Gilles Poux PCF, Maire de La Courneuve : Lettre ouverte à Pierre Laurent

samedi 6 mai 2017.
 

La Courneuve, le 27 avril 2017

Cher Pierre,

Les communistes sont face à un choix stratégique majeur :

Soit se mettre résolument au service de la dynamique populaire qui est née grâce à l’espoir qui se redessine dans notre peuple du fait de la formidable campagne que nous venons de vivre avec la France Insoumise.

Soit chercher à préserver des positions, une légitimité d’appareil, dans des postures de calculs à mille lieux des gens.

Pour moi, le choix est clair, c’est la première alternative qui s’impose.

Je ne me suis pas, en effet, reconnu dans les atermoiements de mon parti ces dernières années et particulièrement ces derniers mois, plus soucieux de son existence que d’être au cœur du mouvement populaire.

J’ai le terrible sentiment qu’une fois de plus, guidés par des crispations d’appareil, nous sommes en train de passer à côté de l’histoire.

Une fois de plus, car la liste des occasions manquées est longue dans notre histoire. Par exemple :

Il y a eu 1956 où nous avons préféré cacher aux communistes et aux peuples le rapport Khrouchtchev pensant ainsi préserver notre aura, nous rendant à notre corps défendant complices des crimes et déviations du régime de l’URSS

Ce fut le cas aussi au milieu des années 60 et 70 où ne voyant pas l’enthousiasmant mouvement d’émancipation populaire se dessiner avec une jeunesse en quête d’une nouvelle société, d’un monde nouveau, où ignorant la naissance de mouvements d’émancipation des femmes, nous nous sommes retrouvés à la remorque des luttes et des exigences nouvelles qui émergeaient au sein du peuple

Ce fut le cas au début des années 80 face aux mouvements des jeunes des cités populaires, filles et fils d’immigrés, quand nous les avons regardés se révolter sans vraiment en être alors que dans ces mêmes cités populaires nous avions une cellule communiste par cage d’escalier

Et que dire de l’après 2012 et de nos tergiversations avec le Front de Gauche

Que l’on ne se méprenne pas, il ne s’agit pas ici d’un réquisitoire contre le PCF, mon parti, d’autant que dans le même temps nous avons su être là dans les luttes sociales, au cœur des solidarités internationales, souvent seuls à garder l’idée vivante de la nécessaire transformation sociale.

Mais à l’évidence, nos pratiques nous ont conduits à passer à côté des mutations, des évolutions qui se dessinaient dans notre société et des exigences qui naissaient au cœur des populations. Et de fait, nous n’avons pas contribué à ce que ces possibles prennent l’essor suffisant pour devenir majoritaires et transforment la société.

J’ai été moi-même acteur de ces politiques mais nous pouvons évoluer comme quand, par exemple, Marie-George Buffet a proposé cette belle dynamique du Front de Gauche et du non au référendum sur le traité constitutionnel européen.

Alors aujourd’hui, allons-nous laisser dans la nature ces 7 millions d’électrices et d’électeurs qui se sont déplacé-e-s parce qu’elles-ils se sont senti-e-s à l’unisson d’un projet de société incarné par « l’avenir en commun » ?

Allons-nous continuer à dire que nous soutenons Jean-Luc Mélenchon mais que les communistes font leur propre campagne, alors qu’au cœur des bureaux de vote dimanche nous étions rassemblés pour représenter la France Insoumise ?

Allons-nous pour les élections législatives qui arrivent être dans des exigences déplacées, parce que partisanes, et ainsi nourrir de nouvelles divisions, incompréhensions et paralysies ?

Personnellement, je dis stop. J’en ai assez de ces gâchis.

Soyons capables enfin de nous dégager des intérêts de chapelle respectifs et acceptons pour une fois de partir, et d’être d’abord et surtout au service, mais réellement, de ces 7 millions de citoyennes et citoyens qui ont repris confiance en leur force. La force du peuple.

Soyons capables d’admettre, et ce 1er tour avec la campagne que nous venons de mener nous l’a dit avec force, que l’histoire de l’union de la gauche qui nous a bercé depuis la fin des années 60 est terminée. Une nouvelle réalité politique est en train de s’écrire. Le temps des petits calculs, des billards à trois bandes pour soit disant préserver des positions est révolu et c’est tant mieux. D’autant que le résultat de ces pratiques n’a été qu’un continuel affaiblissement. De nouvelles exigences émergent, alors soyons capables d’être ouverts à ce mouvement, inventons, faisons vraiment du neuf.

Ainsi, pour aborder les prochaines élections législatives, il est essentiel d’ouvrir la discussion entre la France Insoumise, le Parti de Gauche, le PCF, Ensemble,… avec un seul objectif : « fortifier le mouvement qui vient de s’exprimer ce 23 avril 2017 ». Nous en aurons bien besoin car ce qui sortira de ce 2ème tour des présidentielles tournera le dos, une fois encore, aux attentes populaires.

Pour cela, pourquoi ne partirions-nous pas de cette idée simple, à partir de « l’article 11 de l’alinéa 3 de la constitution actuelle » qui dit, qu’avec 185 Députés et 4,5 millions de pétitions, on peut imposer que soit organisé un référendum pour la convocation d’une Assemblée constituante et ainsi donner un prolongement immédiat et concret à notre campagne des présidentielles ?

Voilà une belle ambition.

Naturellement, ces Députés devraient représenter de manière équilibrée les forces en présence y compris en ouvrant des investitures à celles et ceux qui ne sont dans aucun parti.

Mais de grâce, ne recommençons pas à dicter les conditions comme tu le fais encore, certes poliment, à l’occasion de ta dernière conférence de presse.

Il est temps enfin de reprendre confiance en notre peuple, en notre force. Soyons ambitieux, créatifs, soyons capables de porter le bonheur.

Bien fraternellement.

Gilles POUX

La Courneuve, le 27 avril 2017

Pierre LAURENT

Secrétaire national

Parti Communiste Français


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