféré de La France insoumise, le Web, via des campagnes pour faire tanguer l’Elysée et s’imposer comme la première force d’opposition du pays. Le tout, en espérant que les Français s’en souviennent lors des prochaines élections. Car à terme, l’ambition de Mélenchon et sa bande est de diriger le pays, tout simplement.

L’autre objectif de La France insoumise est aussi important : la transformation du mouvement en parti. Une convention se tiendra les 14 et 15 octobre pour décider de l’organisation. « Une boîte à idées » a déjà été proposée aux 500 000 personnes qui soutiennent La France insoumise après avoir cliqué sur le site internet. Les militants donnent leur avis autour de quatre axes : quelles campagnes pour le mouvement, quelles méthodes d’action, quels outils, quelle organisation ? « C’est un débat passionnant qui s’ouvre, bien loin du caractère desséché de La République en marche [LREM] devenue simple chambre d’enregistrement du gouvernement, ou de la décomposition morbide des partis traditionnels. Nos décisions seront actées lors de la convention nationale », détaille Alexis Corbière. Ce qu’il ne dit pas, c’est que Jean-Luc Mélenchon a déjà une petite idée sur la suite et que deux de ses proches, Manuel Bompard et Charlotte Girard, joueront les premiers rôles. Un de ses lieutenants nous confie : « La chose qui est certaine, c’est que nous ne voulons pas un parti banal renfermé sur lui-même, les militants resteront actifs sur le terrain et consultés pour toutes les grandes décisions afin de continuer à grandir. »

La France insoumise a parcouru beaucoup de chemin en très peu de temps. En février 2016, lors de l’annonce de sa candidature à la présidentielle qui a donné naissance au mouvement, Jean-Luc Mélenchon partait un peu dans l’inconnu, sûr de rien malgré la confiance affichée. Il comptait le moindre sou. Aujourd’hui, il pèse politiquement et il pourra s’appuyer sur des financements publics. La France insoumise va toucher près de 4 millions d’euros d’ici à 2022 grâce à son score aux législatives. Personne ne fait mieux à gauche. « On est loin du jackpot de La République en marche, mais c’est pas mal du tout. Vous savez, nous, on a appris à faire de grandes choses avec très peu de moyens », confie un député insoumis. D’ailleurs, Mélenchon cherche à acheter un grand local à Marseille qui serait un peu plus qu’une simple permanence mais pas le siège du mouvement, qui sera, lui, basé à Paris.

Au milieu des bouleversements, il y a une chose qui ne change pas : le rapport de La France insoumise avec les autres partis de gauche. Il n’y a pas ou peu de discussions. Le mouvement de Jean-Luc Mélenchon est prêt à échanger occasionnellement sur des sujets précis, mais pas question de s’allier ou fusionner sur le long terme. Rachid Temal, membre de la direction du Parti socialiste, regrette ce choix et explique que La France insoumise ne « pourra pas prendre le pouvoir sans l’aide des autres familles à gauche ». Les écologistes et les communistes pensent la même chose. De leur côté, les proches de Jean-Luc Mélenchon répondent qu’ils ne doivent rien à personne et qu’ils sont arrivés à se faire une place au soleil sans l’aide de quiconque. Et ils ne comptent pas la lâcher.

Rachid Laïreche


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message